Le lien intergénérationnel et la maladie d’Alzheimer…

En France, en 2008, près d’un million de personnes seraient atteintes par la maladie d’Alzheimer ou par une maladie apparentée. Parce que les familles sont leur principal soutien, l’association France Alzheimer a choisi de mettre l’accent cette année sur le lien intergénérationnel à l’occasion de cette journée mondiale qui se tiendra le 21 septembre prochain...


Alzheimer bouleverse l’équilibre au sein d’une famille et, quel que soit l’âge de ses membres, la maladie pèse sur les relations intra-familiales. Elle désorganise le rôle de chacun et inverse le cours de la filiation. En outre, elle isole les malades et leurs aidants.

Les petits-enfants peuvent se sentir exclus du binôme qui se forme entre leur grand-parent malade et leur parent lorsque ce dernier est l’aidant principal. Ils sont aussi souvent mis à l’écart par leur parent cherchant à leur épargner des situations délicates ou des expériences douloureuses.

Les enfants peuvent alors être tentés de taire leur questions, voire leur peine, s’ils sentent que leurs parents ne sont pas disposés à évoquer la maladie. Les adultes peuvent donc conclure de manière erronée que les enfants et les adolescents ne sont pas concernés par la situation vécue par leur grand-parent malade. Les parents seront d’autant plus enclins à minimiser la perception de la maladie par leurs enfants s’ils se sentent démunis pour aborder cette maladie complexe.

Pour aider ces familles à parler de la maladie, l’Association France Alzheimer a réalisé un livret de 12 pages en partenariat avec l’ADOSEN, Action et DOcumentation Santé pour l'Éducation Nationale.

Dans les établissements scolaires, ce livret peut servir de support aux échanges sur la maladie. Conçu pour expliquer la maladie à des enfants âgés de 8 à 12 ans, il est un mélange de textes informatifs, d’illustrations et de bandes dessinées. Il est disponible gratuitement auprès des associations du réseau de France Alzheimer ainsi que de l'ADOSEN pour les établissements scolaires publics.

Le 21 septembre constituera le point de départ d’une série d’actions de sensibilisation sur la maladie d’Alzheimer menées au sein d’établissements scolaires. Les associations locales France Alzheimer en collaboration avec les sections départementales de l’ADOSEN assisteront les enseignants au cours de cette campagne d’information menée à l’échelle du territoire national. Pour connaitre les différentes actions organisées, contacter le service presse de France Alzheimer. .../...
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Alzheimer et relations intergénérationnelles

1. La forte implication familiale auprès des personnes malades
- Les membres de la famille comme aidants principaux
L’étude Pixel menée en 2001 par France Alzheimer et Novartis avait révélé que 48% des aidants principaux sont les conjoints des malades d’Alzheimer et 43% leurs enfants. Ces résultats sont conformes à ceux enregistrés lors de l’étude « Handicaps, Incapacités, Dépendances » menée en 1999 par l’INSEE qui révélaient que 54,5% des aidants principaux sont les conjoints et 38% les enfants.

La proportion de membres de la famille, conjoints et enfants confondus, responsables de la prise en soins d’une personne malade d’Alzheimer oscille ainsi entre 91% et 92,5%. L’investissement familial peut également être appréhendé au travers du temps consacré par l’aidant principal à la personne malade. 70% des conjoints et 50% des enfants déclarent consacrer en moyenne six heures par jour à la personne malade lorsqu’elle vit à domicile et deux heures par jour lorsqu’elle vit en établissement.

- Les pathologies réactionnelles
L’accompagnement est lourd de conséquences pour les aidants familiaux qui développent des pathologies réactionnelles. Une étude réalisée par la fondation Médéric Alzheimer a permis d’identifier les troubles qui affectent les aidants principaux. 54% des centres mémoire interrogés déclarent ainsi que les aidants familiaux présentent des signes de fatigue et d’épuisement, 34% évoquent des états dépressifs, 24% des formes d’angoisse ou d’anxiété et 16% des troubles du sommeil.

La maladie d’Alzheimer affecte ainsi autant la personne malade que son aidant principal. Une étude menée par l’institut du vieillissement de Baltimore a démontré que le stress résultant de la prise en charge d’une personne atteinte par la maladie d’Alzheimer pouvait réduire l’espérance de vie de quatre à huit ans.

