Réduire la teneur en sel des aliments grâce à l'utilisation des arômes (INRA)

Une alimentation trop salée participe au développement des maladies cardiovasculaires. C'est pourquoi la réduction de la teneur en sel des aliments est devenue un enjeu majeur pour les industriels de l'alimentaire. Mais comment y parvenir sans nuire à la qualité sensorielle du produit ? A l'Inra de Dijon, les chercheurs ont montré que certains arômes évoquant des goûts salés pouvaient rehausser la perception d'une saveur salée. Derrière ce phénomène se cache un mécanisme de compensation entre les différents sens, l'odorat et le goût. A terme, ce procédé pourrait permettre de réduire la teneur en graisse et en sucre des aliments. Explications.


En agroalimentaire, le sel est un ingrédient clé, largement impliqué dans la structuration des produits et garant d'une sécurité microbiologique satisfaisante. Il joue également un rôle fondamental dans l'appréciation des aliments par le consommateur.

Cependant, consommé de façon excessive, le sel est un facteur de développement des maladies cardiovasculaires. Les autorités sanitaires telles que l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) se sont prononcées en faveur d'une réduction de sa teneur dans les aliments pour atteindre une consommation de 5 g/jour, en accord avec les recommandations nutritionnelles.

Cette réduction a des conséquences sur la perception de l'aliment par le consommateur. Ainsi plusieurs études ont montré qu'une teneur moins élevée en sel se traduit systématiquement par un produit moins bien apprécié.

Lorsqu'un aliment est ingéré, une multitude de signaux sensoriels (arômes et saveurs notamment) sont perçus au niveau de la langue et du nez, et intégrés simultanément. Les arômes perçus, au même titre que les odeurs imaginées, participent donc à la perception du goût. Partant de ce constat, les chercheurs ont eu l'idée de renforcer la perception de la saveur salée des aliments en utilisant des arômes évoquant des « goûts salés ».

Après avoir établi une liste d'arômes candidats, les scientifiques ont vérifié que leur simple évocation par le nom était bien associée à un goût salé dans l'esprit des consommateurs (sardine, bacon, anchois, cacahuète, Comté, jambon, poulet, sauce soja...). Au final, quatorze arômes commerciaux -ceux dont les noms évoquaient le plus des produits salés- ont été retenus.

Cinquante-neuf consommateurs sont ensuite venus au laboratoire de Dijon pour goûter différentes solutions aromatiques contenant une faible quantité de sel. Selon le communiqué de l’INRA, les résultats obtenus montrent que certains arômes possèdent une dimension « salée » alors que d'autres non. En particulier ceux qui évoquent de prime abord le plus la saveur salée -anchois et bacon- sont ceux qui l'imitent le mieux.

De plus, lorsque le consommateur s'attend à ressentir une sensation « salée », la perception de la teneur en sel de la solution proposée est accrue, même lorsqu'il s'agit de très faibles quantités de sel. Cette saveur salée peut donc être provoquée simplement en l'imaginant à l'avance. Le phénomène perceptif à la base de ce renforcement repose sur l'intégration au niveau du cerveau des signaux sensoriels gustatifs, olfactifs et de la mémoire associative en une représentation combinée appelée « Flaveur ».

Actuellement, les recherches se poursuivent pour évaluer « l'impact renforçateur durable » des arômes sur la saveur salée dans des modèles alimentaires plus complexes et des aliments réels. A terme, les chercheurs pourraient étendre l'utilisation de ce mécanisme de compensation intersensorielle mis en évidence dans cette étude à d'autres composés sensoriels (sucre, matière grasse) dont la teneur dans les aliments devrait être réduite…

Publié le 20/10/2010 à 11:42 | Lu 3568 fois