L'apport de la technologie au sein des maisons de retraite, par Olivier Bessières

Le secteur de l’accueil des personnes âgées a ceci de particulier que l’Homme est au cœur de l’activité, tant par le nombre de clients que par le nombre d’employés et d’acteurs. Si, pendant des années, l’offre et les pratiques ont très peu évolué, c’est peut-être la technologique couplée à l’humain qui lui permettra de sortir de la crise qui le traverse. Le point avec Olivier Bessières*, expert dans le secteur de la Silver Economy et directeur directeur commercial chez Arkea Creative Care*.


Fin 2019, le dernier recensement faisait état de 730.000 personnes hébergées en France dans un établissement pour séniors dont 82% en EHPAD.
 
Actuellement, les résidences autonomie hébergent, quant à elles, environ 100 000 personnes et les Résidences Services Seniors (RSS) devront, en fin d’année 2023, accueillir 106 000 personnes dans environ 1.100 résidences.
 
Mais l’offre est encore bien trop légère quand on prend la mesure du vieillissement de la population : en France, les personnes de plus de 75 ans étaient 6,4 millions en 2020, elles seront 10,3 millions en 2040.
 
Les personnes de plus de 85 ans étaient, elles, 2,3 millions en 2020, elles seront 3,8 millions en 2040. L’amélioration des conditions d’accueil des lieux existants, la création de nouvelles structures d’accueil et le recrutement de personnel ne sont plus de simples options.
 
Le modèle médico-social français est à bout de souffle. Son manque d’attractivité engendre un déficit chronique de personnel d’une part et la perte de confiance de ses clients et de l’opinion publique d’autre part.
 
Les récents épisodes médiatiques à l’encontre des EHPAD n’ont fait qu’amplifier le phénomène. C’est impératif, ses acteurs doivent faire évoluer leurs pratiques pour sortir de cette spirale négative.
 
Parmi les leviers qui pourraient l’aider à réussir cette mutation essentielle, la technologie doit être considérée à sa juste valeur.
 
En effet, l’émergence de l’intelligence artificielle et l’essor de nouveaux outils de communication contribuent déjà, dans certains établissements précurseurs, à améliorer la qualité de service proposé, le lien social et la sécurité des personnes fragiles et vulnérables qui y sont accueillies.
 
Prenons l’exemple de la domotique intelligente qui permet l’utilisation de dispositifs à distance grâce à l’automatisation d’actions ou encore la détection de chute par capteur optique et l’analyse en temps réel des situations à risque.
 
Des solutions qui apportent confort et sécurité en cas de perte d’autonomie puisque le sénior réduit sa dépendance au personnel et son sentiment de déclin physique se voit amoindri.
 
Actuellement, des robots sont utilisés en EHPAD pour distraire les résidents et leur proposer des activités d’entretien physique. Mais la technologie va rapidement permettre d’aller plus loin avec  une surveillance attentive, en observant et analysant la posture ou les modifications de l’aspect du visage de même que les changements d’intonation de la voix.
 
La robotique peut également aider à la réalisation de gestes répétitifs ou pénibles physiquement et pourrait aussi devenir un intermédiaire entre le soignant et le résident et l’interprète de celui-ci auprès des équipes lorsque le dialogue n’est plus possible par l’accroissement des pathologies de type Alzheimer ou maladies apparentées.
 
Si le gouvernement a saisi l’importance d'investir dans la téléassistance pour pallier les déserts médicaux et permettre un suivi régulier de l’état physique et psychologique des résidents, il doit désormais aller plus loin.
 
Notons que dans le cadre de la Loi du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale, il annonçait le recrutement de 3 000 soignants cette année en EHPAD, soit un investissement de 170 millions d’euros selon le Ministère des Comptes publics et 50 000 d’ici la fin du quinquennat en 2027.
 
Ces recrutements ne semblent pas suffisants face à la détresse de certains établissements touchés par des grèves liées au manque de formation qualifiante et au manque de moyens financiers.
 
Accélérer sur le plan de la technologie me semble indispensable pour accompagner les équipes soignantes dans leur activité quotidienne en aidant à la réalisation de gestes répétitifs ou pénibles physiquement, pour simuler et animer des personnes atteintes de troubles cognitifs pour lesquelles la patience et la répétition des activités sont essentielles.
 
Elle permettrait par ailleurs de mieux observer, analyser la posture ou les modifications de l’aspect du visage par exemple, de même que les changements d’intonation de la voix pour une surveillance attentive et plus approfondie.
 
Rapides à déployer, ces solutions renforcent la sécurité des personnes accueillies et améliorent la qualité des services rendus. Ils offrent en plus une meilleure valorisation du travail du personnel, la réduction des tâches répétitives et chronophages et oeuvrent donc pour une attractivité du métier.
 
Des investissements sont nécessaires ainsi qu’une réelle volonté politique d’accompagnement dans la mise en place de ces technologies aux services de nos aînés toujours plus nombreux. N’attendons pas que le système soit davantage débordé.


 
Par Olivier Bessières, expert dans le secteur de la Silver Economy, précédemment président et directeur général de sociétés technologiques avec des offres à destination des établissements hébergeant des seniors. Il est actuellement directeur commercial, en charge du développement de la marque Arkea Creative Care.

Publié le 04/08/2023 à 03:27 | Lu 6722 fois