En France, on estime que plus de 850 000 personnes sont aujourd’hui atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée, ce qui représente 6 % des personnes de plus de 65 ans.
Le rapport Gallez (2005) puis, plus récemment le rapport Ménard (2007) insistent tous les deux sur la nécessité de « changer le regard porté sur la maladie », soulignant son image sociale très négative et ses conséquences sur la prise en charge. En effet, les représentations sociales figureraient parmi les raisons invoquées pour expliquer le sous diagnostic de la maladie d’Alzheimer : médecins, patients et entourage seraient ainsi tentés de repousser au plus tard l’annonce d’une maladie qui « cristallise toutes les peurs liées au vieillissement » (Gallez, 2005, p.22).
Dans le cadre du Plan Alzheimer 2008-2012, l’Inpes a pour mission d’identifier, de décrire et d’analyser les perceptions, les attitudes et les connaissances du grand public, des aidants familiaux et des professionnels de santé à l’égard de la maladie d’Alzheimer.
A cette fin, l’Inpes a réalisé plusieurs études :
- une revue de la littérature sur les représentations sociales de la maladie d’Alzheimer ;
- une étude qualitative sur les perceptions, connaissances et attitudes du grand public, des professionnels de santé et des aidants familiaux sur la maladie ;
- une enquête quantitative en population générale sur les mêmes thèmes.
Leur objectif est d’améliorer la connaissance du regard porté sur la maladie par le grand public, les aidants familiaux et les professionnels de santé.
91% des personnes interrogées souhaiteraient connaître leur diagnostic si elles avaient des signes évocateurs de la maladie
Peu d’études sont disponibles en France sur les représentations sociales de la maladie d’Alzheimer, ainsi que le montre la revue de littérature réalisée sur ce sujet. En ce sens, les travaux réalisés par l’Inpes dans le cadre de la mesure 37 du Plan Alzheimer fournissent des indications intéressantes et inédites sur la manière dont la population générale, les aidants et les professionnels de santé perçoivent et comprennent la maladie d’Alzheimer.
Une maladie crainte, y compris par les professionnels de santé
La maladie d’Alzheimer est la troisième maladie jugée la plus grave par les personnes interrogées (derrière le cancer et le sida) et la troisième maladie la plus crainte devant le cancer et les accidents de la circulation.
Toutefois, malgré la forte crainte que suscite cette maladie, 91% des personnes de plus de 18 ans souhaiteraient connaître leur diagnostic si elles avaient des signes évocateurs. Tant le grand public que les aidants familiaux ou les professionnels de santé expriment leur peur face au caractère inéluctable de la maladie et à ses conséquences sur l’identité du malade et sur l’entourage. Pour les proches et les professionnels de santé, cette peur se double d’un fort sentiment d’impuissance. Les médecins généralistes interrogés dans le cadre de l’étude qualitative font part également de leur peur à l’égard du diagnostic : peur de poser un mauvais diagnostic, peur de l’annoncer et d’avoir à gérer une maladie contre laquelle ils ont le sentiment de ne pouvoir rien faire.
Une maladie stigmatisante pour les personnes atteintes…
La maladie d’Alzheimer signe souvent la mort sociale du malade et l’isolement de son entourage. La maladie d’Alzheimer est une maladie qui stigmatise les personnes atteintes, et leur entourage. L’image que l’on a des malades les exclut de la vie sociale.
L’analyse des représentations des personnes atteintes que véhicule la presse tant nord-américaine que française, montre que les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer sont perçues comme perdant leur personnalité, déshumanisées, voire déjà mortes ; les images dominantes sont celles de patients à des stades avancés de la maladie, décrites sur un ton dramatique.
Par ailleurs, les comportements socialement inadaptés que peuvent avoir les personnes malades semblent constituer une source importante d’exclusion et peuvent conduire l’entourage à éviter les situations d’interaction sociale qui pourraient déclencher un sentiment de honte. Ce sentiment revient souvent dans les études analysant les attitudes du malade et de son entourage : la maladie d’Alzheimer apparaît ainsi comme un sujet tabou lié aux symptômes et aux images associées à la maladie. En 2008, dans l’enquête qualitative, 31% des plus de 18 ans déclarent qu’ils se sentent ou se sentiraient mal à l’aise face à une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. L’étude qualitative apporte également quelques compléments à cette vision. Il est frappant de constater à quel point le patient est absent des évocations tant dans le grand public que chez les aidants familiaux et les professionnels de santé.