2. L’altération des relations familiales
- La redistribution des rôles familiaux
La maladie d’Alzheimer inverse les rôles familiaux en réduisant progressivement l’autonomie du parent. La dépendance physique et psychique qui s’installe chez la personne atteinte par la maladie d’Alzheimer induit ainsi un bouleversement dans le cours de la filiation.

A cette dépendance s’ajoutent les effets de l’amnésie rétrograde. La personne malade perd graduellement les souvenirs les plus récents pour ne conserver que les souvenirs les plus anciens. Elle se retrouve ramenée à un passé de plus en plus lointain qui la rapproche de l’enfance. Les enfants de la personne malade se retrouvent ainsi dans le rôle du parent par rapport à leur ascendant. Il est fréquent que les petits-enfants se sentent alors exclus du binôme qui se forme entre leur grand parent malade et leur parent lorsque ce dernier est l’aidant principal.

- La perception des enfants et des adolescents
Les enfants et les adolescents sont autant concernés que leurs parents par la maladie qui affecte leurs grands-parents. Toutefois, leur perception de la maladie diffère dans la mesure où ils sont moins directement affectés par le renversement dans l’ordre des générations. Ils peuvent néanmoins se sentir exclus de la lignée lorsque leur grand parent malade ne les reconnaît plus. En effet, l’amnésie rétrograde conduit les grands-parents à perdre conscience de l’existence de leurs petits-enfants. Ces derniers sont alors tentés d’éviter la relation avec cet adulte qui semble nier leur identité.

Plus les enfants sont jeunes et moins ils sont effrayés par les troubles de la mémoire qui affectent leur grand parent. Ils peuvent ressentir en revanche un mélange d’affection et de dégoût qui sera proportionnel à l’altération des facultés cognitives de la personne malade.

3. Préserver le lien en dépit de la maladie
- Prévenir l’isolement de la personne malade et de son aidant principal
La maladie d’Alzheimer peut conduire des membres de la famille à se détourner de la personne malade afin d’éviter le sentiment de malaise ou d’angoisse qu’ils ressentent. L’aidant principal qui forme souvent un binôme fusionnel avec la personne malade, est également victime de cet isolement. Or la désocialisation du binôme aidant-aidé accélère la progression de la maladie et contribue à l’épuisement de l’aidant familial.

Le soutien familial au binôme aidant-aidé est dès lors très important pour améliorer l’accompagnement de la personne malade. Toutefois, les échanges familiaux doivent tenir compte des symptômes de la maladie qui entravent la compréhension et l’expression de la personne malade. Les membres de la famille tendent alors à converser entre eux sans lui prêter attention, ce qui est une source de frustration et de tension pour elle.

- L’unité familiale éprouvée par la maladie
Les membres de la famille peuvent exclure la personne malade à mesure que la maladie progresse. Son aidant principal subit également ce processus puisqu’il est alors perçu comme une deuxième victime de la maladie. La marginalisation tient en grande partie à l’incompréhension, au manque de communication et à l’angoisse que la maladie peut générer. Ainsi, les parents peuvent tenir leurs enfants à l’écart de la personne malade dans une logique de protection. La présence de jeunes enfants peut, par exemple, générer une fatigue attentionnelle chez la personne malade susceptible de susciter des réactions hostiles de sa part.

4. Communiquer pour mieux accompagner
- Echanger avec la personne malade
La personne malade est longtemps consciente de la progression de la maladie et de l’altération de ses facultés cognitives. Elle reste un être sensible et ne peut être réduite au statut d’objet passif de soins. Toutefois, la nature même de la maladie rend la communication verbale difficile voire impossible. Il est dès lors important que les adultes comme les enfants explorent les moyens d’instaurer une communication non verbale avec la personne malade. Les jeunes enfants qui ne maîtrisent pas encore le langage peuvent ainsi tisser une complicité particulière avec leur grand parent malade.

- Evoquer la maladie
Il est important d’expliquer aux petits-enfants les effets de la maladie sur les grands-parents afin de donner sens à leurs attitudes et ne pas les laisser seuls face à l’incompréhension. La communication familiale autour de la maladie permet également aux petits-enfants d’exprimer leur souffrance face à l’altération des capacités cognitives de leur grand-père ou de leur grand-mère. En effet, les enfants peuvent être tentés de taire leur douleur s’ils sentent que leurs parents ne sont pas disposés à parler de la maladie. Les adultes peuvent être amenés à conclure de manière erronée que les enfants et les adolescents ne sont pas concernés par la maladie qui affecte leur grand-parent.

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Publié le 18/09/2008 à 11:42 | Lu 13115 fois