Dépendance : coûts immobiliers et « reste à charge », les fausses-bonnes idées et les vraies propositions de la Fnaqpa

La question du « reste à charge » est au coeur du débat national sur la dépendance pour ce qui concerne l’accueil en établissement. Le Président de la République lui-même, lors de son discours du 8 février 2011 au CESE, rappelait que seuls 20% des résidents sont en capacité de faire face au coût de l’hébergement en établissement. Ce dernier s’élève en effet en moyenne à 1.800 euros par mois, alors que les pensions de retraite restent inférieures à 1300 euros par mois, voire beaucoup moins s’agissant, pour la majorité actuelle des personnes concernées, de femmes de plus de 85 ans.


Par Didier Sapy, directeur de la Fnaqpa

Face à ce constat, certains évoquent la réduction de la qualité hôtelière des établissements comme une solution potentielle à la baisse du reste à charge : réduire par exemple la surface des chambres, aujourd’hui en moyenne de 20 m², permettrait de résoudre le problème.

La présente note fait la démonstration que cette proposition, contestable sur le plan éthique et gérontologique, est aussi inefficace sur la plan économique. En revanche, d’autres leviers beaucoup plus efficaces pourraient être mis en oeuvre pour rendre les EHPAD financièrement plus accessibles au plus grand nombre.

Réduire les mètres carrés, une fausse bonne idée…

- D’un point de vue sociodémographique

Construire un EHPAD implique une réflexion préalable sur l’évolution des besoins des séniors actuels, mais surtout de la génération future qui occupera le nouvel EHPAD. Les seniors d’aujourd’hui, ayant bien souvent vécu la guerre et l’après-guerre, se contentent de peu ; mais la génération à venir, constituée de Français nés durant le baby-boom, a des exigences accrues en termes de confort et de surface.

Ces baby-boomers ont en général une préférence pour les maisons individuelles plutôt que pour les appartements collectifs et s’installent en zone périurbaine où les coûts d’accès à la propriété sont plus abordables pour les catégories moyennes. Bénéficier d’un véritable chez-soi, confortable, leur est essentiel car cela leur confère à la fois une position sociale valorisante et une certaine sécurité.

Il faut donc se préparer dès maintenant à cette génération à venir de papy-boomers, plus consumériste, car il est fort probable qu’elle ne veuille pas vivre dans une chambre de 18 m² (et encore moins dans une chambre double) et qu’elle n’accepte pas de payer à un tarif élevé une prestation au confort minimaliste.

Ainsi, les mètres carrés construits par résident ont bien augmenté ces dernières années dans les EHPAD, dans le cadre de projets d’humanisation et de recherche d’amélioration de la qualité de vie. Mais cette augmentation paraît parfaitement justifiée, car les établissements que l’on construit aujourd’hui sont plus destinés aux générations qui viendront en maison de retraite d’ici 10, 20 ou 30 ans qu’aux résidents occupant déjà les lieux aujourd’hui, et dont les exigences sont moindres.

- D’un point de vue gérontologique

Les missions des maisons de retraite médicalisées sont clairement définies au Code de l’Action Sociale et des Familles, dans l’ordre suivant : lieu de vie et d’animation ; lieu de préservation de l’autonomie et de compensation de la dépendance et lieu de soins.

Ces dernières années, le développement du soutien à domicile et l’évolution des établissements ont conduit les EHPAD à accueillir des personnes de plus en plus dépendantes et à développer leur prestation de médicalisation, sous l’impulsion des pouvoirs publics. Or s’il est vrai que les réductions de capacités liées à l’âge sont principalement dues à des polypathologies associées, les soins techniques et relationnels effectués dans les EHPAD doivent être au service du projet de vie sociale.

Si ces soins sont rendus nécessaires par l’état de santé de plus en plus fragile des résidents, les attentes de ces derniers portent également, voire majoritairement, sur le développement de la vie sociale et le maintien des liens sociaux et de la citoyenneté.

Rassurant pour les familles comme pour les professionnels, le syndrome de la blouse blanche a tendance à faire oublier qu’un EHPAD est avant tout un substitut de domicile, dans lequel on habite, et en aucun cas un établissement sanitaire, où l’on ne séjourne que temporairement. La maison de retraite médicalisée s’inscrit dans un continuum de réponses au parcours de la personne âgée : « habitat ordinaire » (domicile), « habitat intermédiaire » (logements-foyers, résidences séniors, logement adapté…) et « habitat médicalisé » (EHPAD, plus ou moins médicalisés).

