Un tiers des créateurs d’entreprise seniors était au chômage…

Quand on est senior et qu’on perd son emploi, on sait que le parcours pour regagner le monde du travail en tant que salarié, sera un parcours du combattant… Avec parfois, des guerres qui sont perdues d’avance ! Afin de lutter contre cet état de fait, de nombreux seniors décident de créer eux-mêmes leur propre emploi… A suivre, un exemple avec un quinqua qui a monté sa structure dans le monde du vin.

PAR SENIORACTU.COM | Publié le 07/05/2014

Les chiffres du chômage publiés ces derniers mois ont levé le voile sur une réalité méconnue du marché du travail : l’envolée du chômage des seniors.
 
En mars dernier, la France comptait un million de chômeurs de 50 ans et plus, une augmentation de  11,2% sur un an. Et de 70% sur les quatre dernières années !
 
Dans ce contexte, de plus en plus de seniors –chômeurs ou pas d’ailleurs– décident de créer leur propre entreprise. Ainsi, selon l’agence pour la création d’entreprises (APCE), ils représentaient 20% des créateurs d’entreprise en 2011, contre 15% il y a dix ans.
 
Pour les seniors, le passage à l’acte, s’il concrétise une idée déjà en germe, intervient le plus souvent à la faveur d’un élément déclencheur : la perte de leur emploi. Var Conseil RH, expert dans la gestion des carrières et des mobilités est amené à conseiller notamment les grands groupes qui, dans le cadre de plans sociaux ou de départs volontaires, s’interrogent sur un accompagnement ad hoc pour aider ces populations à retrouver une activité professionnelle viable.
 
« La création d’entreprise rencontre un écho grandissant dans notre pays. Les seniors n’échappent pas à la règle avec, bien sûr, des réalités différentes. Ainsi, parmi les seniors créateurs d’entreprise, plus d’un sur trois est demandeur d’emploi. Et encore ces statistiques ne prennent pas en compte les salariés que des cabinets comme le nôtre, Var Conseil RH, se voient confiés par les entreprise pour les accompagner dans leur reconversion ou dans leur reclassement externe avant qu’ils ne soient licenciés. Cette proportion non négligeable signale la volonté de rester acteur de son parcours professionnel. En effet, conscients des difficultés de retrouver un emploi salarié une fois passé le cap de la cinquantaine, les seniors trouvent dans la création d’entreprise un moyen de générer un revenu. C’est aussi l’opportunité de donner corps à un projet d’autonomie ou de reconversion auquel beaucoup d’entre eux songeaient depuis plusieurs années, sans oser franchir le pas », déclare Christian Vallée, directeur général de VAR Conseil RH.

Les spécificités de la création d’entreprise par les seniors

L’adéquation entre la personne et le projet

- Le profil des seniors a changé. Plus éloignés que les générations précédentes de l’âge qui leur permettrait de cesser toute activité rémunérée, ils sont contraints de poursuivre leur parcours professionnels dans un marché où la discrimination sur le marché de l’emploi les concernant est forte. Ainsi, le taux d'emploi des 55-64 ans était de seulement 44,5 % en 2012 en France, contre une moyenne de 54 % dans les pays de l'OCDE. Parmi eux, certains quittent des grands groupes dans lesquels ils ont fait la plus majeure partie de leur carrière, ce qui les oblige à retrouver un nouveau projet professionnel avec des aspirations professionnelles qui ont évoluées avec le temps.
 
- Pour les seniors comme pour les autres créateurs, l’analyse des contraintes liées à l’environnement familial et des motivations relatives à la création d’entreprise, est essentielle. Elles sont toutefois très particulières et en lien étroit avec l’évolution sociologique de ces « nouveaux » seniors. En effet, même si leur caractéristique commune est de s’approcher de leur fin de carrière et cessation d’activité à moins de 15 ans, les seniors d’aujourd’hui peuvent être pour certains encore en soutien de famille voire en charge de jeunes enfants du fait de familles recomposées, impliqués dans des prêts de logements toujours plus chers et qui les rendent propriétaires parfois bien après leur retraite.
 
- Concrètement, le consultant expert dans la création d’entreprise doit donc amener le candidat senior à réfléchir à sa situation familiale et financière. Sa santé lui permet-il de réaliser son projet ? De quel revenu minimum vital le senior a-t-il besoin ? Et jusqu’à quand ? Comment protéger son patrimoine et sa famille ?
 
Autant de questions dont les réponses conditionneront l’avenir du projet. A titre d’exemple, un senior âgé de 59 ans, et donc proche de la retraite, pourra, lui, lancer dans une création dont l’objectif est autant l’accomplissement de soi que de générer un petit complément de revenu après la liquidation de sa retraite – comme donner des cours de batterie aux particuliers par exemple.
 
L’étude financière

- Il faudra s’assurer de la cohérence entre le projet personnel du senior, les risques inhérents au projet et la date potentielle de liquidation de retraite. Le senior est alors accompagné dans le calcul du nombre de trimestres restants à cotiser, car il est important de continuer à capitaliser des points pour sa retraite future.
 
