Médecine thermale et prise en charge des douleurs chroniques

A l’occasion du symposium santé qui se tient actuellement à Issy-les-Moulineaux (92) près de Paris, les professeurs Patrice Queneau et Christian-François Roques sont revenus en détail sur la « Prise en charge des douleurs chroniques en médecine thermale ». Une mise au point scientifique -et un peu technique- qui permet de mieux comprendre l'intéret des cures thermales.



De nos jours, il faut savoir que la douleur chronique reste le motif du plus grand nombre de cures thermales car la douleur est le symptôme le mieux soulagé par cette technique. Les douleurs des affections musculo-squelettiques, de certaines maladies neurologiques chroniques, d’origine vasculaire et viscérale sont ainsi concernées.
 
Techniques de prise en charge des douloureux en médecine thermale
D'une manière générale, les techniques hydrothermales de balnéation, de thermothérapie, de mobilisation, d’exercice sont utilisées dans les affections musculo-squelettiques et neurologiques.
 
De fait, la vasodilatation produite par le C02 se combine aux effets de l’exercice physique pour améliorer le débit du sang dans le réseau artériel et faire reculer les seuils de survenue des douleurs de gêne, puis de claudication qui impose l’arrêt de la marche ; on observe ainsi un accroissement du périmètre de marche comme du périmètre de gêne.
 
Dans l’insuffisance veineuse, les bains froids et l’augmentation de pression, complétés par l’action de l’exercice, améliorent le flux de retour veineux et diminuent la gêne perçue au niveau des membres inférieurs.
 
Dans les affections viscérales les modalités thérapeutiques sont plus variables : cure de boisson et cure externe (bains, massages, douches) dans la dyspepsie gastrique par exemple. Ces éléments peuvent être associés à une cure interne dans les affections du colon et les troubles gynécologiques.
 
Le prurit constitue quant à lui, une forme de douleurs dermatologique ; il est particulièrement important dans les suites de brûlures et les dermatoses allergiques ; dans ce cas précis, ce sont essentiellement des soins externes qui sont utilisés comme les bains, les douches, les pulvérisations, les massages…
 
Il faut également mentionner que les soins hydrothermaux peuvent, et, souvent, doivent être associés à des mesures complémentaires telles que des techniques rééducatives, des actions éducatives ou encore un soutien psychologique.
 
Dans tous les cas la douleur doit être évaluée dans sa localisation, son intensité, son expression, son soulagement, son retentissement sur la fonction, la qualité de vie, l’humeur, …
 
Preuves scientifiques
Dans les troubles musculo-squelettiques, les fameux TMS, de nombreuses études scientifiques confirment l’action analgésique de la médecine thermale dans les affections articulaires, les rachialgies chroniques, la fibromyalgie, les atteintes péri-articulaires ou encore les rhumatismes inflammatoires.
 
On a pu observer dans ces études, que le traitement thermal améliorait constamment les patients et l’on pouvait voir que le supplément d’efficacité apporté par cette technique de soin était, dans tous les cas de figure, "marqué". Les douleurs neurologiques chroniques des suites d’AVC et de la sclérose en plaques sont aussi améliorées.
 
Les douleurs des membres inférieurs de l’insuffisance veineuse chronique et des artérites chroniques sont elles aussi, améliorées par la cure thermale. Les douleurs épigastriques de la dyspepsie gastrique et les douleurs coliques du syndrome du côlon irritable peuvent bénéficier de ce type de traitement. 

Les douleurs pelviennes des suites d’endométrites, de syndrome myofascial des muscles pelviens sont aussi améliorées par le traitement thermal. De  même que le prurit de la dermatite atopique est mieux soulagé par la cure que par les applications de crèmes à base de cortisone.
 
Une enquête portant sur plus de 112.000 curistes (réalisée en 2006 par TNS-SOFRES-Healthcare) a montré que le soulagement de la douleur durait au moins six mois chez les curistes atteints de douleurs physiques chroniques. Les études ont aussi permis d’observer des améliorations persistantes de la douleur au 9ème mois pour l’arthrose du genou, un an pour l’insuffisance veineuse et l’artérite.
 
Ceci explique que près de la moitié des curistes sondés (46%) dans le cadre de cette enquête aient jugé la cure thermale plus efficace et 49% aussi efficace que les médicaments pour soulager leurs douleurs.
Le recours aux produits hydrominéraux à base de boues thermales par rapport à des produits comparables ajoute également un supplément d’efficacité en termes de durée de l’effet et de magnitude du soulagement ceci a pu être observé pour les bains en eau minérale naturelle dans la lombalgie chronique et l’arthrose du genou et pour les boues hydrothermales dans l’arthrose du genou.
 
Enfin, les patients déclarent volontiers un besoin moindre de consultations médicales et de médicaments après la réalisation d’une cure thermale. Mais les résultats des études sont plus nuancés.
Cependant, il est difficile de bien noter les médicaments utilisés et de faire la pondération entre les antiinflammatoires et le paracétamol car il n’existe pas de données d’équivalence analgésique entre ces divers types de substances.

Publié le 09/10/2018 à 05:12 | Lu 3774 fois