Cet habitat médicalisé doit donc être considéré comme un lieu de vie avant tout, proposant un véritable logement privé, une vie sociale et de l’animation, une citoyenneté et une écoute attentive de la part des accompagnants. C’est en effet ce que recherchent les résidents d’aujourd’hui et de demain en EHPAD. Réduire les surfaces des logements et des espaces de vie sociale en EHPAD reviendrait donc à aller à l’encontre des besoins et des attentes de nos aînés.

- D’un point de vue normatif

Prétendre réduire la superficie des chambres d’EHPAD procède également d’une méconnaissance des réglementations en vigueur, qui conduisent plutôt à une augmentation des mètres carrés dans ces établissements. C’est le cas de la loi du 11 février 2005 sur le handicap, et de ses nombreux textes d’application. Par exemple, en appliquant la circulaire interministérielle DGUHC n°2007-53 du 30 novembre 2007 relative à l’accessibilité des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des bâtiments d’habitation, on constate qu’il est impossible de créer en EHPAD un logement individuel de surface inférieure à 18 m².

18 m², ça représente environ :

1,70 m² pour le débattement des portes du logement et
6,90 m² pour le mobilier minimal, à savoir :
- 4,4 m² dans la chambre pour un lit 1 place, un fauteuil, une table de chevet et une table ou une commode
- 2,5 m² dans la salle d’eau pour l’emprise du WC et du lavabo, ainsi qu’un meuble de rangement
9,06 m² pour les aires de déambulation accessibles en fauteuil roulant et les aires de rotation, dont :
- 7,30 m² autour du lit (bande de 90 cm de large + rotation de diamètre 1,50 m)
- 1,76 m² dans la salle d’eau (aire de 0,80 x 1,30 m au droit du WC + rotation de diamètre 1,50m)

Ainsi, pour ce logement minimaliste de 17,91 m² (optimisé grâce à la superposition des aires de manoeuvre), les normes comptent pour près de 52% de la surface. On pourrait généraliser cet exemple pour l’ensemble des surfaces d’un EHPAD, aussi bien pour l’ensemble des lieux de vie privés et collectifs des résidents et pour les circulations, que pour certains locaux de travail (sanitaires, vestiaires) puisque, rappelons-le, chaque entreprise a l’obligation d’employer au moins 6% de salariés handicapés en son sein. La réglementation incendie milite également pour une augmentation des surfaces (largeurs minimales de passage, sas, escaliers réglementaires, etc.).

- D’un point de vue déontologique

Nous avons vu qu’un logement de 18 m² était possible (pas en-deçà), mais il faut savoir que cette surface :

• Exclut toute possibilité pour la personne âgée de bénéficier d’un lit double,
• Ne permet pas d’agrémenter le logement par du mobilier personnel, qui fait partie intégrante de l’histoire de la personne âgée,
• Minimise les espaces de rangements, la personne âgée devant alors se séparer de la plupart voire de la totalité des vêtements et objets qui lui appartiennent et qui représentent toute sa vie passée,
• Ne permet pas de recevoir de la famille ou des amis sans être alité (comme à l’hôpital),
• Rend difficile l’intervention auprès de résidents très dépendants, ayant besoin par exemple de l’aide de deux personnels de chaque côté des WC,
• Rend difficile l’accessibilité aux résidents très dépendants voire grabataires, qui utiliseraient par exemple un fauteuil coque nettement plus volumineux que les simples fauteuils roulants pris en référence dans les diverses normes et réglementations,
• Oblige à la polyvalence de certains espaces, tels que l’espace douche qui se trouve souvent mutualisé avec l’aire de retournement ou avec le rectangle de positionnement au droit du WC, ce qui génère quelques inconforts, tels que les éclaboussures du pommeau de douche sur le siège des WC, ou l’impossibilité de mettre un pare-douche séparatif préservant l’intimité de la personne vis-à-vis de l’aidant (et évitant à l’aidant de prendre aussi une douche !)…

En revanche, en partant sur un logement de 20 m², l’espace devient un peu plus confortable, mais le lit constitue toujours le coeur de l’espace. C’est seulement à partir de 23 ou 24 m² qu’il est possible de créer un véritable espace jour, distinct de l’espace nuit, permettant à la personne âgée de recevoir ses enfants et petits-enfants ou ses amis et voisins dans les meilleures conditions, ainsi que d’intégrer plus facilement du mobilier personnel.

