Semaine nationale de la continence urinaire du 14 au 20 mars 2011

Les fuites d’urine -ou l’incontinence urinaire- concernent directement plus de 2,6 millions de personnes de plus de 65 ans en France (en particulier 60% des personnes âgées en institution et 90% des patients atteints de démence sénile). Ce problème touche toutes les familles, même s’il est parfois difficile d’en parler. Pour faire évoluer les mentalités, pendant une semaine, l'Association française d'urologie (AFU) organise du 14 au 20 mars 2011 la « Semaine de la continence urinaire ».


L’élimination des urines (miction) est une fonction essentielle à notre santé, qui met en jeu des phénomènes complexes, aussi bien au niveau de l’anatomie locale que des structures neurologiques.

L’équilibre de la continence repose sur une mécanique locale (équilibre de la pression des sphincters, de la vessie, du périnée), mais aussi sur le bon fonctionnement du système nerveux central (équilibre des systèmes nerveux sympathique et parasympathique, sécrétion de l’hormone antidiurétique commandée par l’hypophyse).

Lorsque tout va bien, la miction est contrôlée et la continence est garantie. Mais lorsque le fonctionnement de l’une de ces structures est altéré, des fuites d’urines peuvent apparaître. Avec l’âge, le vieillissement des tissus et du système nerveux est un facteur d’entrée dans l’incontinence : la perte de tonicité des fibres musculaires affaiblit le sphincter strié (sous la commande volontaire) augmentant le risque de fuites ; par ailleurs, les mictions se multiplient et l’impériosité pèse parfois comme une gêne quotidienne.

Ainsi, chez tous, hommes et femmes, plus l’âge avance, plus la continence est menacée, la femme étant concernée plus tôt et plus souvent par l’incontinence pour des raisons morphologiques (poids de l’appareil génital sur les muscles périnéaux). On estime ainsi que les fuites d’urine ou l’incontinence concernent plus de 2,6 millions de personnes de plus de 65 ans, en France.

Chez ces personnes, l’incontinence retentit lourdement sur la qualité de vie et entraîne fréquemment le recours à des stratégies d’évitement qui nuisent à la vie sociale, comme le renoncement à des sorties trop longues (promenades, visites de musée, cinéma, théâtre) de peur de s’éloigner des toilettes, à des situations jugées à risque, comme la piscine qui stimule les envies impérieuses.

Cependant, nombre de personnes concernées par l’incontinence urinaire ne consultent pas, pour des raisons différentes en fonction de l’âge et des circonstances :

- Par pudeur : parce qu‘il est parfois plus facile pour une femme active de 65 ans d’avoir recours à des solutions palliatives (protections) plutôt que de heurter sa pudeur en allant consulter. Parce qu’il est aussi difficile de se voir vieillir.

- Par fatalisme : chez les hommes qui considèrent comme inévitable le vieillissement de leur prostate et les symptômes consécutifs (difficulté à uriner, gouttes retardataires).

- Parce que, chez les plus âgés, l’incontinence peut aussi être vécue comme une fatalité, liée au vieillissement.

Or, en l’absence d’une consultation et d’une prise en charge adaptée, les troubles ne peuvent qu’empirer jusqu’à conduire à une désocialisation résignée, à un mal-être qui retentit sur l’individu.

Les urologues de l’AFU ont souhaité dédier cette nouvelle Semaine Nationale de la Continence Urinaire à la prise en charge de la personne âgée pour…

- inviter les patients et leur famille à s’informer et à engager le dialogue avec le médecin traitant,
- car il existe des solutions efficaces et adaptées à chaque cas.

Plus que l’incontinence du sujet jeune, l’incontinence de la personne âgée nécessite une prise en charge globale, avec une attention particulière accordée à différents facteurs :

- L’environnement : aménagement du domicile, habitudes alimentaires, vie sociale.

