Nouvel abattement forfaitaire pour les retraités modestes : une réforme globalement redistributive


Le projet de Budget 2026 instaure un abattement forfaitaire unique de 2 000 € pour tous les retraités, en remplacement du mécanisme actuel de 10 % plafonné. Cette mesure vise à alléger l’imposition des pensions modestes tout en préservant les marges budgétaires de l’État.

PAR SENIORACTU.COM | Publié le 29/07/2025

Un changement de paradigme fiscal à compter de 2026

Depuis 1978, les retraités bénéficient d’un abattement proportionnel de 10 % sur leurs pensions, limité à environ 4 400 € par foyer fiscal en 2025. Ce mécanisme, historiquement pensé pour compenser une moindre capacité à déduire des frais professionnels, pourrait être remplacé dès l’imposition sur les revenus 2025, déclarés en 2026, par un abattement forfaitaire unique de 2 000 € par personne .

Ce dispositif s’inscrit dans le plan budgétaire présenté le 16 juillet 2025 par le Premier ministre François Bayrou, dans la perspective de réduire les déficits publics tout en ciblant les avantages fiscaux jugés trop coûteux ou injuste.

Une mesure redistributive en faveur des retraités modestes

Pour les pensions annuelles inférieures à 20 000 €, le nouveau forfait est plus avantageux que l’ancien seuil de 10 % : par exemple, sur une pension de 18 000 €, l’économie fiscale passera d’environ 1 800 € à 2 000 €. Ainsi, les retraités modestes – souvent non imposables – y gagnent au change.

À l’inverse, au-delà de ce seuil, l’effet devient progressivement neutre puis pénalisant : un pensionné touchant 35 000 € ne bénéficie qu’un abattement de 2 000 € au lieu de 3 500 €, ce qui alourdit d’autant la base imposable et l’impôt dû.

Les retraités seuls plus impactés que les couples

Dans le système actuel, l’abattement de 10 % s’applique à chaque personne, mais plafonné à un montant global de l’ordre de 4 400 € par foyer. La réforme n’a pas encore précisé si le forfait sera versé double aux couples (4 000 € au total) ou limité au foyer. Si seule une somme unique est admise, les retraités vivant en couple pourraient y perdre davantage que les retraités seuls. Dans les deux cas, c’est la situation des veufs et veuves, souvent mono-retraités, qui semble la plus fragile face à cette réforme fiscale.

Entre enjeux budgétaires et redistribution ciblée

Le gouvernement justifie cette réforme autant par la simplification du calcul fiscal que par une redistribution ciblée : la suppression du régime de 10 % rapporterait près de 5 milliards d’euros par an à l’État, en taxable principalement les retraités aisés tout en maintenant un soutien aux retraités modestes.

Pour les pouvoirs publics, l’abattement proportionnel est devenu une niche fiscale jugée inefficace : les bénéficiaires les plus aisés y gagnaient systématiquement davantage, alors que les plus modestes en étaient peu ou pas imposés. Le forfait fixe de 2 000 € est présenté comme un outil de justice sociale, recentrant le bénéfice sur les plus fragiles.

Critiques et oppositions : l’ANSA et les syndicats tirent la sonnette d’alarme

L’UNSA Retraités rappelle que plus de 8 millions de retraités pourraient être impactés par cette mesure, y compris parmi les classes moyennes encore modestes. La suppression pure et simple de l’abattement de 10 % a été dénoncée comme injuste, notamment parce qu’elle rendrait imposables jusqu’à 500 000 retraités aujourd’hui exonérés, selon l’UNSA.

Les associations soulignent aussi le risque d’inégalités nouvelles : retraités déjà pénalisés par la suppression de la demi-part fiscale des veuves depuis 2014 se retrouvent à nouveau ciblés par la réforme.

Perspectives et calendrier

Aucune décision définitive n’a encore été inscrite dans la loi de finances pour 2025. L’abattement de 10 % reste donc maintenu pour les pensions déclarées en avril 2025 (revenus de 2024) avec ses plafonds actuels : minimum de 442 € par pensionné, maximum de 4 321 € par foyer fiscal.

La réforme pourrait être votée dans le cadre du Budget 2026, avec application sur les pensions 2025 déclarées au printemps 2026. Jusqu’à l’adoption des décrets d’application, les modalités précises — notamment pour les couples — restent en suspens.

Le passage d’un abattement proportionnel à un forfait de 2 000 € constitue une réforme aux effets complexes : elle favorise les retraités modestes tout en rééquilibrant la contribution fiscale des plus aisés. Si l’objectif affiché est une redistribution plus juste, les incertitudes autour des modalités de mise en œuvre (couples, seuils, application) doivent être clarifiées rapidement.

En l’état actuel, la mesure semble viser une fiscalité plus ciblée, potentiellement redistributive à condition que les principes d’équité entre situations soient respectés. La vigilance citoyenne et fiscale reste de mise -comme toujours.








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