Financement de la dépendance, suite mais pas fin : chronique de Serge Guérin

La semaine dernière, j’avais abordé la question de l’abandon ou du moins du recul de la mise en œuvre d’un système collectif de prise en charge du risque dépendance. Il faut dire avec force que plus on attend pour agir et plus la facture sera lourde… Et plus les situations individuelles deviendront difficiles.





Si l’augmentation prévue des personnes très âgées (on s’attend à un quadruplement des plus de 85 ans d’ici à 2050) n’est pas suivie d’une augmentation dans les mêmes proportions des personnes en situation de grande dépendance, reste que selon les prévisions, les dépenses pour l’APA devraient doubler dans les trente ans qui viennent.

Par ailleurs, d’autres dépenses vont continuer de croître et les futurs aînés en situation de grande dépendance auront des attentes et des besoins différents de ceux des personnes aujourd’hui concernées. Tout cela va demander des efforts d’imagination, de développer de nouvelles solutions, de multiplier les offres alternatives, d’initier en particulier d’autres modes d’habitat…

Rappelons aussi que l’argent mis dans la dépendance n’est pas de l’argent jeté par la fenêtre ou perdu dans les méandres de la bourse et des systèmes financiers opaques, mais bien au contraire, ces financements servent à améliorer la vie quotidiennes des personnes concernées et contribuent à la richesse globale, au développement de l’emploi, au redéploiement de certains territoires.

Je prends pour exemple cette image : la création d’une maison de retraite -médicalisée ou non- dans un bourg peut contribuer à fixer les habitants, à en faire venir d’autres et à créer de l’emploi et donc de l’intergénération. Si l’on pousse le raisonnement plus loin, la création d’une maison de retraite peut être une chance pour l’école en lui apportant de nouveaux élèves : les enfants de celles et ceux qui viennent travailler dans la résidence pour personnes âgées.

La semaine dernière, j’écrivais qu’il y avait une forte probabilité que nous arrivions à terme, vers une situation mixte où un système universel coexisterait avec des démarches plus individualisées. C’est un peu ce qui se fait déjà du côté des complémentaires santé. Certes, ce système n’est pas idéal et contribue aussi au maintien d’inégalités. Pour autant, il permet un compromis relativement efficient.

Reste que la question des sources de financement est posée. Dans une interview récente aux Echos (cf les Echos du 30 mars 2009), Gaby Bonnand, secrétaire national de la Cfdt, se déclarait en faveur d’une hausse de la CSG, et proposait d’en harmoniser les taux. En clair que les retraités payent un taux aussi élevé que celui des actifs. Gaby Bonnand évoquait aussi une contribution progressive sur les patrimoines. Solution lui paraissant plus faisable que de vouloir disposer d’un recours sur patrimoine.

Plus largement, le financement du 5ème risque devrait s’inscrire dans une action sans cesse remise à plus tard, de refonte de notre système d’imposition des revenus du travail et du capital. Il s’agit aussi de revenir sur l’handicap social majeur de notre pays : le maintien hors du travail (et donc hors des cotisations sociales) d’une population trop nombreuse. Vaste programme aurait dit le Général.

Serge Guérin
Professeur à l’ESG
Vient de publier La société des seniors Editions Michalon
Financement de la dépendance, suite mais pas fin : chronique de Serge Guérin

Article publié le 14/04/2009 à 08:50 | Lu 4336 fois