« La condition du proche de la personne malade » : un ouvrage inédit sur les aidants familiaux

Vivre aux côtés d’une personne malade, c’est souvent contribuer à l’aide, au soutien et même parfois aux soins. Comment l’entourage familial trouve-t-il sa place et sa légitimité dans notre système de soin ? Publié aux éditions Aux lieux d’être, « La condition du proche de la personne malade » aborde pour la première fois en France la situation et le rôle méconnu des aidants familiaux. Les enseignements de dix études menées auprès de l’entourage des personnes malades nous éclairent sur ses conditions de vie et l’évolution de sa représentation dans la société. Soutenu par les laboratoires Novartis, cette ouvrage se présente comme « un premier état des lieux en proximologie, près de sept ans après la naissance de ce territoire de recherche et d’actions ».


Ce livre rassemble donc les résultats des dix premières études de proximologie, territoire de recherche et d’actions visant à améliorer la connaissance de l’entourage des personnes atteintes de pathologie chroniques. Celles-ci révèlent le rôle prépondérant de la présence et l’accompagnement effectif d’un parent, d’un conjoint ou d’un enfant sur la qualité de la prise en charge.

Qu’il s’agisse de la maladie d’Alzheimer ou de Parkinson, de l’épilepsie, de l’insuffisance rénale ou du cancer, les résultats présentés dans cet ouvrage illustrent la profondeur et la complexité des relations qui se nouent entre une personne malade et son entourage immédiat, quels que soient les liens de parenté.

Ils permettent notamment de mieux cerner les contours du rôle essentiel et souvent méconnu des proches des malades ; de comprendre et de mesurer l’impact de la maladie sur leur qualité de vie, leur bien-être psychologique et leur santé et de recenser quels sont leurs besoins prioritaires.

A travers l’analyse qu’il propose, ce livre met en évidence un fait apparemment surprenant : pourtant confrontés à des situations très différentes et en dépit de la diversité des pathologies observées, les familles expriment des besoins et des attentes d’une grande similitude.

Quatre grandes catégories de besoins ont ainsi été identifiées : davantage de reconnaissance sociale et de la part du corps médical pour leur contribution, des ressources adaptées pour s’informer et se former à la prise en charge, des solutions de répit pour « souffler » un peu et la possibilité de partager leur expérience avec d’autres aidants.

Les études mettent aussi en avant l’impact psycho-social des maladies chroniques ou évolutives au sein du cercle familial ou amical. Dans ce contexte, les personnes interrogées se plaignent de l’absence de reconnaissance officielle de leur rôle, se sentent isolées ou vulnérables, parfois en situation de fragilité financière, et craignent de ne plus pouvoir faire face aux contraintes de la maladie, si elle venait à s’aggraver.

En outre, les résultats documentent le rôle précieux de l’entourage dans la prise en charge du malade : contribution au diagnostic, soutien psychologique, aide à l’observance du traitement, alerte en cas de crise, gestes de soins et aide dans la vie quotidienne. .../...
« La condition du proche de la personne malade » : un ouvrage inédit sur les aidants familiaux

Alzheimer : une urgence d’actualité
Les dimensions du soutien aux personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer –une situation qui concerne aujourd’hui plus de 800 000 familles- sont particulièrement documentées par l’enquête PIXEL, qui a recueilli sur quatre ans la situation de 3.400 aidants familiaux.

Le Dr Philippe Thomas, coordinateur des volets successifs de l’étude, rappelle que si les aidants parviennent à conserver une certaine façade dans les premiers temps de l’accompagnement, ils témoignent rapidement d’une incapacité à gérer le quotidien. « Il faut dépister rapidement les signes d’épuisement et de dépression de l’aidant : sentiment d’abattement pouvant aller jusqu’à la perte d’appétit, négligence de soi, incapacité à se concentrer, apparition de formes multiples d’inhibition… » souligne-t-il, en rappelant que le proche doit avant tout accepter de partager le soin avec d’autres intervenants et prendre du temps pour soi afin de préserver sa vie sociale.

Rappelons qu’en France, les deux tiers des personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer vivent à domicile. Pixel a révélé que les aidants leur consacraient en moyenne plus de six heures par jour, et que les épouses prenaient en charge leur mari quatre ans et demi avant de demander un placement en institution.

Des perceptions en évolution
De son côté, l’analyse de la représentation sociale du proche n’est pas non plus sans surprise. Alors que quatre études ont exploré la place réservée à l’entourage dans les cabinets des médecins généralistes, mais aussi celle qui lui est consacrée dans les articles de presse, dans le discours des associations de patients et dans l’ensemble de notre corpus législatif, elles aboutissent toutes au même constat : l’entourage reste à ce jour « une figure de l’ombre » face à un malade ou un corps médical placés au centre des débats.

A ce titre, les médias et le corps médical constituent deux exemples particulièrement significatifs. Ainsi, en six mois d’analyse de presse, seulement 142 articles mentionnent la personne malade dans sa relation à l’entourage et la notion d’aidant n’apparaît statistiquement que dans 0,5% des désignations d’entourage référencés. De même, 53% des médecins généralistes avouent ne pas porter attention à l’état de santé général apparent de l’entourage (signes de stress, dépression, fatigue), même s’ils considèrent son rôle comme majeur dans les maladies d’Alzheimer et de Parkinson, la dépression et l’épilepsie.

Publié le 17/04/2008 à 16:03 | Lu 10518 fois