Salut mon vieux ! Quand un acteur épingle avec humour les conditions de vie en maison de retraite

Le comédien David Poirot se produit encore quelques temps à l’atelier théâtre de Montmartre dans un spectacle intitulé « Salut mon vieux ! (Poirot vous parle) » qui aborde pendant une bonne heure les conditions de vie en maison de retraite… Un spectacle humain et rempli de tendresse.


Né d’une rencontre entre le comédien (David Poirot), le metteur en scène (François Delaive) et l’auteur (Laurent Guyot) en quête d’une créativité inattendue, le spectacle ose un thème fort, pas évident à aborder sur scène : celui de la fragilité des personnes âgées et de leurs conditions de vie en maison de retraite.

Cependant, cette pièce n’a rien de triste ou de glauque (pour reprendre un terme à la mode). Pendant un peu plus d’une heure, le comédien évoque avec humour et tendresse le quotidien des résidents de la maison de retraite « Rayon de soleil ». Et David Poirot sait de quoi il parle, puisqu’il fut lui-même animateur dans l’un de ses établissements pour personnes âgées… Avant de se faire « remercier » pour avoir critiquer les conditions de vie des retraités !

Ouvrant la porte d’un univers que l’on s’occupe tant à occulter, le personnage de Poirot nous apparaît comme la caricature de son créateur et homonyme David Poirot : « Poirot, vous savez, comme le poireau… Blanc de cheveux et vert de queue… ». Il est contradictoire : à la fois drôle et saisissant, naïf et réaliste, timide et expansif, triste et joyeux, touchant et incisif, docile et sauvage, tout cela sans qu’il ne s’en aperçoive.

Hormis sa forme, « Salut mon vieux ! (Poirot vous parle) » n’a rien d’un One man show. Il s’agit ici de théâtre mettant en scène un seul comédien. Ce n’est ni une suite de sketches ni une critique ouverte de notre société, mais l’interprétation d’un texte construit.
Salut mon vieux ! Quand un acteur épingle avec humour les conditions de vie en maison de retraite

Extraits

« … la gentille « Cactus », celle dont j’vous parlais tout à l’heure avec les poils au menton, celle qui attend de faire une fleur au bord de la fenêtre, elle parle pas, elle chante pas mais faut l’abreuver… « Au gouttes à gouttes » comme disent les infirmières. Alors avec sa perfusion, elle se promène dans les couloirs de la résidence et elle suit la lumière… Ça s’appelle l’héliotropisme m’a expliqué ma tendre Fejria. C’est comme les tournesols ou les papillons de nuit qui cherchent le soleil. »

« Ça, c’est ma belle Fejria qui l’a acheté pour les vieux… C’est pour mon fils maintenant… Putain de journée !… Bref, c’est quand même bizarre d’aller dans les magasins de jouets pour trouver de quoi faire bosser le cerveau des pépés. Faut les voir : quatre-vingts ans de vie, et tu joues au play-mobil pour pas perdre la boule. C’est pas un monde… Ils sont toujours à comparer les vieillards à des bébés… Sérieux… Je les ai entendus au « Rayon de Soleil »… « ils vont manger leur quatre heures… »… Mais qu’est-ce que vous croyez ?… Quand mon petit Maurice il aura mouillé sa couche, il va pleurer le bambin, et moi ou Fejria, on ira le changer… Normal !… Mais mon vieux Maurice, quand il l’avait mouillé la sienne, il pleurait pas, il fermait sa gueule. Il avait honte. Il se cachait et l’enlevait même tout seul pour la balancer par la fenêtre. Alors faut pas tout mélanger… c’est comme la bouffe. »

« D’ailleurs c’est quoi la meilleure combine pour devenir riche ?… Je vous le donne en mille, messieurs dames !… Les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes !… C’est le nom exact pour pas dire asile, hospice ou mouroir… C’est pas des blagues. Faut pas traîner, si vous voulez gagner de l’argent, c’est là-dedans qu’il faut investir. C’est la comptable du « Rayon de soleil » qui m’en a parlé. « Faut investir Poirot », « maintenant que vous êtes un garçon responsable ». Ça faisait un peu peur. Alors elle m’a montré les chiffres. Il fallait l’entendre : « Aujourd’hui, y’a plus de 600 000 personnes en maisons de retraite, et dans les quinze prochaines années y’en aura deux fois plus… En 2020, mon petit Poirot, les plus de 60 ans représenteront un tiers de la population ; et les plus de 80 ans auront triplé »… Et elle continuait pendant que moi je me disais quand même qu’à 1500 euros par mois pour une biscotte, une soupe, une couche et peu de purée, ça devait rapporter gros cette affaire. Enfin c’était pas clair dans ma tête. »

Salut mon vieux ! (Poirot vous parle)

Jusqu’au 26 avril 2008 : les vendredis et samedis 21h à :

L’Atelier Théâtre de Montmartre,
7 rue Coustou
75018 Paris (01 46 06 53 20).


Publié le 17/04/2008 à 16:38 | Lu 8787 fois