De Dany le Rouge à Dany Boom, chronique de Serge Guérin

La semaine dernière, vers 20 heures, tombaient les résultats du vote en vu de renouveler le parlement Européen. Le retour sur la scène nationale de Daniel Cohn-Bendit restera l’une des principales images de cette séquence politique qui a apporté son lot de surprises.





Si nous nous plaçons sur le plan de la représentation de l’âge, il est assez amusant de noter que c’est un sexagénaire, un véritable totem de la génération du baby-boom, Daniel Cohn-Bendit, qui aura animé –ou ranimé- la campagne.

A sa façon, il a réussi à ringardiser Olivier Besancenot qui pourtant fait de sa jeunesse un argument marketing majeur. Et oui Olivier, Dany le Rouge est devenu Dany Boom !

Le succès des listes écolo (20% si on ajoute les listes écologistes indépendantes qui sans grande subtilité ont essayé de bénéficier de la dynamique d’Europe Ecologie) doit une fière chandelle à deux sexagénaires qui vivent depuis longtemps l’Europe dans leur quotidien.

En effet, Daniel Cohn-Bendit est un véritable pont entre la France et l’Allemagne, alors qu’Eva Joly de son côté, ne cesse de faire des allers et retours entre la Norvège et la France.

Les deux se sont distingués par une vraie compétence et un discours passionné pour l’Europe. A eux deux, ils dépassent les 130 ans et ont pourtant, donné une sacré leçon d’enthousiasme à la plupart des femmes et hommes politiques, dont l’état-civil est souvent le principal argument politique.

Mais cependant, le fait majeur de cette élection restera le taux effrayant d’abstention (59,52%). Un taux socialement très situé puisque, si j’en crois les sondages (TNS Sofres et Opinion Way), il y a eu 69% d’abstention chez les ouvriers et 66% chez les employés. Mais quid des jeunes ? Ces générations pour qui l’Europe est l’horizon naturel et qui souvent, oublient combien cette construction relève d’une volonté politique unique ; pourtant, les jeunes se sont massivement détournés des urnes.

Opinion Way nous apprend que seulement 28% des 18-24 ans et 30% des 25-34 ans sont allés voter, contre 58% des 60 ans et plus. Cette génération est d’ailleurs la seule à s’être déplacée majoritairement jusqu’au bureau de vote. Notons toutefois que le décrochage de 10% des plus jeunes par rapport à l’ensemble de la population est traditionnel dans toutes les élections.

Si Eva Joly et Daniel Cohn-Bendit sont de joyeux sexagénaires, ils n’ont pourtant pas fait recettes auprès de la génération des 60 ans et plus. La liste Europe Ecologie voit baisser son score à mesure que l’âge des votants augmente. Le PS, et plus encore l’UMP, sont dans la situation inverse ! Attention, la clef générationnelle est trop pauvre pour expliciter un vote, car les générations sont devenues sociologiquement très plurielles.

Reste qu’il est rafraîchissant de noter que les plus jeunes se sont largement retrouvé dans le discours et le style portés par deux sexagénaires qui sont largement représentatifs de la catégorie sociologique des jeunes seniors que j’ai dénommée il y a quelques années par le terme de BooBos, pour Boomers Bohêmes.

Serge Guérin
Professeur à l’ESG
Vient de publier La société des seniors Editions Michalon
De Dany le Rouge à Dany Boom, chronique de Serge Guérin

Article publié le 15/06/2009 à 07:25 | Lu 3210 fois