… qui a des conséquences importantes sur leur entourage
Si le patient est frappé par la stigmatisation et est souvent absent des discours, l’entourage paraît tiraillé entre deux postures. D’un côté, on lui reconnaît une place indispensable dans la prise en charge des patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Dans l’étude qualitative, les professionnels de santé ont insisté sur le rôle crucial des aidants, dépositaires du diagnostic, garants de la prise en charge et du bien-être du malade et ont pointé la nécessité pour eux d’accompagner l’entourage en plus du malade. D’un autre côté, on admet que cette place peut être lourde et conduire à des situations d’épuisement. 93 % des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête quantitative approuvent ainsi l’idée que la maladie d’Alzheimer peut avoir des effets dévastateurs sur la famille des malades.
En effet, selon les données de l’enquête Paquid (1999), six patients sur dix souffrant de cette maladie vivent à domicile. Les répercussions de l’aide sur les aidants est aussi bien psychologique (dépression, troubles du sommeil…), que physique (50 % de mortalité en plus chez les aidants) ou même financière. L’entourage semble également touché par la stigmatisation du malade ; l’isolement, s’il n’est pas exprimé, apparaît dans le discours des aidants qui connaissent mal les aides dont ils peuvent bénéficier, les associations vers lesquelles se tourner et qui ignorent l’évolution de la maladie. La maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées sont la principale cause de dépendance lourde des personnes âgées et donc également d’entrée en institution.
Près de 40 % des Français s’estiment mal informés sur la maladie d’’Alzheimer
Près de quatre personnes sur dix estiment être plutôt mal ou très mal informées sur la maladie d’Alzheimer. Par rapport à d’autres thèmes de santé comme le tabac (5 % de personnes estimant être mal informés à ce sujet), l’alcool (10 %) ou le cancer (18 %), cette proportion est assez importante. En outre, 79 % des personnes interrogées pensent que les médias devraient parler davantage de la maladie d’Alzheimer.
Une mauvaise connaissance de la maladie
La maladie d’Alzheimer présente donc la particularité de susciter des craintes dans la population, associées à un faible sentiment d’information. En comparaison, le cancer est une maladie que l’on craint mais sur laquelle on s’estime suffisamment informé.
Ce constat peut s’expliquer par une connaissance partielle de la maladie de la part du grand public mais également des aidants familiaux et des professionnels de santé : si la définition générale de la maladie leur est connue, un grand flou subsiste sur ses causes, son évolution et les diverses formes qu’elle peut revêtir. Les personnes interrogées font état de recherches réalisées à l’étranger (Angleterre, Canada et Amérique latine) et pensent que la France est en retard dans ce domaine comme d’ailleurs en matière d’actions concrètes réalisées pour prendre en charge les patients ou améliorer leur qualité de vie.
Une maladie de la mémoire :
La littérature internationale sur les représentations sociales de la maladie d’Alzheimer révèle que la maladie d’Alzheimer est très souvent interprétée comme une maladie de la mémoire. Pour autant, les pertes de mémoire en général ne sont pas forcément perçues comme anormales et sont très souvent considérées comme une conséquence inévitable du vieillissement, comme quelque chose d’attendu, dans l’ordre des choses.
Cette perception se retrouve dans la population française : les pertes de mémoire sont spontanément évoquées comme première caractéristique de la maladie d’Alzheimer et 74 % des personnes interrogées estiment qu’il est normal de perdre la mémoire en vieillissant. De plus, les troubles liés à la mémoire figurent parmi les signes évocateurs les mieux connus du grand public : les symptômes les plus largement associés à la maladie d’Alzheimer sont ainsi les difficultés à se rappeler le chemin pour rentrer chez soi (95 % pensent qu’il s’agit d’un signe évocateur de la maladie d’Alzheimer) et ne pas se souvenir des événements de la veille (83 %).
