Partir trop tôt ou jamais ? Chronique de Nancy Cattan

La France, pays des paradoxes. Que dire en effet d’un pays capable d’afficher dans le même temps une des espérances de vie à la naissance les plus élevées du monde (84,4 ans pour les femmes, 77,5 ans pour les hommes) et un taux de décès prématurés (avant 65 ans) parmi les plus importants d’Europe (20% de l’ensemble des décès).





Le défi qui nous semble posé, au regard de ces chiffres, c’est de parvenir à franchir le cap fatidique des 65 ans. Tous les espoirs seraient ensuite permis de profiter sereinement des longues années de vie que les statistiques augurent aux heureux rescapés.

Les politiques, qui utilisent volontiers ces données, pour « vanter » la performance de notre système de santé, ne devraient pas oublier de remercier les grands vieillards d’être toujours là.
En effet, leur présence permet d’atténuer le poids de l’absence de tous ceux partis trop tôt. Sans, eux, nous serions probablement en queue de peloton de la classe européenne en matière d’espérance de vie.

Mais, au-delà des chiffres, que conclure de ce nouveau paradoxe français ?

Que nous sommes décidemment très mauvais en matière de prévention. Pour ce qui concerne la qualité et l’accès aux soins, pas de soucis. La France est même capable de faire vivre ses malades très longtemps, bien plus longtemps que la plupart des autres pays européens. Elle semble même prendre un plaisir, quasi machiavélique, à donner plus d’années à ceux qui n’en demandent peut-être pas tant !

Ainsi, si le taux de décès par cancer chez les hommes est l’un des plus élevés d’Europe, le temps de survie avec la maladie est aussi le plus long. En bref, on n’empêche pas les gens de tomber malades, mais on se tient prêt à les accueillir dans les établissements de soins et leur administrer des soins très coûteux capables de prolonger la vie de quelques mois.

Ce n’est finalement pas bien surprenant que les dépenses de santé soient aussi élevées dans ce pays !

Alors, que penser des seniors qui ont franchi victorieux la ligne des 65 ans ? Qu’ils le doivent avant tout… à eux-mêmes. Et que l’on a tort de ne pas les interroger sur le mode de vie qui leur a permis ainsi d’éviter de « mauvaises rencontres » prématurées.

Décidemment, on n’exploite vraiment pas assez la vieillesse.
Partir trop tôt ou jamais ? Chronique de Nancy Cattan

Partir trop tôt ou jamais ? Chronique de Nancy Cattan
par Nancy Cattan, journaliste santé

Article publié le 24/06/2009 à 10:43 | Lu 2382 fois