Cancer : le point sur les « idées reçues » avec l’INCa

A l’occasion de la Journée Mondiale contre le cancer, qui s’est tenue le 4 février dernier, l’Institut National du cancer (INCa) fait le point sur une série d'idées reçues sur cette maladie et sépare le vrai du faux...


Le cancer est une maladie qui fait peur et sur laquelle il existe un grand nombre d'idées reçues.

Si certaines sont vraies, d'autres en revanche, ne reposent sur aucun argument médical, sont pourtant largement diffusées et retardent parfois le diagnostic et la prise en charge de la maladie !

Dans ce contexte, lINCa a souhaité reprendre point par point les plus fréquentes de ces idées reçues et y apporter son éclairage scientifique. Intéressant et instructif.

Les grandes idées reçues sur le cancer…

On ne peut pas éviter le cancer : vrai et faux

En réalité, plus d'un tiers des cancers pourrait être potentiellement évité en France par des changements dans nos modes de vie et notre environnement, en limitant les expositions aux facteurs de risque connus : tabac, rayonnements UV, alcool, amiante, absence d'activité physique par exemple. Il existe également des vaccins qui protègent contre deux types de cancers : le cancer du foie (lié au virus de l'hépatite B) et celui du col de l'utérus (lié aux papillomavirus humains).

Il faut savoir que de multiples causes combinées peuvent être à l'origine du développement de la maladie, ce qui explique pourquoi tous les cancers ne peuvent être évités. La transformation d'une cellule normale en une cellule cancéreuse est un processus long et complexe au cours duquel différents facteurs peuvent intervenir et engendrer des mutations dans les gènes. Ces facteurs peuvent être liés à une prédisposition génétique, à l'âge (le risque de développer un cancer augmente très fortement avec l'âge), à notre environnement, à nos comportements (l'exposition excessive aux UV par exemple).... . Le rôle de certains facteurs de risque n'est, par ailleurs, pas encore bien connu.

Si la prévention offre donc de réelles possibilités de réduire les risques de développer un cancer à un âge précoce, elle ne permet pas de se prémunir contre tous les cancers. Autrement dit, même un mode de vie conforme à toutes les recommandations de santé publique ne constitue pas une assurance « tous risques ».

Un traumatisme physique peut causer un cancer : faux

Une chute ou un coup ne peuvent pas provoquer de cancer. En revanche, il peut arriver qu'à la suite d'une chute ou d'un coup, on découvre une anomalie que l'on n'avait pas remarquée jusqu'alors. Le traumatisme révèle dans ce cas la présence d'un cancer, mais ne le provoque pas.

Le cancer peut être dû à un choc psychologique : faux

Cela n'a jamais été démontré. De nombreuses études scientifiques se sont penchées sur cette hypothèse, mais sans pouvoir mettre en évidence un lien de cause à effet. Une publication* a passé en revue 32 de ces études, et sa conclusion va dans ce sens : « Dans l'état actuel des connaissances, il paraît difficile de conclure à la responsabilité des événements stressants de la vie, d'un type de personnalité particulier ou d'une dépression dans l'apparition d'un cancer ». A ce jour donc, il n'existe pas de preuve scientifique d'un lien de cause à effet entre un choc psychique et la survenue d'un cancer.

À l'inverse, le fait d'avoir un cancer peut provoquer des signes d'anxiété et de dépression chez la personne malade ou ses proches. Des médicaments antidépresseurs sont parfois nécessaires et une thérapie peut être proposée. Différents professionnels de santé (psychologues, psychiatres, psycho-oncologues) sont là pour vous aider si vous le souhaitez et peuvent vous proposer un traitement adapté.