Une maladie perçue comme un « fléau » moderne :
83 % des plus de 18 ans estiment ainsi que de plus en plus de personnes sont atteintes de la maladie d’Alzheimer. Les deux-tiers (64%) déclarent qu’on ne peut rien faire pour guérir une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer et seuls 29 % pensent que la maladie d’Alzheimer est souvent héréditaire.
L’impression la plus partagée, telle qu’elle a été exprimée dans les réunions de groupe ou des entretiens, est que la maladie d’Alzheimer frappe au hasard et que les chercheurs peinent à identifier des causes ou des moyens de prévention de la maladie. De fait, les connaissances sur les facteurs préventifs de la maladie d’Alzheimer de la population générale reflètent l’état de la recherche dans ce domaine : en dehors de la stimulation cérébrale qui est reconnue par une majorité de personnes (80 %) comme un facteur préventif, d’autres comportements de santé, tels que l’alimentation ou l’activité physique, conduisent à des avis plus mitigés. Quant aux déterminants environnementaux, ils divisent clairement l’opinion : 44% de la population interrogée estiment ainsi que vivre dans un environnement non pollué diminue le risque d’avoir une maladie d’Alzheimer.
L’enquête quantitative fournit quelques indicateurs de notoriété du Plan Alzheimer et de la confiance à l’égard de l’action des Pouvoirs Publics : 39 % des plus de 18 ans reconnaissent que la lutte contre la maladie d’Alzheimer est une priorité pour les Pouvoirs Publics ; 56 % ont confiance dans l’action des Pouvoirs Publics pour lutter contre cette maladie. Le Plan Alzheimer est connu par 54 % de la population (dont 16 % qui déclarent savoir de quoi il s’agit). Lorsqu’on leur présente les grandes orientations de ce plan, 87 % des personnes interrogées pensent qu’il va améliorer la situation en France sur la maladie d’Alzheimer.
Une forte attente à l’égard de la recherche
La recherche figure parmi les attentes les plus fortes du grand public à l’égard des pouvoirs publics. La recherche de nouveaux traitements devrait être, selon les personnes interrogées, l’un des trois objectifs prioritaires de l’Etat en matière de lutte contre la maladie d’Alzheimer : 22 % des personnes interrogées le citent comme premier objectif prioritaire ; 65 % des personnes interrogées le mentionnent parmi les trois objectifs prioritaires à investir, juste avant le soulagement des familles (cité par 17 % en première intention et par 60 % au total) et le développement d’établissements d’hébergement spécialisés (16 % en première intention et 52 % au total). A noter d’ailleurs l’espoir suscité par ce secteur puisque 65 % des personnes de plus de 18 ans pensent qu’un traitement pour soigner la maladie sera trouvé de leur vivant.
C’est également sur les progrès de la recherche sur la maladie que souhaite être informée prioritairement la population générale (42 % le mentionnent comme domaine prioritaire), avant l’avancée sur la prise en charge des malades et de leurs proches et les progrès sur le diagnostic.
Ces données chiffrées confirment très largement les résultats de l’étude qualitative qui font déjà apparaître des attentes importantes du grand public à l’égard des chercheurs. De façon moins importante, et plutôt de la part des aidants et des professionnels, le souhait est exprimé de créer ou de multiplier les structures, d’augmenter les aides financières aux familles, de mieux rémunérer les soins, d’améliorer la coordination des soins, de mieux former les professionnels de santé.
Il ressort donc de ces études l’image très négative et uniformément partagée de la maladie d’Alzheimer. Le malade apparaît étrangement absent des évocations autour de la maladie, tout comme il est généralement oublié des études sur les perceptions de la maladie d’Alzheimer. Ces résultats vont donc dans le sens d’actions visant à modifier le regard porté sur la maladie, notamment par une valorisation de la place et de la parole des personnes malades. La démarche adoptée par l’Inpes auprès des professionnels de santé pour les inciter à placer le patient au coeur de la relation de soins vise à répondre à cet objectif. Quant à l’analyse des perceptions du patient à l’égard de sa maladie, elle fera l’objet d’une série d’études menées par l’Inpes en 2009 dans le cadre de la mesure supplémentaire 1 du Plan Alzheimer.
