Covid-19 et maladie du foie : liaisons dangereuses

Les personnes souffrant de cirrhose ou de maladie du foie gras (Nash) sont beaucoup plus nombreuses à développer une forme grave de Covid. Pour les experts de la Paris Hepatology Conference*, ces patients doivent être considérés comme à risque élevé pour la Covid, et donc prioritaires pour la vaccination et la prise en charge en cas d’infection.





Comme toutes les pathologies, les maladies chroniques du foie et leur prise en charge ont été
impactées par la pandémie de Covid-19.

Dans de nombreux pays, les actions de dépistage et de prévention ont été freinées, voire mises en sommeil, rendant encore plus incertain le respect de l’objectif d’élimination des hépatites virales B et C fixé par l’Organisation mondiale de la Santé à l’horizon 2030.
 
Par ailleurs, en dépit des efforts des équipes soignantes, l’indispensable suivi de certaines personnes au stade de cirrhose a lui aussi été affecté par la Covid, au risque de retarder certains diagnostics de cancer ou d’autres complications.
 
Dans les années à venir, ce relâchement risque fort de se traduire par une augmentation du nombre de cancers du foie ; des études récentes l’ont évaluée à plusieurs dizaines de milliers de cas supplémentaires d’ici à 2030.
 
Les risques de forme grave de Covid multipliés en cas de Nash ou de cirrhose
Les relations entre la Covid-19 et maladies du foie pourraient être plus directes, comme le démontre de nombreuses études concordantes menées dans le monde entier.
 
D’une part, les anomalies des tests hépatiques sont fréquentes chez les malades de la Covid, bien plus que dans la population générale, et un lien net est établi entre la présence d’anomalies des tests hépatiques et la gravité de la Covid. Ces anomalies hépatiques peuvent être considérées comme un critère de gravité de l’infection au SARS-Cov-2.
 
D’autre part, le fait d’avoir une maladie chronique du foie expose à un risque de forme plus grave de Covid. Ce risque est particulièrement élevé pour les patients au stade de cirrhose et ceux qui sont atteints d’une Nash. Une étude internationale à grande échelle a ainsi évalué le risque de mortalité à 32% pour les patients au stade de cirrhose, contre 8% pour les patients atteints d’une maladie chronique du foie sans cirrhose.
 
Des risques spécifiques que les autorités sanitaires doivent reconnaître
Le SARS-Cov-2 représente également un risque spécifique pour les personnes atteintes d’une simple stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD). Les patients avec une NAFLD ont un risque plus élevé d’évoluer vers un Covid sévère. Par ailleurs, l’infection par le SARS-Cov-2 et le syndrome hyperinflammatoire associé peuvent contribuer à déclencher une véritable Nash chez une personne atteinte d’une simple stéatose.
 
Il reste beaucoup à faire pour comprendre les liens entre les maladies du foie et la Covid. Mais déjà, dans le monde entier, les autorités sanitaires doivent tirer les leçons de ces inquiétants constats et considérer les personnes malades du foie comme prioritaires pour la vaccination et, en cas d’infection, pour une prise en charge spécifique.
 
La Covid représente une menace particulière pour les personnes atteintes de la maladie du foie gras car elles sont nombreuses (environ 10 millions de Français) et la plupart l’ignorent. En outre, comme elles ont souvent plus de 50 ans et des comorbidités associées (diabète et surcharge pondérale), elles sont plus à risque de développer des formes sévères de la Covid.

*La 14ème Paris Hepatology Conference (PHC), réunie du 8 au 10 mars 2021 a été l’occasion pour les hépatologues du monde entier de faire le point sur ces maladies et leur prise en charge, dans un
contexte fortement impacté par l’épidémie de Covid.

Article publié le 10/03/2021 à 09:30 | Lu 11515 fois