Prise en charge des ainés : un système encore trop peu lisible

Un effort public en hausse constante : en 2017, les dépenses pour la prise en charge des personnes âgées ont représenté 11 Md€ pour l’assurance maladie et 7,3 Md€ pour les départements, en hausse respectivement de 47% et de 18% depuis le début des années 2000.


Si la part de la richesse nationale consacrée à cette problématique a crû nettement, elle a essentiellement concerné l’accueil en établissement (87% des nouveaux financements de l’assurance maladie et 75% de ceux des départements). Côté domicile, la loi d’adaptation de la société au vieillissement (ASV) de 2015 a toutefois permis une croissance de la dépense d’allocation personnalisée d’autonomie (APA) de + 6,5% entre 2008 et 2015.
 
De nombreuses initiatives du secteur témoignent de sa capacité à innover : le secteur développe une pluralité de projets innovants comme la création d’Ehpad hors les murs, la mise en place de plateformes de services sur les territoires, le développement de labels de qualité ou encore la création de maisons des ainés et des aidants. Mais force est de constater que la connaissance et la diffusion des innovations dans le secteur médico-social est très faible et pas à la hauteur de son indispensable modernisation.
 
En établissement, l’offre demeure hétérogène. Avec 21 % des personnes de plus de 85 ans vivant en établissement en 2011, la France fait partie des pays européens ayant un taux d’institutionnalisation élevé.
La qualité de l’offre incluant le soin, l’aide, l’alimentation, l’animation est perçue comme très hétérogène.
 
Les disparités sont également fortes quant à la qualité des locaux. Selon la DREES, en 2015, la construction ou la dernière rénovation des bâtiments des Ehpad dataient de plus de 25 ans dans 23% des cas.
 
À domicile, l’offre est nombreuse, atomisée et économiquement fragile. Pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) habilités à l’aide sociale qui représentent 75% de l’offre, les tarifs pratiqués sont parfois inférieurs aux coûts de revient. De plus, l’offre est atomisée avec 7 000 services d’aide et d’accompagnement à domicile caractérisés par des statuts juridiques différents.
 
Les disparités territoriales sont fortes tant sur l’offre que sur le montant des prestations. Selon les régions, les taux d’équipement sont compris entre 52 et 198 places pour 1.000 personnes âgées. Concernant l’attribution de l’APA, les différences entre départements portent sur les critères d’éligibilité, l’évaluation des besoins, les règles de tarification, les montants moyens par bénéficiaire pouvant varier du simple au double.
 
Des prestations peu lisibles pour les bénéficiaires. La prise en charge de la perte d’autonomie fait intervenir une multiplicité de financeurs (assurance maladie, Conseils départementaux, État etc.), pour des dépenses de natures différentes (soins, dépendance, hébergement, etc.) et des opérateurs aux statuts divers. Cette situation engendre une perception faible de la dimension de l’effort public réel.
 
Des réponses professionnelles trop cloisonnées et peu coordonnées. Que ce soit dans les champs sanitaires et sociaux, les organisations administratives, les établissements et les acteurs de ville ont fait évoluer leurs réponses aux besoins des personnes âgées. Si cet engagement est une richesse, ces réponses ont presque toujours été faites en silos, sans réelle coordination.
 
Un pilotage local de la politique du grand âge particulièrement complexe. Cette complexité découle de l’intervention conjointe du Conseil départemental, chef de file de l’action sociale, et des Agences régionales de santé (ARS) compétentes pour l’organisation du système de santé. Elle est également sous-tendue par la combinaison d’une logique de droits univer-sels portés au niveau national et d’une logique d’aide organisée localement.
 
Un débat parlementaire peu organisé. Celui-ci est largement structuré par les lois financières (loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale) qui concernent peu le secteur. Des approches dédiées sont réalisées dans le cadre de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) et des actions de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Cependant, il n’existe pas de vision annuelle, intégrée et complète de l’effort public.
 
Une connaissance statistique et une recherche insuffisamment développées. Si l’on note un accroissement récent du nombre de publications, notamment de la DREES, la connaissance statistique demeure limitée. La collecte des données est longue, coûteuse et complexe du fait de la diversité des acteurs. De fait, les moyens d’évaluation de la politique publique sont aujourd’hui insuffisants et dispersés entre plusieurs financeurs.

Publié le 02/04/2019 à 01:00 | Lu 1854 fois





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