Suisse : la situation économique des retraités se rapproche de celle des actifs

Une étude suisse très complète s'est penchée sur la situation économique de près de 1,5 million de personnes âgées de 25 à 99 ans en Suisse. Elle montre que le groupe des 55/75 ans est le mieux loti économiquement, qu’un tiers des personnes de 65 à 69 ans touche encore, outre les prestations de vieillesse, un revenu d'une activité professionnelle, mais qu’en revanche, certaines catégories de la population (familles ayant trois enfants ou plus, femmes élevant seules leurs enfants, jeunes invalides, etc.) sont exposés à un risque accru de pauvreté.


Ce rapport du professeur Philippe Wanner (Université de Genève), intitulée « La situation économique des actifs et des retraités », réalisée à la demande de l'Office fédéral des assurances sociales, a donc examiné la situation économique de près de 1,5 million de personnes entre 25 et 99 ans en Suisse durant l'année 2003. « C'est la première fois qu'une étude analyse un si grand nombre de données relatives à la fois au revenu et à la fortune. Par son ampleur et sa précision, elle constitue ainsi la plus importante analyse de ce type jamais réalisée ».

Résultat, l'étude confirme qu'en Suisse, globalement, les personnes à l'AVS (Assurance-vieillesse et survivants) jouissent d'une situation plutôt favorable par rapport au reste de la population. Peu d'entre eux sont touchés par la pauvreté, ce que l'on peut considérer comme un succès du système suisse des trois piliers (prévoyance, vieillesse, survivants et invalidité). Pour la première fois aussi, l'étude montre l'ampleur de l'activité lucrative au-delà de l'âge de la retraite : en effet, un tiers des personnes de 65 à 69 ans touche encore, outre les prestations de vieillesse, un revenu d'une activité professionnelle (environ 10.000 francs suisses par an, soit env. 6.300 euros). Une grande partie des rentiers disposent en plus de revenus provenant de leur fortune ; celle-ci atteint pour toutes les catégories d'âge son maximum peu après le passage à la retraite. Près d'un ménage de retraités sur cinq a une fortune brute supérieure au million de francs (630.000 euros).

Le risque de pauvreté se déplace et concerne donc principalement certains groupes d'actifs de moins de 50 ans. L'étude montre que ce sont surtout les familles avec trois enfants ou plus qui disposent de moyens financiers moins importants que la moyenne, de même que 40 % des femmes élevant seules leurs enfants et un quart de celles qui vivent seules. On ignore toutefois quelle proportion représentent celles qui peuvent compter sur l'apport financier de proches ou d'un partenaire, car cela ne ressort pas des données fiscales. Enfin, cette vaste étude a confirmé une fois de plus que, quel que soit leur âge, le revenu que les femmes tirent de leur activité lucrative est systématiquement inférieur à celui des hommes. .../...

Un quatrième groupe de la population devrait également attirer l'attention de la politique sociale : les bénéficiaires de rente d'invalidité âgés de moins de 40 ans. Il est vrai que les prestations complémentaires leur permettent généralement de ne pas vivre dans la pauvreté. Mais, contrairement aux familles nombreuses ou monoparentales qui connaissent une diminution de leur charge lorsque les enfants quittent le nid familial, ils n'ont que rarement la possibilité d'améliorer leur situation économique.

Pistes de réflexion pour la politique sociale

La nature ponctuelle des données ("photographie instantanée") analysées dans cette étude incite à la prudence. Ses résultats montrent cependant que les futures réformes visant à garantir l'équilibre financier à long terme de l'AVS devront prendre en compte non seulement l'évolution démographique, mais aussi ses effets sur la répartition des ressources entre les générations.

Une mise à contribution des seuls actifs au profit de l'ensemble des rentiers pourrait aboutir à faire aussi supporter la charge financière à des groupes aux ressources plus faibles. "Une contribution de solidarité versée par les personnes à la retraite permettrait de tenir compte de cette évolution. Cette contribution reste à définir plus précisément" remarque l'auteur de ce rapport. Enfin, les résultats incitent également à réfléchir, dans le cadre de ces réformes, aux conséquences d'un réaménagement de l'échelonnement des bonifications de vieillesse en fonction de l'âge dans le 2e pilier.

Et le communiqué de conclure que L'AVS restera financée principalement par les cotisations des actifs. Pour que les familles avec enfants, les familles monoparentales ainsi que les femmes vivant seules puissent aussi y contribuer, il est indispensable qu'elles puissent accroître leur revenu. Encore faut-il que les structures d'accueil parascolaire ou préscolaire répondent davantage aux besoins des parents et que la fiscalité ne soit pas un boulet.

Publié le 16/04/2008 à 10:14 | Lu 6973 fois