Le rapport Gallez (2005) puis, plus récemment le rapport Ménard (2007) insistent tous les deux sur la nécessité de « changer le regard porté sur la maladie », soulignant son image sociale très négative et ses conséquences sur la prise en charge. En effet, les représentations sociales figureraient parmi les raisons invoquées pour expliquer le sous diagnostic de la maladie d’Alzheimer : médecins, patients et entourage seraient ainsi tentés de repousser au plus tard l’annonce d’une maladie qui « cristallise toutes les peurs liées au vieillissement » (Gallez, 2005, p.22).
Dans le cadre du Plan Alzheimer 2008-2012, l’Inpes a pour mission d’identifier, de décrire et d’analyser les perceptions, les attitudes et les connaissances du grand public, des aidants familiaux et des professionnels de santé à l’égard de la maladie d’Alzheimer.
A cette fin, l’Inpes a réalisé plusieurs études :
- une revue de la littérature sur les représentations sociales de la maladie d’Alzheimer ;
- une étude qualitative sur les perceptions, connaissances et attitudes du grand public, des professionnels de santé et des aidants familiaux sur la maladie ;
- une enquête quantitative en population générale sur les mêmes thèmes.
Leur objectif est d’améliorer la connaissance du regard porté sur la maladie par le grand public, les aidants familiaux et les professionnels de santé.
91% des personnes interrogées souhaiteraient connaître leur diagnostic si elles avaient des signes évocateurs de la maladie
Peu d’études sont disponibles en France sur les représentations sociales de la maladie d’Alzheimer, ainsi que le montre la revue de littérature réalisée sur ce sujet. En ce sens, les travaux réalisés par l’Inpes dans le cadre de la mesure 37 du Plan Alzheimer fournissent des indications intéressantes et inédites sur la manière dont la population générale, les aidants et les professionnels de santé perçoivent et comprennent la maladie d’Alzheimer.
Une maladie crainte, y compris par les professionnels de santé
La maladie d’Alzheimer est la troisième maladie jugée la plus grave par les personnes interrogées (derrière le cancer et le sida) et la troisième maladie la plus crainte devant le cancer et les accidents de la circulation.
Toutefois, malgré la forte crainte que suscite cette maladie, 91% des personnes de plus de 18 ans souhaiteraient connaître leur diagnostic si elles avaient des signes évocateurs. Tant le grand public que les aidants familiaux ou les professionnels de santé expriment leur peur face au caractère inéluctable de la maladie et à ses conséquences sur l’identité du malade et sur l’entourage. Pour les proches et les professionnels de santé, cette peur se double d’un fort sentiment d’impuissance. Les médecins généralistes interrogés dans le cadre de l’étude qualitative font part également de leur peur à l’égard du diagnostic : peur de poser un mauvais diagnostic, peur de l’annoncer et d’avoir à gérer une maladie contre laquelle ils ont le sentiment de ne pouvoir rien faire.
Une maladie stigmatisante pour les personnes atteintes…
La maladie d’Alzheimer signe souvent la mort sociale du malade et l’isolement de son entourage. La maladie d’Alzheimer est une maladie qui stigmatise les personnes atteintes, et leur entourage. L’image que l’on a des malades les exclut de la vie sociale.
L’analyse des représentations des personnes atteintes que véhicule la presse tant nord-américaine que française, montre que les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer sont perçues comme perdant leur personnalité, déshumanisées, voire déjà mortes ; les images dominantes sont celles de patients à des stades avancés de la maladie, décrites sur un ton dramatique.
Par ailleurs, les comportements socialement inadaptés que peuvent avoir les personnes malades semblent constituer une source importante d’exclusion et peuvent conduire l’entourage à éviter les situations d’interaction sociale qui pourraient déclencher un sentiment de honte. Ce sentiment revient souvent dans les études analysant les attitudes du malade et de son entourage : la maladie d’Alzheimer apparaît ainsi comme un sujet tabou lié aux symptômes et aux images associées à la maladie. En 2008, dans l’enquête qualitative, 31% des plus de 18 ans déclarent qu’ils se sentent ou se sentiraient mal à l’aise face à une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. L’étude qualitative apporte également quelques compléments à cette vision. Il est frappant de constater à quel point le patient est absent des évocations tant dans le grand public que chez les aidants familiaux et les professionnels de santé.