- Les comorbidités : les individus de plus de 64 ans souffriraient, en moyenne, de plus de 7 affections, selon l‘enquête Santé Protection Sociale (SPS) de 2002. Certaines pathologies peuvent participer au développement de l’incontinence. Et l’on estime que la présence de 3 pathologies associées augmente de près de 100 % le risque d’incontinence.

- Les traitements de ces pathologies : le traitement de certaines pathologies (maladie de Parkinson, dépression) peuvent contribuer à déstabiliser la continence. L’identification de ces facteurs de risque est essentielle à la prise en charge.

- Les polymédicamentations : le traitement de plusieurs pathologies conduit souvent à l’accumulation de médicaments, dont la combinaison augmente les risques de iatrogénie (effets indésirables). Les effets indésirables des traitements concernent particulièrement la personne âgée, chez qui ils sont responsables de 15 % des hospitalisations après 65 ans. Avant tout traitement, il convient de faire le point avec le malade pour définir des priorités afin d’éviter la multiplication des prescriptions.

- Les modifications du métabolisme : l’altération du fonctionnement du foie ou des reins, la prise simultanée de plusieurs traitements peuvent modifier la façon dont l’organisme métabolise les médicaments. La prise en charge de l’incontinence doit tenir compte de ces données individuelles et donner lieu à des prescriptions adaptées (souvent moindres que pour l’adulte d’âge moyen).

L’ensemble de ces facteurs est au coeur des préoccupations des médecins généralistes, gériatres, médecins réadaptateurs, urologues qui agissent en synergie dans la prise en charge de l’incontinence de la personne âgée.
Semaine nationale de la continence urinaire du 14 au 20 mars 2011

Les traitements urologiques

Les traitements urologiques interviennent en complément de l’adaptation de l’environnement du patient.

La personne âgée peut bénéficier des mêmes traitements que le sujet plus jeune (rééducation, traitement édicamenteux, chirurgie), sous réserve que son état général le permette.

La rééducation périnéale

Chez la personne âgée, on propose la rééducation aux patients motivés dont les fonctions cognitives ne sont pas altérées. Traitement de première intention dans les incontinences d’effort, la rééducation est aussi intéressante en cas d’impériosité ou dans le traitement des incontinences mixtes.

En effet, elle vise à renforcer le plancher des muscles du périnée (périnée et sphincter strié), ce qui permet : d’éviter les fuites liées au déséquilibre entre pression abdominale et pression périnéale ; de mieux résister aux envies pressantes liées aux contractions de la vessie.

En cas d’impériosité, elle permet aussi d’apprendre à détendre le muscle vésical. Pour cela, la rééducation périnéale exploite un réflexe. Lorsque l’on contracte le périnée, un signal nerveux est envoyé au niveau de la moelle lombaire : l’information est répercutée sur la vessie sous la forme d’un message en faveur de la décontraction du détrusor. Si l’on apprend à prendre conscience de la contraction périnéale et à l’utiliser efficacement, on parvient à mieux gérer l’incontinence par impériosité.

Les traitements médicamenteux

Tout d’abord, chez les seniors présentant plusieurs pathologies et suivant déjà de nombreux traitements, il est important de faire un bilan des priorités thérapeutiques afin d’éviter les polymédicamentations excessives.

Les anticholinergiques : les médicaments anticholinergiques agissent sur la contraction du muscle de la vessie. Ils sont le traitement de première intention des impériosités, avec ou sans incontinence. C’est la gêne qui dicte le début du traitement. En France, quatre molécules disposent d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) : l’oxybutinine (à utiliser avec précaution chez la personne âgée) ; le chlorhydrate de trospium ; la solifénacine et la toltérodine. Leur prescription se fait à dose progressive, avec une surveillance étroite durant les premiers jours du traitement.

Les alpha-bloquants (chez les hommes souffrant d’une hypertrophie bénigne de la prostate) : les alpha-bloquants agissent sur le tonus musculaire et s’attaquent aux contractions responsables de 60 % de l’obstacle urinaire.

Les traitements hormonaux locaux (chez la femme) : en utilisation locale, les traitements hormonaux sont utilisés pour traiter l’atrophie vulvaire et urétrale.

