IPC : le point sur les différentes techniques chirurgicales en matière de cancer colorectal

A l’occasion de mars Bleu, mois dédié à la lutte contre le cancer colorectal, qui tue chaque année 18.000 personnes (majoritairement des seniors), l’Institut Paoli-Calmettes (IPC) de Marseille fait le point sur les dernières techniques chirurgicales existantes pour lutter contre la maladie.





Avec 43.000 nouveaux cas chaque année, le cancer colorectal représente, par sa fréquence, le troisième cancer chez l'homme et le deuxième chez la femme. Si l'espérance de vie s'est améliorée ces dernières années, ce cancer tue encore chaque année près de 18.000 personnes -il tue 5 fois plus que les accidents de la route.  
 
A l’occasion de mars Bleu, l’ICP de Marseille, spécialisé dans le traitement des cancers colorectaux, fait le point sur les différentes techniques chirurgicales qui permettent de lutter contre la maladie en fonction des tumeurs détectées chez les patients.
 
Traitement curatif des tumeurs superficielles gastro-intestinales dès la coloscopie
« Lorsque la tumeur est limitée à la muqueuse et si elle n’est pas infiltrée de plus de 1 mm dans la sous muqueuse, dans 85% des cas, la résection par voie écho-endoscopique est suffisante. Il n’y a alors pas besoin d’une chirurgie complémentaire », affirme le Dr Marc Giovannini, responsable de l’unité d'échoendoscopie et d'endoscopie d'oncologie digestive de l’IPC.
 
Cette résection sous muqueuse des tumeurs digestives superficielles s’effectue dans ce cas en un seul fragment (monobloc) et offre l’avantage de réduire pratiquement à 0% le risque de récidive locale. 
 
Pour la majorité des tumeurs, la chirurgie comme traitement principal…
Hormis dans le cas où une résection endoscopique est possible, la chirurgie reste le traitement principal d’un cancer du côlon ou d’un cancer du rectum. Elle vise à supprimer le segment digestif atteint et à enlever les ganglions de drainage de la tumeur (curage ganglionnaire). 
 
L’Institut est aujourd’hui le centre qui affiche l’une des plus fortes activités de chirurgie digestive sur la région. Spécifiquement sur le côlon et le rectum, l’équipe de chirurgie digestive a pratiqué en vingt ans, 3.500 chirurgies, dont 1.500 chirurgies du rectum et 2.000 chirurgies du côlon.
 
La chirurgie mini-invasive personnalisée
La coelioscopie multi-trocart, voie d’abord chirurgicale mini-invasive, permet de réaliser des interventions à ventre fermé, sous le contrôle d’une caméra, avec simplement trois à cinq petites incisions de 5 à 12 mm chacune. A l’IPC, la chirurgie coelioscopique multi-trocart a commencé à la fin des années 90, avec les résections coliques et rectales. Aujourd’hui, la technique y est utilisée en routine.
 
En France, entre 2007 et 2015, on est passé à seulement 20% des patients traités par une chirurgie du côlon par coelioscopie multi-trocart. Le pourcentage est encore trop faible pour une chirurgie qui offre l’énorme avantage de limiter la taille des incisions et l’impact de la chirurgie.
 
Dans des centres experts comme l’IPC, le ratio est beaucoup plus important. « Deux voies d’abord peuvent être utilisées pour opérer un cancer du côlon : la laparotomie, opération à ventre ouvert, et la coelioscopie, Aujourd’hui, à l’IPC, dans plus de 90% des cas, l’intervention se fait par coelioscopie », note le Dr Cécile de Chaisemartin, chirurgien en oncologie digestive.
 
Parallèlement à la coelioscopie, un premier robot a été acquis en 2006, puis un second de dernière génération en 2016, ce qui a permis d’intensifier la prise en charge des cancers colorectaux par chirurgie mini-invasive mais robot assistée.

Actuellement, le robot est utilisé pour la chirurgie du cancer du rectum et la chirurgie du cancer du côlon droit. Des évaluations prospectives sont en cours dans ces deux domaines sur la supériorité de la chirurgie robotique par rapport aux autres approches mini-invasives disponibles.
 
Dans tous les cas, l’équipe choisit la technologie la plus adaptée au cas du patient et à sa pathologie :  120 chirurgies du rectum ont été réalisées en 2017, dont 105 (87,5%) en chirurgie mini-invasive ou par robot assistée ; 150 colectomies ont été réalisées en 2017, dont 139 (92,7%) en chirurgie mini-invasive ou par robot assistée. 
 
Le mini-invasif optimisé : une palette de techniques pour correspondre aux cas des patients et diminuer la durée de séjour de 10 à 2 jours
Ces dernières années, innovation après innovation, de nouveaux outils se sont peu à peu greffés à l’approche coelioscopique. De multi-trocart, la coelioscopie tend à devenir mono-trocart, en passant par le nombril. Pratiquée à l’IPC depuis début 2012, et de plus en plus, la colectomie par incision unique permet de réduire les douleurs et les séquelles pariétales pour le patient. Malheureusement, elle ne s’adapte pas aux situations difficiles.
 
La coelioscopie 3D a quant à elle débuté courant 2016, l’IPC s’étant doté d’une colonne de coelioscopie 3D financée grâce à l’aide d’associations mécènes de l’Institut. Le chirurgien opère en bénéficiant d’une vision tridimensionnelle, ce qui augmente la précision du geste chirurgical. Enfin, la durée d’intervention est raccourcie d’une trentaine de minutes environ.
 
Depuis peu, la coelioscopie devient « micro ». En micro-coelioscopie, les instruments utilisés sont dorénavant de 3 mm contre 5 mm à 10 mm. Cette technique fait partie du concept de « low impact coelioscopy », qui y associe une insufflation à basse pression. 
 
Cette approche innovante permet : d’une part de travailler à basse pression. Moins de gaz est insufflé, le ventre est moins distendu, ce qui diminue les douleurs post-opératoires ; d’autre part, de remplacer les mini incisions par de minuscules trous d’aiguille, sans aucune suture cutanée.
 
Cette chirurgie mini-invasive à la carte, caractérisée par la diminution de la taille des incisions, la réduction de la durée et de l’intensité de la période de vulnérabilité liée à l’acte chirurgical, minimise les contrecoups pour le patient. Couplée à une optimisation du traitement de la douleur post-opératoire, elle favorise une réhabilitation précoce. Avec les pratiques de RAAC, elle réduit la durée de récupération post-opératoire de 10 à 2 jours.
 
La chirurgie transanale
L’IPC pilote une étude nationale multicentrique portant sur la chirurgie transanale du cancer du bas rectum. L’essai, qui a démarré début 2016, est mené par 25 équipes françaises. L’objectif consiste à inclure un total de 215 patients. A la mi-décembre 2017, 55 patients avaient déjà été inclus, dont les 2/3 à l’IPC.
 
« Pour le cancer du bas rectum, nous développons effectivement une technique de coelioscopie par les orifices naturels, en l’occurrence l’anus. On parle de « NOTES Surgery ». Nous faisons en quelque sorte de la chirurgie à l’envers, en partant d’en bas pour aller vers le haut. Cette approche réduit encore plus l’agressivité du geste chirurgical et nous permet d’avoir une meilleure vision de la cavité pelvienne, ce qui optimise les chances de conserver l’anus et de préserver l’innervation pelvienne dont sont en partie tributaires les fonctions urologiques », précise le Dr Bernard Lelong, chirurgien en oncologie digestive à l’IPC.

Article publié le 28/02/2018 à 03:51 | Lu 3509 fois