… qui a des conséquences importantes sur leur entourage
Si le patient est frappé par la stigmatisation et est souvent absent des discours, l’entourage paraît tiraillé entre deux postures. D’un côté, on lui reconnaît une place indispensable dans la prise en charge des patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Dans l’étude qualitative, les professionnels de santé ont insisté sur le rôle crucial des aidants, dépositaires du diagnostic, garants de la prise en charge et du bien-être du malade et ont pointé la nécessité pour eux d’accompagner l’entourage en plus du malade. D’un autre côté, on admet que cette place peut être lourde et conduire à des situations d’épuisement. 93 % des personnes interrogées dans le cadre de l’enquête quantitative approuvent ainsi l’idée que la maladie d’Alzheimer peut avoir des effets dévastateurs sur la famille des malades.
En effet, selon les données de l’enquête Paquid (1999), six patients sur dix souffrant de cette maladie vivent à domicile. Les répercussions de l’aide sur les aidants est aussi bien psychologique (dépression, troubles du sommeil…), que physique (50 % de mortalité en plus chez les aidants) ou même financière. L’entourage semble également touché par la stigmatisation du malade ; l’isolement, s’il n’est pas exprimé, apparaît dans le discours des aidants qui connaissent mal les aides dont ils peuvent bénéficier, les associations vers lesquelles se tourner et qui ignorent l’évolution de la maladie. La maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées sont la principale cause de dépendance lourde des personnes âgées et donc également d’entrée en institution.
Près de 40 % des Français s’estiment mal informés sur la maladie d’’Alzheimer
Près de quatre personnes sur dix estiment être plutôt mal ou très mal informées sur la maladie d’Alzheimer. Par rapport à d’autres thèmes de santé comme le tabac (5 % de personnes estimant être mal informés à ce sujet), l’alcool (10 %) ou le cancer (18 %), cette proportion est assez importante. En outre, 79 % des personnes interrogées pensent que les médias devraient parler davantage de la maladie d’Alzheimer.
Une mauvaise connaissance de la maladie
La maladie d’Alzheimer présente donc la particularité de susciter des craintes dans la population, associées à un faible sentiment d’information. En comparaison, le cancer est une maladie que l’on craint mais sur laquelle on s’estime suffisamment informé.
Ce constat peut s’expliquer par une connaissance partielle de la maladie de la part du grand public mais également des aidants familiaux et des professionnels de santé : si la définition générale de la maladie leur est connue, un grand flou subsiste sur ses causes, son évolution et les diverses formes qu’elle peut revêtir. Les personnes interrogées font état de recherches réalisées à l’étranger (Angleterre, Canada et Amérique latine) et pensent que la France est en retard dans ce domaine comme d’ailleurs en matière d’actions concrètes réalisées pour prendre en charge les patients ou améliorer leur qualité de vie.
Une maladie de la mémoire :
La littérature internationale sur les représentations sociales de la maladie d’Alzheimer révèle que la maladie d’Alzheimer est très souvent interprétée comme une maladie de la mémoire. Pour autant, les pertes de mémoire en général ne sont pas forcément perçues comme anormales et sont très souvent considérées comme une conséquence inévitable du vieillissement, comme quelque chose d’attendu, dans l’ordre des choses.
Cette perception se retrouve dans la population française : les pertes de mémoire sont spontanément évoquées comme première caractéristique de la maladie d’Alzheimer et 74 % des personnes interrogées estiment qu’il est normal de perdre la mémoire en vieillissant. De plus, les troubles liés à la mémoire figurent parmi les signes évocateurs les mieux connus du grand public : les symptômes les plus largement associés à la maladie d’Alzheimer sont ainsi les difficultés à se rappeler le chemin pour rentrer chez soi (95 % pensent qu’il s’agit d’un signe évocateur de la maladie d’Alzheimer) et ne pas se souvenir des événements de la veille (83 %).