- Si le senior est au chômage et indemnisé par Pôle Emploi (avec, potentiellement, 36 mois de durée d'indemnisation), il est alors nécessaire de comptabiliser les trimestres au-delà de la période d'indemnisation. Et ce, afin de mieux appréhender le risque, tout en sachant que l'intérêt du créateur n'est pas nécessairement d'attendre la fin de son indemnisation par Pôle Emploi pour se lancer.
 
- Les seniors demandeurs d’emploi qui créent leur entreprise peuvent bénéficier de différentes aides. Quelles sont-elles ? Comment les obtenir, auprès de qui ? Connaître la réponse à ses questions permet de gagner du temps. Et de bénéficier d’un renfort financier non négligeable pour rendre son projet viable.
 
L’étude juridique

- Le choix de la forme juridique, capitale, dépendra de plusieurs critères. A un âge où il est possible de disposer d’un patrimoine, immobilier notamment, il est indispensable de se prémunir de tout risque d'échec, pouvant dans le pire des cas entraîner une saisie des biens personnels. Le choix de la structure juridique dépendra donc du degré de risque inhérent au projet.
 
- La structure juridique choisie et le statut social du dirigeant (Travailleur Non Salarié ou Salarié, par exemple) qui en découle pouvant avoir un impact sur le montant de sa retraite, une simulation doit également être réalisée.
 
L’acquisition de nouvelles compétences

- Devenir chef d’entreprise et changer de métier après parfois plus de 35 années professionnelles, suscite une motivation forte pour les seniors qui ont vu leurs aspirations personnelles évoluer au fur et à mesure que les strates organisationnelles des entreprises s’alourdissaient. L’enjeu est de les accompagner à une montée en compétences rapide : apprentissage de la comptabilité, de la vente ou du marketing, packaging d’une offre ou d’un produit mais également parfois entrée dans une formation longue et qualifiante.
 
« Après des années en entreprise, de plus en plus de seniors se tournent vers l’entreprenariat, un mode de travail qui répond à leurs aspirations professionnelles et permet de contourner les difficultés du marché de l’emploi particulièrement réelles pour eux. Mais ce projet doit être évalué et préparé avec prudence. Le maître mot, c’est la sécurisation du parcours professionnel. Il faut d’une part maîtriser le risque financier pour prémunir le candidat de la perte d’un patrimoine souvent acquis après de longues années de travail et d’épargne. D’autre part, il faut sécuriser le projet afin d’éviter l’échec et un retour sur le marché du travail deux ou trois ans plus tard. Bien entendu, ces précautions valent davantage pour un « jeune » senior, car plus on approche de la retraite, plus le risque s’affaiblit » précise Sylvain Genevelle, consultant chez Var Conseil RH.

Créer son entreprise après 50 ans : un senior témoigne

Stéphane Lecenes est un jeune senior. A 51 ans, le voilà de retour sur les bancs de l’école. Depuis septembre 2013, il suit à Paris une formation qualifiante dans les métiers du vin et du management. Entre visites de cépages et cours d’oenologie, M. Lecenes est un homme bien occupé. « Je n’ai pas une minute à moi », confie-t-il.
 
Du temps, il en aura encore moins lorsque son projet, l’ouverture d’une cave à vin, verra le jour. D’ici
la fin de l’année, espère-t-il. Si tout se passe comme prévu, il aura alors réussi d’une pierre deux coups : se reconvertir et trouver un travail. Ancien cadre dans l’industrie pharmaceutique, M. Lecenes bénéficie actuellement d’un congé de reclassement après que son poste a été supprimé l’été dernier, à la suite d’un plan social. Un tournant après 25 ans de carrière dans la même entreprise. « Je savais que ça allait m’arriver », se souvient-il.
 
Mais lorsque le couperet est tombé, il n’a « même pas cherché à [se] replacer sur le marché du travail ». Un choix surprenant à l’heure où la retraite est un horizon lointain? Principe de réalité, rétorque M. Lecenes : « je n’ai pas le Bac et je ne suis pas bilingue. Autrement j’aurais peut-être essayé de retrouver une activité salariée ». Reste qu’une autre explication est encore plus importante à ses yeux. « J’ai anticipé. Aujourd’hui, il faut préparer son avenir. Avoir cet état d’esprit est essentiel », résume-t-il.
 
Passionné par le vin, M. Lecenes avait déjà caressé l’idée d’en faire son métier. Le plan de départ volontaire lui a donné l’occasion de sauter le pas. Une décision rapide mais loin d’être irréfléchie. Au contraire. « Ma maison est payée, mes enfants sont grands, je n’ai pas de crédit et j’ai bénéficié des indemnités du PSE, détaille-t-il. Le risque financier n’est donc pas rédhibitoire. J’aurais agi différemment dans le cas contraire. Mais le plus important dans mon projet, c’était d’avoir l’accord et le soutien de mes proches ».
 
Une fois tous les signaux au vert, M. Lecenes entame sa formation. Sans transition, ce qui lui permet de « gérer au mieux la coupure avec la précédente vie ». En parallèle, il met à profit l’accompagnement que lui procure VAR Conseil RH pour avancer sur son projet professionnel. M. Lecenes juge un tel accompagnement « primordial ». « La motivation est le plus important. Mais être accompagné m’a aidé à connaître mes points forts et mes points faibles », estime-t-il.

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