Une infection peut provoquer un cancer : vrai

Le cancer n'est pas contagieux, mais certains cancers ont effectivement des origines infectieuses, c'est-à-dire qu'ils se développent à partir d'une infection causée par un virus ou une bactérie. Ainsi, les papillomavirus humains (HPV) sont susceptibles de causer des cancers du col de l'utérus et le virus de l'hépatite B est à l'origine de cancers du foie. Ces virus ne provoquent pas directement un cancer, mais entraînent une infection chronique qui en favorise l'apparition. Il existe un vaccin contre ces deux familles de virus. Par ailleurs, une bactérie, Helicobacter pylori, est en cause dans la plupart des cas de cancers de l'estomac. Lorsqu'elle est diagnostiquée, cette infection relève d'un traitement antibiotique qui contribue à prévenir la survenue d'un cancer de l'estomac.

Le cancer est héréditaire : vrai et faux

Le diagnostic de cancer ne veut pas systématiquement dire qu'un risque particulier existe pour les autres membres de la famille. Dans la très grande majorité des cas, le cancer n'est pas en relation avec le patrimoine génétique hérité des parents. Si plusieurs cas de cancers sont observés dans une famille, cela est souvent dû à la fréquence actuelle des cancers (un homme sur trois et une femme sur quatre risquent aujourd'hui de développer un cancer au cours de leur vie, principalement après 50 ans).

Pour certains cancers toutefois, l'influence génétique est importante. Il s'agit par exemple du rétinoblastome (cancer de la rétine chez l'enfant), du cancer de la thyroïde de type « médullaire », du syndrome de Li Fraumeni ou des cancers du côlon liés à une polypose adénomateuse familiale. Quelquefois, il arrive que des membres d'une même famille soient touchés sur plusieurs générations par le même type de cancer diagnostiqué à un âge plus précoce que l'âge habituel. Dans ce cas, il peut exister dans la famille une prédisposition héréditaire en relation avec la présence d'un gène qui est abîmé (on dit que le gène a muté). Ceci favorise le développement du cancer à un âge jeune. On appelle ce type de gènes des gènes de prédisposition.

Par exemple, on estime qu'environ 5 à 10% des cancers du sein sont liés à un risque héréditaire. Deux gènes de prédisposition aux cancers du sein sont connus, appelés BRCA1 et BRCA2. De même, le syndrome HNPCC (abréviation de l'anglais Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer), également appelé « syndrome de Lynch », est une prédisposition héréditaire au cancer du côlon ou du rectum sans polypose. Deux gènes de prédisposition sont connus : MLH1 et MSH2. Cela concerne 2 à 5% des cancers colorectaux. Dans ce cas, plusieurs membres d'une même famille développent des cancers colorectaux avant l'âge de 50 ans. Il ne faut pas hésiter à parler à un médecin de ses antécédents familiaux de cancer. Si besoin, il orientera le patient ou ses proches vers un médecin onco-généticien.

Il ne sert à rien d’arrêter de fumer puisqu’il existe un grand nombre de facteurs de risque de cancers

Il est vrai qu’il existe une multitude de facteurs de risque de cancers mais le tabac est de loin le principal facteur de risque évitable de cancers en France et dans le monde! On estime qu’en France, il est responsable de 44 000 décès chaque année par cancer, dont 81% des décès par cancer du poumon. Une étude montre que les fumeurs perdent en moyenne dix ans de vie (toutes causes de décès imputables au tabac confondues) ! Un lien est également avéré entre le tabac et d’autres localisations de cancers : cavité buccale, vessie, rein, côlon, rectum par exemple.

De plus, le tabac agit en interaction avec d’autres facteurs de risque (au premier chef, l’alcool) et multiplie le risque de certains cancers : le risque de développer un cancer de la cavité buccale est ainsi multiplié par 1,57 pour un fumeur qui ne consomme pas d’alcool, par 13 lorsque la personne fume et consomme de l’alcool !

La même étude montre également le bénéfice de l’arrêt du tabac à tout âge. Ainsi par exemple, arrêter de fumer à environ 39 ans réduit l’excès de risque de décès, toutes causes confondues, de 90%. Ces anciens fumeurs présentent certes un excès de risque de décès de 20% par rapport aux non-fumeurs, mais s’ils avaient continué à fumer, cet excès de risque serait de 200% !

