Tristes Pontiques de Ovide : le disert des Tartares

En l’an 8 de notre ère, Ovide fut exilé par l’empereur Auguste aux confins de l’Empire, à Tomes sur les bords du Danube, l’actuelle Roumanie. Quelle fut sa faute ? Les avis divergent.





Ovide explique dans une de ses lettres : « je ne suis pas ici en châtiment d’un meurtre / je n’ai empoisonné personne / je n’ai rien falsifié ni fait usage de faux / je n’ai jamais enfreint la loi / et pourtant ma faute est encore plus grave / ne me demande pas de quoi il s’agissait / j’ai écrit un Art imbécile / voila de quoi sont coupable mes mains / ma faute c’est cet Art d’aimer / Qu’on n’aille pas chercher plus loin ».

Ailleurs, il parlait d’une « erreur / pas crime » et aussi, il avouait : « j’ai vu un crime / un crime est passé par mes yeux / stupides ». Ces explications n’épuisent pas les hypothèses. Marie Darrieussecq en propose d’autres : une profanation du culte isiaque chère à l’impératrice ou aurait-il été le témoin des turpitudes de la fille d’Auguste ?

Quoiqu’il en soit, c’est de cet exil qu’Ovide écrit des lettres rassemblées en deux livres : les Tristes et les Pontiques. Elles sont adressées à ses amis, pour qu’elles soient lues à Rome. Ces lettres content les longues années d’exil qu’Ovide ne supporte pas dans ce pays où l’hiver semble éternel. Elles sont traversées de confiance et de colère, de servilité et de mépris, d’amitié et de traitrise : elles sont une variation mélodique de la condition humaine.

Ces lettres sont aussi celle d’un écrivain et d’un poète. Ovide est soucieux de son art, et aussi de sa postérité. Il écrit : « je haïssais la poésie comme un crime », « haïr la poésie/ce serait raisonnable/moi/je suis fou », « la poésie est dangereuse/toute la poésie/la poésie est un crime ».

On laissera aux latinistes apprécier la qualité de la traduction de Marie Darrieussecq. Pour nous, elle est limpide, fluide, orale, s’« efforçant de former des phrases comme on parle/mais elles s’écrivaient d’elles mêmes en rythme/tout ce qui me venait était poème ». Ainsi écrivait Ovide.

Tristes Pontiques
Ovide
(traduit du latin par Marie Darrieussecq)
Editions P.O.L
419 pages
25 euros
Tristes pontiques de Ovide, DR

Article publié le 02/02/2009 à 08:54 | Lu 5810 fois