Le vieillissement, du côté des Antilles, chronique de Serge Guérin

Début octobre 2008, se sont tenues en Martinique, les 18emes Rencontres de gérontologie des Caraïbes. Initiative formidable que l’on doit depuis 18 ans à l’Amdor, une structure fondée par Frantz Remy et le Docteur Michel Yoyo qui a permis à la Martinique de penser et prendre conscience du vieillissement.


L’originalité de cette structure tient à la diversité de son action, qui va de l’animation et l’information auprès des seniors et des très âgés, au développement d’une offre très vaste de formation pour tous les niveaux d’intervenants.

Surtout, cette structure, pionnière de ce point de vue, a toujours affirmé la volonté de faire la promotion de l’âge d’or pour reprendre la formule de Frantz Remy. A l’époque, nul doute qu’il a du être regardé comme un original sans avenir !

Par ailleurs, l’Amdor, en organisant ces rencontres annuelles, permet aux professionnels, aux personnes âgées et à de multiples acteurs, qu’ils soient politiques, chercheurs ou médecins, d’échanger, de confronter des regards différents et d’apprendre les uns des autres.

En participant à cette journée, il me revenait d’ailleurs la jolie formule de Senghor sur la table de donner et du recevoir. Rien ne remplace les échanges et la confrontation au réel. Au cours de ces Rencontres gérontologiques de 2008, le docteur Patrice Cloos, a fait état d’une enquête qu’il a mené dans l’ensemble des pays de la Caraïbe anglophone. J’ai pu découvrir que finalement, les attentes des seniors dans les Antilles anglophone ou francophone étaient très proches… et ressemblaient aux attentes des seniors de l’hexagone. D’ailleurs dans l’assistance, bien des personnes se sont reconnues quand j’ai présenté ma propre typologie…

Certes, le contexte change et il serait indélicat, et même imbécile, de ne pas souligner combien certains pays de la Caraïbe sont dans un état de dénuement et de misère mais justement, il est d’autant plus important de parler de l’exigence de dignité pour les personnes âgées de là-bas.

Le professeur d’économie Jean Crusol a montré aussi le lien qu’il est possible de faire entre état du développement et situation des plus âgés. Sans surprise, le lien est très puissant… Il était aussi intéressant d’entendre le ministre de la Santé et du bien –être (jolie formule pour un ministère !) de Sainte-Lucien expliquer, à la fois la priorité donné à la prévention et la difficulté pour un petit pays de mobiliser des moyens importants pour tenir une politique en faveur des plus âgés. D’ailleurs, Liliane Bauras, Présidente de la commission des affaires sociales du Conseil Général de la Martinique, comme en écho, a présenté le schéma gérontologique et l’importance de l’investissement pour une collectivité.

La Martinique compte près de 18% de plus de 65 ans et se prépare à ce que la proportion passe à 25%. En attendant, il faut déjà mobiliser chaque année 73 millions d’euros… Mais des rencontres gérontologiques en terre des Antilles, ne peuvent pas passer à côté d’une certaine poésie et de nombreuses références à une culture tout autant singulière qu’hybride. Le Professeur Othoniel, Michel Yoyo médecin, mais surtout anthropologue et le psychanalyste Liborel-Pochot ont ouvert des perspectives originales et fécondes pour qui laisse son esprit partir dans les chemins de l’imaginaire.

Parler des vieux, c’est bien une belle question d’avenir !

Serge Guérin
Professeur à l’ESG
Vient de publier Vive les vieux !, Editions Michalon
Le vieillissement, du côté des Antilles, chronique de Serge Guérin

Publié le 06/10/2008 à 10:02 | Lu 5253 fois