Ainsi, l’augmentation des mètres carrés offre un saut qualitatif qui est fondamental pour préserver la dignité de la personne âgée. Vouloir réduire les surfaces, c’est donc aller à l’encontre des droits et libertés fondamentales des usagers, à savoir : favoriser un environnement confortable pour retarder l’entrée en incapacité ou l’apparition de maladie ; donner du sens à la vie de chaque résident ; instaurer une réelle appropriation de l’espace par l’usager et ne pas l’empêcher (pour raisons architecturales par exemple) de se sentir chez soi ; favoriser la sociabilité de la personne ; faciliter l’intervention des aidants ; compenser les situations d’incapacité.

- D’un point de vue économique

Réduire les surfaces est aussi un mauvais calcul économique, empreint d’ignorance sur les mécanismes financiers des établissements. Le tarif hébergement recouvre « l’ensemble des prestations d’administration générale, d’accueil hôtelier, de restauration, d’entretien et d’animation de la vie sociale de l’établissement qui ne sont pas liées à l’état de dépendance des personnes accueillies ». Il intègre à ce titre les charges relatives à l’emploi des personnels assurant l’accueil, l’animation, l’entretien des locaux, la restauration et l’administration générale.

Plus précisément, il inclut 100% des dépenses relatives aux personnels en charge de l’animation, de l’accueil, des services généraux et de cuisine, 100% des dépenses d’administration générale et de direction et 70% des dépenses relatives aux agents de service affectés au blanchissage, au nettoyage et au service des repas. Il comprend 70% des fournitures hôtelières et 70% des produits d’entretien et des frais de blanchisserie…

Le tarif hébergement recouvre également les amortissements des biens meubles et immeubles autres que le matériel médical, les dotations aux provisions et les charges financières et exceptionnelles. Sur l’ensemble de ces charges, la part de l’immobilier ne représente en réalité que 15 à 25% selon les établissements, en fonction d’une part de leur vétusté et, d’autre part, du montage juridique et financier de l’opération d’investissement.

L’espace privatif du résident représente environ 40% des surfaces totales de l’établissement, soit moins de 10% du coût de l’hébergement. En réduire la surface de 10% (de 20 à 18 m²) reviendrait donc à faire baisser le prix de journée de l’ordre de 1%, soit en moyenne 0,60 €. 60 centimes d’euros pour un résultat dévastateur sur tous les plans, et plus particulièrement sur la qualité de l’accompagnement, c’est tout le contraire d’une mesure efficiente.

Au vu de tous ces arguments, il paraît donc évident que les économies doivent se faire autrement que par la réduction des surfaces des chambres, si l’on veut réellement réduire le reste à charge pour la personne âgée. D’autres leviers d’action existent pour réduire le reste à charge

Raisonner le coût global

Lors de la mise en oeuvre d’un projet architectural, la question de la réduction des coûts est systématiquement posée en termes de réduction des surfaces ou de la qualité des matériaux, basée sur la seul logique des coûts de revient, qui ont un impact direct sur la qualité de vie et le confort des futurs utilisateurs. Mais aussi sur les coûts d’exploitation futurs. C’est pourquoi la véritable efficience consisterait à passer d’une logique de coût de revient à une logique de rapport qualité-coût global.

Voici quelques exemples de problématiques rencontrées lorsqu’on ne raisonne pas en coût global :