Les traitements chirurgicaux

Les traitements chirurgicaux de l’incontinence urinaire peuvent être utilisés chez la personne âgée dont l’état général le permet. Il faut cependant garder à l’esprit que leurs résultats dépendent grandement de la qualité des tissus (bien souvent affectée par le vieillissement). Là encore, on procédera au cas par cas, en pesant le rapport bénéfice-risque de l’intervention. Outre les interventions spécifiques liées à la prise en charge de pathologies déclenchantes (prolapsus chez la femme, hypertrophie bénigne de la prostate chez l’homme), les traitements chirurgicaux sont, a priori, les mêmes que pour l’adulte jeune.

La chirurgie dans l’hyperactivité vésicale :
Pour remédier à une pollakiurie ou à l’hyperactivité vésicale et à la dysynergie vésicosphinctérienne observées dans certaines lésions médullaires ou maladies nerveuses, on peut parfois intervenir de deux façons :
- par l’injection de toxine botulique,
- en implantant un neuromodulateur qui permet de corriger certains troubles liés à l’hyperactivité vésicale et à l’incontinence fécale, c’est-à-dire …
- l’urgence (besoin soudain et impérieux) qui raccourcit le délai de sécurité séparant l’envie de la fuite ou de la perte involontaire des selles ;
- la présence de pertes incontrôlées lors d’un besoin urgent ;
- l’augmentation de la fréquence des mictions dans le cadre de l’incontinence urinaire.

La chirurgie dans l’incontinence urinaire d’effort :
Elle est envisagée lorsque la rééducation a échoué, quand l’état général du patient le permet et dans le respect des indications (incontinence urinaire d’effort et hypermobilité urétrale).

Le traitement repose sur la mise en place de bandelettes sous-urétrales.
La bandelette sans tension fonctionne comme un support de l’urètre pendant l’effort, empêchant ainsi le relâchement à l’origine de la fuite urinaire. Son implantation chirurgicale est mini-invasive et comporte peu de complications opératoires et postopératoires.

Les autres traitements chirurgicaux :

Les ballons ajustables : Les ballons ajustables ont pour objectif de comprimer l’urètre dans la région péricervicale (autour du col de la vessie).
Ils pourraient être proposés : aux femmes souffrant d’incontinence urinaire à l’effort, lorsque les traitements de première ligne ont échoué ; aux hommes qui souffrent d’une incontinence urinaire persistante consécutive à une prostatectomie.

L’intervention mini-invasive se déroule sous anesthésie locale. Les ballons ajustables sont mis en place par voie périnéale ou vaginale. En fonction du degré de continence du patient, la taille du ballon est ajustable, par une ponction percutanée d'un ou de deux des ports implantables. Lire l’avis de la HAS

Les sphincters artificiels :
Le sphincter urinaire artificiel (SUA) est proposé en cas d’incontinence urinaire sévère d’origine sphinctérienne, notamment : aux femmes avec une incontinence urinaire d’effort (IUE) sévère, par insuffisance sphinctérienne majeure ; aux hommes ayant une incontinence sévère par insuffisance sphinctérienne consécutive à une intervention chirurgicale prostatique. L’intervention n’est pratiquée qu’en dernier recours, en cas d’échec de la rééducation ou d’autres alternatives thérapeutiques. Elle se déroule sous anesthésie générale. Le principe du SUA consiste à remplacer les fonctions déficientes d’ouverture et de fermeture du sphincter.

Les palliatifs

Couches, étuis péniens (pour les hommes), voire sonde, il convient de ne les utiliser qu’en dernier recours car ils sont un facteur d’incontinence et retentissent sur la qualité de vie, notamment en favorisant le renoncement à la continence et l’évolution vers la dépendance. Les étuis péniens (collecteurs d’urine réalisés sur mesure) sont à privilégier chez l’homme. Les sondes doivent être évitées autant que possible.

Publié le 14/03/2011 à 12:49 | Lu 3193 fois