Remember me : entretien avec l'actrice Caroline Silhol

Le dernier film de Martin Rosete, Remember me, avec Bruce Dern et Caroline Silhol, sort sur les écrans le 9 septembre dernier. L’histoire ? Celle d’un septuagénaire qui apprend que l’amour de sa vie vient d’être admise dans une maison spécialisée dans le traitement d’Alzheimer. Entretien avec l’actrice principale.


Qu’est-ce qui vous a attirée dans ce projet ?
Il vient de très loin, de l’autre côté de l’Atlantique. Mon fils était ami avec un producteur américain qui lui a fait lire ce script, il cherchait une actrice européenne pour jouer le rôle et quand mon fils l’a lu, il a dit : « Mais c’est pour ma mère ! ». Il en a parlé au réalisateur et tout est parti de là.
 
Sur le scénario
J’ai eu la chair de poule en lisant le script. C’est essentiel. Notre mission principale dans ce métier n’est-elle pas d’émouvoir soit par le rire, soit par les pleurs, soit par les idées qu’on véhicule ? Si on n’est pas ému en regardant un film, en lisant un livre, en allant au théâtre, on a raté notre affaire. Et la chair de poule était un bon début !
 
Sur votre personnage
…Il y a autant de démences différentes que de personnes atteintes de cette maladie. Donc on peut faire travailler son imagination et c’est ce qui m’a plu. J’aime bien les personnages qui n’ont pas de références.
 
D’autre part provoquer un amour aussi fou quand on n’est plus dans sa première jeunesse est plutôt gratifiant. Et pour la théâtreuse que je suis, il me parait logique de retrouver la mémoire grâce à Shakespeare.
 
Comment vous êtes-vous préparée pour ce rôle ?
J’avais déjà joué au théâtre une femme atteinte de démence dans une pièce américaine magnifique. Tous les rôles se construisent par petites touches picturales. Au cours de la journée, tout ce qui peut vous provoquer une idée, une sensation finit par créer les strates du personnage.

Quand je dis la journée, c’est surtout la nuit parce que je ne dors pas beaucoup. Cela dit, jouer Shakespeare dans le texte nécessite un vrai travail d’apprentissage… Pas facile de respecter l’accentuation dans les pentamètres iambiques.
 
Est-ce difficile de travailler dans un pays étranger ?
Jouer dans une langue étrangère vous donne une vraie liberté. Jouer dans sa langue maternelle, ce qui est le plus courant et le plus classique, vous ramène à des interdits, inconsciemment, des semelles de plomb venant de l’enfance, du pays natal… J’avais déjà remarqué cela en jouant dans d’autres langues. Une vraie sensation de légèreté.
 
Quelle est votre relation avec Martín Rosete ?
J’aime son calme, j’aime sa précision dans ses directives et en même temps le fait qu’il soit à l’écoute des propositions. Je me sens très à l’aise avec lui, et en même temps je reste un peu en dehors de tout ce qui se passe sur le plateau puisque le personnage est comme ça, absente au monde.
 
Je demande à Martín de m’inspirer, de mettre le feu sous la cocotte-minute. Mais je ne cherche pas une amitié. C’est très professionnel entre lui et moi. Mais aussi très chaleureux. C’est quelqu’un d’extrêmement chaleureux.
 
Que pensez-vous de Bruce Dern ?
C’est impressionnant quelqu’un qui a une filmographie comme la sienne ! Il est délicieux. Il est absolument délicieux, il me dit des choses très gentilles et amusantes, et moi ça me rassure, ça me fait du bien.
 
Et puis c’est enrichissant de tourner avec lui parce qu’il aime improviser, il ne veut pas répéter. J’aime bien répéter mais j’aime surtout découvrir des sensations nouvelles, donc je suis ravie.
Et puis il a un œil qui vous transperce. Son œil bleu est quand même magnifique. Et ses anecdotes ! Ça valait le voyage !
 
Sur l’amour à différentes étapes de la vie
C’est insupportable de vieillir ! Même si on vous serine le contraire dans les bonnes feuilles. Le corps change et le cœur, lui, ne vieillit pas ! On est toujours aussi « bouleversifiable ». Peut-être plus enclin à la tendresse, pas seulement dans l’amour. Je crois que ce qui devient essentiel, c’est la capacité à l’intimité.

Patrice Chéreau avait fait un film magnifique qui s’appelait Intimacy et c’est vrai qu’être capable d’intimité véritable avec quelqu’un, capable de se taire sans s’ennuyer, ne plus chercher à prouver… Ô mon amour, mon doux, mon tendre, mon merveilleux amour…
 
Qu’est-ce qui rend ce film unique ?
C’est une histoire d’amour unique. C’est fou qu’un homme ait gardé pendant toutes ces années dans sa tête, dans son âme, dans son corps, dans son cœur, un amour tel pour cette femme qu’il décide de se faire passer pour atteint d’Alzheimer dans le seul but de lui faire retrouver la mémoire et par suite l’amour qu’elle avait pour lui. Et il y arrive !
 
L’histoire :
Claude est septuagénaire, veuf et critique de cinéma et théâtre. Il apprend que l’amour de sa vie, Lily, célèbre actrice française, a été admise dans une maison spécialisée dans le traitement d’Alzheimer en Californie. Il ne l’a pas vue depuis 30 ans. Avec la complicité de son vieil ami Shane il se fait admettre dans le même service que Lily. Il a conçu le projet fou de lui faire retrouver la mémoire grâce à sa présence, son amour intact et leurs souvenirs.


Publié le 10/09/2020 à 01:00 | Lu 2106 fois





Dans la même rubrique
< >