Arrêter le tabac est donc bénéfique pour la santé, quel que soit l’âge. Le risque de cancer diminue au fur et à mesure que passent les années sans tabac, il est presque réduit de moitié 5 ans après la dernière cigarette.

Ca ne sert à rien de se faire dépister pour un cancer quand on n’a pas de symptôme : faux

C'est exactement l'inverse ! Le but du dépistage est de mettre en évidence une anomalie le plus précocement possible, en l'absence de signes, avant que la maladie ne s'aggrave. Une mammographie par exemple peut permettre de déceler des lésions dans le sein trop petites pour être perçues à la palpation. Ces lésions peuvent être bénignes, mais s'il s'agit d'un cancer, plus il sera détecté tôt, moins son traitement sera lourd et plus grandes seront les chances de guérison.

En France, deux types de cancers font l'objet d'un dépistage organisé par les pouvoirs publics : le cancer colo-rectal et le cancer du sein. Par ailleurs, la détection précoce des cancers de la peau et notamment du plus grave d'entre eux, le mélanome, est recommandée aux personnes à risque, telles celles qui ont beaucoup de grains de beauté. De même la détection du cancer du col de l'utérus est-elle recommandée aux femmes de 25 à 65 ans.

On ne guérit pas tous les cancers : vrai

On guérit aujourd'hui plus d'un cancer sur deux, contre un sur trois il y a trente ans. Ceci tient en premier lieu à des diagnostics plus précoces, notamment grâce aux dépistages. Or, pour de nombreux cancers, plus le diagnostic est précoce, plus les chances de guérison sont grandes. Par ailleurs, les techniques actuelles d'imagerie (scanner, IRM, TEP) permettent de réaliser des bilans extrêmement précis qui guident le chirurgien, le radiothérapeute. De nombreux progrès ont également été accomplis dans le domaine thérapeutique, avec par exemple les thérapies ciblées qui permettent aux patients, dans certains cas, de bénéficier de traitements « sur mesure ». Il faut cependant savoir que la situation n'est pas identique pour tous les cancers. On en guérit certes plus d'un sur deux mais ce chiffre traduit de grandes disparités. En effet, certains cancers –tel celui du testicule- sont de meilleur pronostic que d'autres.

La recherche contre le cancer ne trouve rien : faux

La recherche a connu de grandes avancées depuis une dizaine d'années ! Outre les progrès des techniques de diagnostic, la biologie moléculaire a permis d'identifier des anomalies génétiques présentes dans certaines tumeurs. Cela a conduit à développer des molécules qui agissent directement sur ces anomalies : les thérapies ciblées.

Plus efficaces, présentant moins d'effets secondaires que la chimiothérapie classique, elles permettent de personnaliser le traitement en fonction des caractéristiques de chaque tumeur. L'une de ces molécules, l'imatinib, a véritablement révolutionné le traitement d'une forme de leucémie et de certains cancers digestifs. Mais elles ne permettent pas encore de traiter tous les cancers. A l'heure actuelle, une quinzaine de molécules de thérapie ciblée sont disponibles en France, et près de 500 sont en cours de développement dans le monde.

La recherche a également permis d'associer plus efficacement les traitements (la radiothérapie au cours d'une intervention pour un cancer du sein par exemple), de mettre au point des techniques chirurgicales moins mutilantes (cœlioscopie, ganglion sentinelle...), de rendre la radiothérapie plus précise de façon à préserver au maximum les organes voisins et à limiter ainsi les effets secondaires du traitement.

Rappelons que selon l'Organisation Mondiale de la Santé, le cancer a été responsable de 7,6 millions de décès dans le monde en 2008. D'après les projections, cette mortalité dépassera 13,1 millions en 2030...

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*« Existe-t-il un lien entre un événement psychique et le risque de survenue d'un cancer ? » S. Schraub, H. Sancho-Garnier, M. Velten. Revue d'Epidémiologie et de Santé Publique 57 (2009) 113-123

Publié le 06/02/2013 à 11:46 | Lu 1731 fois