Cancer de la prostate : greffe de cellules souches contre l'impuissance

Douze patients souffrant de troubles sévères de l’érection après un cancer de la prostate ont reçu une greffe de cellules souches dans le pénis. Après six mois, des améliorations significatives de la qualité des rapports sexuels, de l’érection, de la rigidité du pénis et de la qualité de l’orgasme ont été rapportées par les patients selon une étude de l’Inserm*.





Les troubles de l’érection sont une séquelle fréquente après l’ablation chirurgicale d’un cancer de la prostate et naturellement, peuvent altérer la qualité de vie et l’image de soi de ces hommes... Dans ce cas précis, cette impuissance est la conséquence de lésions des vaisseaux et des nerfs du pénis qui sont normalement accolés aux faces latérales de la prostate avant d’atteindre les formations érectiles.
 
Récemment, des chercheurs de l’Inserm ont tenté de réparer ces lésions cellulaires péniennes causées par la prostatectomie radicale. Pour ce faire, les scientifiques ont injecté dans le pénis des cellules souches prélevées dans la moelle osseuse des patients.
 
Rappelons que de nombreuses études ont montré que la moelle osseuse contenait différents types de cellules souches ayant la capacité de se transformer spontanément en cellules du même type que celles endommagées dans le pénis après prostatectomie radicale. Elles peuvent également secréter des substances favorisant la réparation de vaisseaux sanguins et de nerfs endommagés.
 
L’objectif principal de cet essai soutenu par l’Inserm était de vérifier la faisabilité et la tolérance d’une injection de cellules souches médullaires dans le pénis pour traiter des troubles de l’érection après prostatectomie radicale. Les patients ont été inclus pour une durée totale de 6 mois dans cette étude. En tout, quatre doses croissantes de cellules souches (prélevées dans la hanche) ont été testées et chaque patient n’a reçu qu’une seule injection.
 
Il semblerait que la tolérance au traitement ait été excellente ; le principal effet secondaire rapporté était une douleur passagère au niveau du site de prélèvement de la moelle osseuse (région fessière).
Six mois après la greffe cellulaire, les chercheurs ont noté une amélioration significative des principaux scores sexuels, notamment un gain moyen du score évaluant la fonction érectile de +10 points (17,4/30 à 6 mois versus 7,3/30 avant la greffe) sur une échelle allant de 0 à 30 (30 correspondant à la meilleure fonction érectile possible).
 
Les autres scores significativement améliorés concernaient la satisfaction globale des rapports sexuels : 6,8/10 à 6 mois versus 3,9/10 avant la greffe (10 étant le score le plus favorable) ; la qualité de l’orgasme : 6,3/10 à 6 mois versus 3,5/10 avant la greffe ; la rigidité du pénis lors des rapports : 2,6/4 à 6 mois versus 1,3/4 avant la greffe (4 indiquant une rigidité maximale). Au moins deux patients ont décrit une réapparition d’érections normales comme avant la prostatectomie radicale sans prise de médicament. Une augmentation moyenne de 1 cm de la longueur du pénis a été constatée. Les bénéfices cliniques ont été plus marqués pour les doses élevées. L’amélioration des scores sexuels s’est maintenue 1 an après la greffe même si certains patients continuaient à utiliser un traitement lors des rapports.
 
Face à ces bons résultats, les chercheurs souhaitent toutefois rappeler que : « le faible nombre de patients inclus dans l’étude et l’absence de groupe contrôle qui aurait reçu une injection « placebo » incitent à la prudence quant à la démonstration avec certitude de l’efficacité de cette nouvelle stratégie thérapeutique. Cependant, il est important de rappeler que les patients traités présentaient tous des troubles de l’érection sévères ne répondant pas au traitement médical maximal et associés à des altérations importantes de la vascularisation pénienne.
 
Cette stratégie thérapeutique pourrait constituer la première approche à visée curatrice des troubles de l’érection. Ces résultats sont publiés dans la revue European Urology.
 
Selon le Pr René Yiou, « si les résultats de cette étude sont confirmés par d’autres essais cliniques contrôlés, les indications de la thérapie cellulaire pourraient s’élargir aux autres formes de troubles de l’érection moins sévères ou résultant de maladies générales comme le diabète ou autres maladies vasculaires ».
 
*Cet essai clinique a été conduit sous la direction du Professeur René Yiou dans le service d’urologie de l’hôpital universitaire Henri-Mondor, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à Créteil.

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Article publié le 15/02/2016 à 01:00 | Lu 2217 fois