Lutter contre la pénurie de médicaments : la feuille de route d'Agnès Buzyn

Agnès Buzyn, ministre de la Santé, s’est rendue le 8 juillet dernier dans les locaux de l’Ordre national des pharmaciens à Paris afin de présenter sa feuille de route pour lutter contre la pénurie de médicaments. Une feuille de route qui fera l’objet d’enrichissement de la part des acteurs concernés d’ici septembre prochain.


4 axes pour mieux prévenir, gérer et informer les patients et les professionnels de santé
 
1. Promouvoir la transparence et la qualité de l’information afin de rétablir la confiance et la fluidité entre tous les acteurs : du professionnel de santé au patient
L’Ordre des pharmaciens a développé à partir du dossier pharmaceutique (DP) une plateforme visant à permettre aux pharmaciens de signaler les ruptures d’approvisionnement au laboratoire exploitant concerné.
 
Ce partage d’informations doit être élargi à toute la chaîne de distribution. En outre, il convient de diffuser une information adaptée sur la disponibilité des médicaments, des fournisseurs jusqu’aux pharmaciens et vers les patients.
 
En premier lieu, il convient de renforcer la communication réalisée par le pharmacien auprès des patients, afin qu’il puisse fournir en temps réel une information fiable et précise sur la disponibilité de son traitement en ville et à l’hôpital. En outre, cette communication doit inclure la prévention contre la « iatrogénie ruptures », pouvant être à l’origine d’erreurs médicamenteuses.
 
En effet, en cas de pénurie, certains patients sont susceptibles de remplacer le médicament indisponible par un autre sans l’accompagnement d’un professionnel de santé, ce qui peut être à l’origine d’effets indésirables…
 
La mise en oeuvre d’une communication adaptée destinée aux patients nécessite de mobiliser l’ensemble des acteurs notamment les relais sanitaires locaux. A ce sujet, l’ANSM va refondre son site internet afin de le rendre plus accessible au grand public.
 
2. Lutter contre les pénuries de médicaments par des nouvelles actions de prévention et de gestion sur l’ensemble du circuit du médicament
Afin de lutter efficacement contre les pénuries de médicaments, des actions ciblées et adaptées à chacun des acteurs du circuit du médicament seront menées, de la production du médicament à sa délivrance par le pharmacien.
 
En pratique, la loi va simplifier le parcours du patient. En cas de pénurie d’un médicament d’intérêt thérapeutique majeur (MITM), le pharmacien pourra remplacer le médicament indisponible par un autre conformément à la recommandation établie par l’ANSM.
 
Le travail sur les anticancéreux, à risque fort de pénuries, effectué dans la cadre du Conseil Stratégique des Industries de Santé (CSIS), sera poursuivi. Il permettra notamment d’identifier les sites de production de principes actifs et de sécuriser l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement sans oublier les procédures d’achat hospitalier avec une attention particulière sur la qualité des prévisions concernant les quantités achetées. Des travaux seront aussi menés sur les antibiotiques à risque fort de pénurie.
 
L’évaluation des plans de gestions des pénuries (PGP) se poursuivra en impliquant dorénavant les patients. En parallèle, les laboratoires pharmaceutiques commercialisant des médicaments ayant déjà fait l’objet de ruptures devront élaborer un « PGP renforcé » dont le cadre sera défini.
 
Pour mieux lutter contre les pénuries en établissements de santé, un travail sera conduit sur l’adaptation des procédures d’achat de façon à sécuriser l’approvisionnement en médicaments avec notamment une extension du recours aux appels d’offres avec plusieurs attributaires. Concernant l’approvisionnement en ville, le travail avec les sociétés chargées de l’approvisionnement en médicaments des officines, sera renforcé pour garantir une distribution adaptée.
 
3. Renforcer la coordination nationale et la coopération européenne pour mieux prévenir les pénuries de médicaments
Pour renforcer la capacité de régulation des pénuries de MITM par l’ANSM, il est nécessaire de développer des mesures d’anticipation et de renforcer ses pouvoirs de régulation des pénuries, voire augmenter son pouvoir de sanctions.
 
Une action sera également menée afin de mieux prendre en compte le prix de revient industriel, notamment pour les médicaments anciens indispensables et sans alternative. Il convient aussi d’expertiser la mise en place d’une solution publique permettant d’organiser, de façon exceptionnelle et dérogatoire, l’approvisionnement en MITM dans les cas d’échec des négociations avec les laboratoires concernés.
 
Par ailleurs, la réponse aux pénuries de médicaments ne peut être uniquement française. C’est pourquoi, la prévention doit faire l’objet d’une stratégie européenne, intégrant notamment une harmonisation des réglementations.
 
En outre, des solutions et des mesures d’incitations financières et fiscales en faveur du maintien ou de la relocalisation de sites de production en Europe devront faire l’objet de discussions en regard de la nécessaire sécurisation de l’approvisionnement en médicaments.  
 
Les discussions sur l’achat groupé notamment de vaccins essentiels au niveau européen seront poursuivies. Enfin il convient de travailler sur le partage d’information concernant les situations et les causes des pénuries à l’échelle de l’Europe pour pouvoir trouver des solutions adaptées.
 
4. Mettre en place une nouvelle gouvernance nationale
La mise en oeuvre et le suivi des actions de cette feuille de route feront l’objet d’un pilotage national et concerté dans le cadre d’un comité de pilotage associant, pour la première fois, l’ensemble des acteurs concernés. Une évaluation régulière de la feuille de route sera effectuée et un bilan sera publié annuellement.

Publié le 10/07/2019 à 01:00 | Lu 1147 fois