Globalia de Jean-Christophe Rufin : rapports nord-sud et relations jeunes-vieux au sein d’un même roman

Globalia, roman d’anticipation de Jean-Christophe Rufin, romancier, médecin et diplomate nous plonge dans un futur (proche ?) où l’on ne vieillit plus –ou si lentement-, où les vieux ont le pouvoir –et font tout pour le conserver- et où les rapports nord-sud se traduisent par une division nette du monde… Celui de Globalia, démocratie « universelle et parfaite » et celui des non-zones où règnent la violence et le chaos. Un roman -sombre- d’aventures, où l’amour sans vaincre… existe encore.


La démocratie dans Globalia (publié en poche chez Folio, numéro 4230) est universelle et parfaite. Tous les citoyens ont droit au « minimum prospérité » à vie, la liberté d'expression est totale, et la température idéale. Les Globaliens jouissent d'un éternel présent et d'une jeunesse éternelle.

Évitez aussi d'être, comme Baïkal, atteint d'une funeste « pathologie de la liberté », vous deviendriez vite l'ennemi public numéro un pour servir les objectifs d'une oligarchie vieillissante dont l'une des devises est : « Un bon ennemi est la clef d'une société équilibré. »

Extrait d’un entretien en Jean-Christophe Rufin et Gallimard

Globalia, c'est aussi la dictature des vieux…
Jean-Christophe Rufin : C'est, poussée à l'extrême, une certaine conception individualiste des droits de l'homme, au mépris de toute dimension communautaire. Dans cette optique, chacun peut revendiquer tout au long de sa vie, et jusqu'à un âge très avancé, la pleine jouissance de ses moyens et de son pouvoir, au lieu de penser à ceux qui sont à naître. Ainsi, ce qui me frappe le plus quand je reviens du tiers-monde, c'est la quasi-disparition des enfants dans nos sociétés occidentales. Je pense qu'on en mesure encore mal les conséquences.

Globalia
Autre idée importante : la culture prime la nature. Donc tout peut s'acquérir à tout moment, y compris la jeunesse et la beauté - c'est le moteur même de la société de consommation. La nature est profondément inégalitaire, elle disperse ses dons au gré de ses caprices : il faudrait donc la corriger par la culture. Ce n'est pas une idée nouvelle, on en trouve trace dès le XVIIIe siècle : la nature brute, sauvage, est épouvantable, elle ne devient réellement nature qu'après avoir été recréée, cultivée. C'est d'ailleurs toute la philosophie du jardin à la française… En ce sens, Globalia est un immense jardin où les plantes sont remplacées par les êtres humains.

(…)

Globalia est-il un cri d'alarme ? Un avertissement ?
Jean-Christophe Rufin : Peut-être une sorte d'état des lieux avant la catastrophe ! Mais ce n'est pas un essai, c'est d'abord un roman. Disons que c'est un cri d'alarme sans prescription : il y a un diagnostic, mais pas de traitement.

Bref, Globalia est un roman d'aventures et d'amour (qui n’est pas sans rappeler Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley ou certaines écrits de Ray Bradbury) où le plus jeune de nos académiciens Jean-Christophe Rufin, tout en s'interrogeant sur les rapports intergénérationnels, sur la mondialisation et le sens d'une démocratie poussée aux limites de ses dangers, évoque la rencontre entre les civilisations et les malentendus, les espoirs et les violences qui en découlent.

Globalia de Jean-Christophe Rufin
Collection Folio n° 4230
Parution le 02/06/2005
512 pages
Prix : 8.4 euros
ISBN : 9782070309184

Publié le 13/08/2011 à 11:30 | Lu 4056 fois





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