Une maladie perçue comme un « fléau » moderne :
83 % des plus de 18 ans estiment ainsi que de plus en plus de personnes sont atteintes de la maladie d’Alzheimer. Les deux-tiers (64%) déclarent qu’on ne peut rien faire pour guérir une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer et seuls 29 % pensent que la maladie d’Alzheimer est souvent héréditaire.
L’impression la plus partagée, telle qu’elle a été exprimée dans les réunions de groupe ou des entretiens, est que la maladie d’Alzheimer frappe au hasard et que les chercheurs peinent à identifier des causes ou des moyens de prévention de la maladie. De fait, les connaissances sur les facteurs préventifs de la maladie d’Alzheimer de la population générale reflètent l’état de la recherche dans ce domaine : en dehors de la stimulation cérébrale qui est reconnue par une majorité de personnes (80 %) comme un facteur préventif, d’autres comportements de santé, tels que l’alimentation ou l’activité physique, conduisent à des avis plus mitigés. Quant aux déterminants environnementaux, ils divisent clairement l’opinion : 44% de la population interrogée estiment ainsi que vivre dans un environnement non pollué diminue le risque d’avoir une maladie d’Alzheimer.
L’enquête quantitative fournit quelques indicateurs de notoriété du Plan Alzheimer et de la confiance à l’égard de l’action des Pouvoirs Publics : 39 % des plus de 18 ans reconnaissent que la lutte contre la maladie d’Alzheimer est une priorité pour les Pouvoirs Publics ; 56 % ont confiance dans l’action des Pouvoirs Publics pour lutter contre cette maladie. Le Plan Alzheimer est connu par 54 % de la population (dont 16 % qui déclarent savoir de quoi il s’agit). Lorsqu’on leur présente les grandes orientations de ce plan, 87 % des personnes interrogées pensent qu’il va améliorer la situation en France sur la maladie d’Alzheimer.
Une forte attente à l’égard de la recherche
La recherche figure parmi les attentes les plus fortes du grand public à l’égard des pouvoirs publics. La recherche de nouveaux traitements devrait être, selon les personnes interrogées, l’un des trois objectifs prioritaires de l’Etat en matière de lutte contre la maladie d’Alzheimer : 22 % des personnes interrogées le citent comme premier objectif prioritaire ; 65 % des personnes interrogées le mentionnent parmi les trois objectifs prioritaires à investir, juste avant le soulagement des familles (cité par 17 % en première intention et par 60 % au total) et le développement d’établissements d’hébergement spécialisés (16 % en première intention et 52 % au total). A noter d’ailleurs l’espoir suscité par ce secteur puisque 65 % des personnes de plus de 18 ans pensent qu’un traitement pour soigner la maladie sera trouvé de leur vivant.
C’est également sur les progrès de la recherche sur la maladie que souhaite être informée prioritairement la population générale (42 % le mentionnent comme domaine prioritaire), avant l’avancée sur la prise en charge des malades et de leurs proches et les progrès sur le diagnostic.
Ces données chiffrées confirment très largement les résultats de l’étude qualitative qui font déjà apparaître des attentes importantes du grand public à l’égard des chercheurs. De façon moins importante, et plutôt de la part des aidants et des professionnels, le souhait est exprimé de créer ou de multiplier les structures, d’augmenter les aides financières aux familles, de mieux rémunérer les soins, d’améliorer la coordination des soins, de mieux former les professionnels de santé.
Il ressort donc de ces études l’image très négative et uniformément partagée de la maladie d’Alzheimer. Le malade apparaît étrangement absent des évocations autour de la maladie, tout comme il est généralement oublié des études sur les perceptions de la maladie d’Alzheimer. Ces résultats vont donc dans le sens d’actions visant à modifier le regard porté sur la maladie, notamment par une valorisation de la place et de la parole des personnes malades. La démarche adoptée par l’Inpes auprès des professionnels de santé pour les inciter à placer le patient au coeur de la relation de soins vise à répondre à cet objectif. Quant à l’analyse des perceptions du patient à l’égard de sa maladie, elle fera l’objet d’une série d’études menées par l’Inpes en 2009 dans le cadre de la mesure supplémentaire 1 du Plan Alzheimer.