La couleur du soleil d’Andréa Camilleri : noir des ires

A l’image de l’artiste, la peinture de Michelangelo Merisi dit Le Caravage est ombrageuse et violente traversée de fulgurantes lumières. Sous une sorte de faux essai et de vrai roman mi-policier mi-historique, Andréa Camilleri fait un portrait véridique du peintre au moment ou celui-ci a déjà atteint une notoriété sulfureuse.





Par un concours de circonstances, l’auteur entre en possession de documents autographes du Caravage qui constituent ses mémoires ou, du moins, quelques témoignages sur des événements de sa vie tumultueuse et sur la formation de son œuvre.

Avec un style imitant celui du début du dix-septième siècle, Andréa Camilleri rend parfaitement compte de la réalité du peintre. Il y mêle les tribulations (fuites, bagarres, emprisonnements) de l’homme et les préoccupations de sa vocation artistique. L’accent est mis sur ce qui illumine l’œuvre du Caravage, cette effraction lumineuse du noir.

Dans cette pseudo-confession, Le Caravage écrit : le soleil « rayonnait d’une lumière noire, laquelle assombrissait hommes et choses, mais à pur et à plein, car ils restaient visibles, du moins en partie, comme tranchés par la lumière d’une lampe ou d’une bougie ».

Cette vision l’accompagne sans cesse. Elle est la cause de ses déboires, car les religieux y voit un signe de magie et même l’œuvre de Satan. L’ombre de la mort hante l’artiste. Lorsqu’il peint une corbeille de fruits, il représente ceux-ci abîmés. Il lui est impossible de reproduire un fruit « sans aucun signe de pourriture (…) car même s’il est encore sur la branche, le fruit donne des signes de sa décomposition prochaine et à plus forte raison donc, on ne doit pas le peindre intact quand il est cueilli et disposé dans une corbeille ».

Tout cela fait un récit passionnant où le génie du peintre apparait dans toute sa noirceur, une noirceur poignardée de lumière.

La couleur du soleil
Andréa Camilleri
(traduit de l’italien par Dominique Vittoz)
Editions Fayard
119 pages
16 euros
La couleur du soleil d’Andréa Camilleri : noir des ires

Article publié le 22/12/2008 à 09:22 | Lu 8582 fois