Maltraitance des ainés : trois questions à Dominique Gaston-Raoul

Longtemps référent de la lutte contre la maltraitance des personnes âgées au sein de l'association des petits frères des Pauvres, Dominique Gaston-Raoul, - après avoir fait valoir ses droits à la retraite - est désormais délégué au sein du Pôle Santé du Défenseur des Droits. Il nous éclaire sur le rôle de et le fonctionnement de cette autorité vis à vis des situations qui relèvent - à différents degrés - de la maltraitance.


Quel est le rôle du Défenseur des droits dans la lutte contre la maltraitance des personnes âgées ?

Le Défenseur des droits est saisi par les familles de patients ou de résidents, plus rarement par les personnes elles-mêmes (personnes âgées ou handicapées) concernant des difficultés rencontrées au sein des établissements hospitaliers ou des structures d’hébergement comme les EHPAD, comme par exemple pour des ruptures de contrat de séjours ou des difficultés relationnelles importantes avec des directions d’établissements.
 
Quelle que soit la situation, le Défenseur des droits cherche toujours à entendre l’ensemble des parties (personne réclamante, entourage, direction d’établissement, soignants…). Les interventions portent sur le respect des droits et la protection des personnes.
 
L’objectif est d’amener les parties à la reprise du dialogue, à une médiation et à élaborer éventuellement des recommandations dans l’intérêt de la personne et/ou de l’établissement visé.
 
Lorsque l’atteinte à un droit ou une liberté est établie et en fonction de la nature et de la gravité des informations rapportées, le pôle Santé peut mettre en œuvre les pouvoirs du Défenseur des droits qu’il a à sa disposition et qu’il juge le plus utile à la résolution de l’affaire : convocation de la personne mise en cause, audition ou vérification sur place au sein des établissements…
 
Le Défenseur des droits peut recueillir sur les faits portés à sa connaissance toute information qui lui paraît nécessaire sans que son caractère secret ou confidentiel puisse lui être opposé.
 
Le Défenseur des droits est aussi l’interlocuteur d’associations qui ont besoin de son positionnement et de son poids institutionnel pour arriver à la résolution de difficultés.

 
La saisie pour maltraitance des personnes âgées représente combien de cas par an ?

En 2014, 11% des réclamations reçues au siège du Défenseur des Droits étaient liées à la santé et à la discrimination par rapport à l’âge. 20% des saisines du pôle santé concerne des cas de maltraitance ou de négligence envers des personnes âgées ou en situation de handicap. Les litiges au sein des établissements médico-sociaux interviennent presqu’exclusivement entre les directions d’établissements et les familles de résidents. Même si le sujet reste encore tabou, de plus en plus de familles osent demander de l’aide. Au cours de l’année, le Défenseur des droits a constaté que les limitations de visites ou interdictions, ainsi que les ruptures de contrats de séjour perdurent, voire s’intensifient.
 
Les violences constatées sont en majorité des violences par excès ou négligences (absence de prise en charge de la douleur, changes non effectués ou trop rarement, défaut de communication, manque d’aide à la marche ou au lever). Ce sont ces violences qui sont remontées majoritairement à la connaissance du Pôle Santé. Elles ont pour effet d’accélérer la perte d’autonomie des personnes âgées.
 
Est-ce qu’actuellement, le droit protège bien les personnes âgées en situation de maltraitance dans des institutions de soins ?

La notion de maltraitance sur personne âgée n’est pas suffisamment appréhendée par le droit. Certes le code pénal permet d’aggraver les peines des auteurs d’infractions sur personne vulnérable ; mais les actes de maltraitance les plus fréquents sont difficilement reconnus comme des infractions, bien que vécus comme tels par les victimes.
 
La population vieillit, les personnes vulnérables sont en augmentation. Si la protection des majeurs vulnérables a déjà fait l’objet d’une réforme en 2007, beaucoup reste encore à faire pour renforcer la lutte contre la maltraitance.
 
Il faut sans cesse rappeler que la maltraitance, quels que soient sa forme et son degré, est une atteinte grave aux droits des personnes.
 
Nourri par sa pratique et l’expérience des nombreux partenaires avec lesquels il travaille,  le Défenseur des droits est régulièrement auditionné par l’Assemblée nationale ou le Sénat sur des projets de loi comme par exemple l’ « Adaptation de la société au vieillissement ». Il apporte des éclairages peut faire des propositions d’amendements et des observations.

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Publié le 14/06/2016 à 01:00 | Lu 1576 fois





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