Comment la Covid-19 affecte à la fois l'odorat et le goût

Quel est l’effet du Covid-19 sur nos sens basés sur la chimie ? Un questionnaire a été lancé par un consortium international pour décrire les symptômes perceptifs de différentes maladies respiratoires, dont le Covid-19. Quatre-vingt-cinq laboratoires ont ensuite décortiqué les réponses au niveau mondial et montré que, au-delà de la perception des odeurs, la perception des saveurs sur la langue et dans la bouche est aussi affectée par l’épidémie.





Publiés dans la revue Chemical Senses, ces travaux fournissent des références pour évaluer ces pertes, et pourraient déboucher sur une méthode originale de diagnostic de la maladie.
 
La perte du goût et de l’odorat sont des symptômes fréquemment observés chez les personnes ayant contracté le Covid-19. Le phénomène reste cependant mal connu, car peu étudié au-delà de sa simple constatation, alors qu’il pourrait aiguiller sur le diagnostic de la maladie via des tests de dépistage, rapides et bon marché, différents de ceux basés sur la PCR ou la sérologie.
 
Cinq cents chercheurs regroupés au sein du consortium mondial pour la recherche chémosensorielle (GCCR), ont mis au mois d’avril leurs réseaux de recherche en commun pour élaborer et diffuser un questionnaire à destination des personnes atteintes par différents symptômes respiratoires, dont le Covid-19, afin de mesurer comment la maladie a affecté leurs sens.
 
À travers les réponses, les sens chimiques du goût et de l’odorat ont été analysés selon trois paramètres. D’abord la sapidité, c’est-à-dire la capacité à ressentir les cinq saveurs détectées par la langue : sucré, salé, amer, acide et umami.
 
Ensuite, l’odorat proprement dit, qui est provoqué par les molécules volatiles perçues par la cavité nasale. Enfin, la chimesthésie, qui est la perception de la température, comme le froid de la menthe, ou du piquant par les muqueuses buccales.
 
Ces travaux, qui rassemblent quatre-vingt-cinq équipes, dont l’Institut de chimie de Nice (ICN, CNRS/Université Côte d’Azur) et le Centre de recherche en neurosciences de Lyon (CRNL, CNRS/Université Claude Bernard de Lyon/Université Jean Monnet/INSERM), ont donné lieu à une première publication scientifique qui confirme que, au-delà de l’odorat, l’ensemble des trois modalités perceptives sont bien affectées par la maladie.
 
Le phénomène a été quantifié, afin d’avoir des références pour mesurer la sévérité de cette perte temporaire : par comparaison avec les sensations avant la maladie, la perte moyenne d’odorat est estimée à 80 points, celle de goût à 70 points et de chimesthésie à environ 35 points.
 
À partir des réponses au questionnaire, disponible en plus de vingt langues, plus de quatre mille cas utiles, pour lesquelles l’infection par le covid19 a été validée, ont été analysés. Les participants ont ainsi évalué leurs différentes formes d’odorat et de goût sur une échelle de 0 à 100, avant et après la maladie.
 
Les chercheurs ont ensuite obtenu un score moyen de perte, porteur de différentes informations. Comme les trois pertes ne sont pas égales et que la chimesthésie n’est pas liée à l’odorat, la perte de goût n’est donc pas seulement due à une baisse de la modalité olfactive, bien que celle-ci y joue un rôle central.
 
Ces travaux montrent aussi que le changement de la description associée à la perception, comme dire qu’on ne sent plus les aliments comme avant la maladie, reste très rare. Ces données vont être complétées au fil des nouvelles réponses au questionnaire, y compris de la part de gens y ayant déjà répondu, pour déboucher sur des statistiques complémentaires, afin de voir si des facteurs, par exemple d’âge ou d’origine, influencent ces pertes, et comment les pertes évoluent avec le temps.
 
Ces statistiques pourraient servir à développer des kits de dépistage express alertant d’une éventuelle contamination par le Covid-19, basés sur une perte soudaine de l’odorat.

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Article publié le 20/08/2020 à 10:13 | Lu 3081 fois