La mule de Clint Eastwood : l'octogénaire qui passait de la drogue pour les cartels (partie 3)

À plus de 80 ans, Earl Stone (Clint Eastwood) est aux abois. Il est non seulement fauché et seul, mais son entreprise risque d'être saisie. Il accepte alors de devenir passeur de drogue pour un cartel mexicain. C'est la première fois depuis Gran Torino (2009) que Clint Eastwood, artiste oscarisé, est à la fois devant et derrière la caméra. Sortie en salles le 23 janvier prochain.





C’est l’actrice Dianne Wiest qui campe Mary, l’ex-femme d’Earl, dont le ressentiment envers son ex concerne tout particulièrement sa relation avec leur fille : elle estime en effet que celui-ci n’a jamais été là pour elle, ou pour sa petite-fille. Mary voit chez lui un comportement caractéristique consistant à faire des promesses non tenues, ce qui est très fréquent.
 
« On a eu énormément de chance que Dianne incarne l’ex-femme d’Earl », indique Rivera. « Elle insuffle une grande douceur au personnage de Mary : on sent bien que malgré la rancœur qui l'anime à son égard, elle éprouve encore des sentiments pour lui et reste sensible à son charme. Ce qui explique probablement pourquoi elle souffre toujours de le voir entrer et sortir ainsi de leurs vies ».
 
Tandis que Mary reproche ouvertement à Earl ses mauvais choix, sa fille Iris n’arrive quasiment plus à lui parler. « Pendant plus ou moins la première heure du film, chaque fois qu’Earl entre dans la pièce, Iris s’en va. Elle a beaucoup de rancœur et elle est même très en colère que son père privilégie son travail à sa famille. Quand il commence à chercher à se faire pardonner, en étant présent lors d’événements importants par exemple, elle constate qu’elle doit essayer de dépasser son ressentiment si elle souhaite tourner la page un jour », raconte Alison Eastwood qui joue sa fille.
 
Contrairement à Iris, sa fille Ginny voit l’autre versant d’Earl. C’est Taissa Farmiga qui joue cette petite-fille qui se prépare à se marier au début du film. « J’adore Ginny. Elle a une immense affection pour sa famille et son grand-père. Personne d’autre ne le supporte vraiment, mais j’apprécie chez elle son grand cœur, sa candeur et le fait qu’elle veuille construire une relation, même imparfaite, avec lui. J’adore les histoires qui montrent les imperfections d’une famille », confie Taissa Farmiga.
 
L’actrice raconte qu’elle a aussi apprécié la thématique des souvenirs qui est explorée dans le film. « Les souvenirs sont fugaces, comme les lys d’Earl qui ne fleurissent qu’un jour : on n’a qu’une seule chance de se créer des souvenirs. Si on est absent, ou si on est là mais pas vraiment présent, on perd cette occasion. Cette histoire montre qu’il est important d’être présent et de se soucier de ceux qui sont à nos côtés, surtout s’il s'agit de ceux qu’on aime. Ginny comprend qu’Earl essaye de faire de son mieux – et elle est sensible à ses tentatives – même si on peut dire qu’il n'a pas encore atteint son objectif ».
 
Aux yeux d'Earl, être là pour sa famille signifie donner un coup de main, financièrement surtout, notamment pour le mariage de Ginny. Encore une fois, sa conception du "soutien" qu'il peut apporter va le pousser à s’éloigner de ceux-là même qui aimeraient le voir plus présent.
 
Et comme à son habitude, Earl trouve plus facile de se lier avec des étrangers que de maintenir de bonnes relations avec sa propre famille. Après s’être remis de son premier rendez-vous avec les membres du cartel qui organise ses "livraisons", il apprend à les connaître et noue même de bonnes relations avec eux, notamment avec Emilio (Robert LaSardo), Andres (Saul Huezo), le type à l’arme automatique (Lee Coc) et Rob le Chauve (Noel G.). Mais c’est quand Earl est convoqué pour rencontrer le patron qu’il est vraiment accueilli au sein de la "famille".
 
« Le cartel choisit Earl pour être leur mule essentiellement parce que c’est un vieil homme équipé d'un pick-up, un type que la DEA ne pourra jamais soupçonner », détaille Moore. « Mais ils apprennent vite qu’on ne sait jamais trop à quoi s’attendre avec ce vieil homme de près de 90 ans. Il emprunte les petites routes de campagne, s’arrête en cours de route et change de direction. Il est formidable, mais en même temps ils sentent bien qu’il vaut mieux l'avoir à l'œil ».
 
LA MULE est à la fois un road-movie retraçant les déplacements imprévus d’Earl à travers le pays pour le compte d’un cartel, comme le personnage dont le héros du film s’inspire, et l’exploration d’une longue vie –celle qu'Earl a choisi de mener au service de ses précieux lys tout en négligeant ses proches.
 
Pour Earl Stone, conduire est facile –c’est sa vie qui est plus compliquée à diriger, car il est hanté par les erreurs du passé et celles qu’il commet encore à l'heure actuelle, en toute conscience et dans l’espoir qu'elles lui seront pardonnées à l'avenir. Tout se résume à deux choses qui semblent vraiment difficiles dans la vie : la famille et le pardon.
 
« Chaque fois qu’on réalise un film ou qu’on joue un rôle, on apprend quelque chose : on raconte des histoires, on les joue, on vit des aventures, on résout des problèmes. Ça permet d’apprendre à se connaître, de savoir plus ou moins ce qu’on ferait dans la vraie vie. C’est ce qui rend ce boulot si passionnant », confie Eastwood.
 
« Earl sait qu’il n’a pas agi comme il aurait dû avec ses proches, mais là, il se rend compte qu’ils ne lui pardonneront peut-être jamais. C’est un coup fatal pour lui », poursuit-il. « On pense toujours qu’on a le temps. Peut-être qu’on l’a, peut-être pas. Peut-être que c’est ce que pense Earl ».

Avec : Clint Eastwood, Laurence Fishburne, Bradley Cooper, Dianne Wiest, Alison Eastwood, Michael Peña, Taissa Farmiga


Article publié le 14/01/2019 à 01:00 | Lu 1360 fois