• Minimiser la surface des chambres peut poser des problématiques de fonctionnement, nuire à l’autonomie des résidents, nuire aux conditions de travail… et peut donc contribuer à la dégradation de la santé des résidents, créer un surplus de travail pour le personnel conduisant à des accidents du travail ou maladies professionnelles qui coûtent cher à l’établissement.
• Réduire la surface d’une salle de restauration peut générer des difficultés pour se déplacer en fauteuil roulant autour des tables, pour faire circuler les chariots de service, pour intervenir rapidement en cas de fausse-route d’un résident.
• Réduire la surface des espaces d’animation en rendant certaines salles polyvalentes peut générer des difficultés pour organiser ces dites animations : espaces plus impersonnels et donc plus difficilement appropriables par les résidents ; personnel obligé de déplacer régulièrement le mobilier (générant perte de temps et contraintes posturales) ; situations gênantes (une animation bruyante pouvant gêner la bonne mise en oeuvre d’une autre animation nécessitant de la concentration).
• Réduire la surface d’une cuisine collective peut rendre très complexe voire impossible la mise en oeuvre des normes HACCP (difficultés pour respecter le principe de la marche en avant, pour éviter les croisements propre / sale…) ; cela peut également poser des difficultés d’organisation (manque d’espaces pour le stockage des denrées alimentaires ou des produits finis…).
• Choisir un revêtement de sol moins coûteux peut nuire à l’esthétique, au confort visuel et sonore ; mais il peut surtout impliquer une durabilité moindre et donc la nécessité d’en changer régulièrement.
• Choisir des stores en tissus peut, de la même manière, générer des problèmes de résistance et impliquer un manque d’efficacité très rapide de cette solution.
• Faire l’impasse sur la mise en place de protections murales peut générer une détérioration précoce des murs, du fait des chocs causés par les chariots et fauteuils roulants, et donc rendre nécessaire la réalisation fréquente de travaux de réparation et d’entretien.
• Opter pour des ampoules à bas prix et en réduire le nombre pour un éclairement minimum, peut nuire à l’ambiance chaleureuse des espaces et nécessiter leur renouvellement fréquent…

Ainsi, au nom de la réduction des coûts, le projet proposé est susceptible de générer de la maltraitance au quotidien envers les résidents et envers le personnel. Notons d’ailleurs que toutes ces problématiques contribuent à rendre nécessaire, plus tôt que prévu, une nouvelle restructuration du bâti ! Les coûts de fonctionnement, d’entretien et de maintenance se répercutant sur le tarif hébergement, raisonner en coût de construction par lit n’est donc pas forcément représentatif du coût réel de l’hébergement pour une personne âgée. On voit bien en effet qu’il vaut mieux investir un peu plus au départ, afin d’obtenir un meilleur résultat, puis chercher à rentabiliser l’investissement sur la durée.

Depuis quelques années, la mise en oeuvre de la HQE (haute qualité environnementale) introduit la notion de coût global dans les projets, mais cette notion n’a pas été généralisée à l’ensemble des postes de dépenses d’un projet architectural. Par exemple, lorsque le maître d’ouvrage choisit une chaudière bois, il sait qu’elle coûte plus cher à l’investissement, mais il sait aussi qu’en plus de mettre en place un système de chauffage écologique, il va faire des économies chaque année, lui permettant ainsi d’amortir sa chaudière au bout de quelques années. Le fait de bénéficier d’une subvention à l’investissement pour la mise en place d’une solution économe en énergie permet de convaincre totalement le maître d’ouvrage.

Concrètement, si un million d’euros d’investissement a un impact sur le prix de journée de 2 euros, avec une consommation d’énergie future équivalent à 3 euros par jour et par résident, un investissement de qualité supérieure à 1,5 million d’euros aura un impact direct de 3 euros (+1 euros), mais avec une consommation d’énergie limitée à 1 euros (-2 euros). Au final, en termes de reste à charge, l’économie véritable se situe dans l’augmentation du prix de revient. Et ce raisonnement peut être valable pour tous les postes du budget d’exploitation d’un EHPAD.

Il paraît donc essentiel que le maître d’ouvrage puisse raisonner de cette manière pour l’ensemble de son projet et puisse faire des choix en toute connaissance de cause. Maîtriser l’économie générale de l’opération en raisonnant en coût global est un enjeu majeur pour faire des économies.

Pérenniser et augmenter les subventions d’aide à l’investissement

Les politiques d’aide à la pierre de la CNSA et des conseils généraux présentent un double intérêt : elles ont un impact direct et significatif sur les prix de journée en EHPAD, et elles constituent un levier de relance économique sur tout le territoire.

• Réduction du « reste à charge » :

Il n’est pas rare que les opérations importantes de restructuration ou de reconstruction (sans parler des créations) aient un impact de plus de 10 € sur le prix de journée facturé au résident. Nous avons vu ci-dessus que le poids de ces opérations dans le prix de journée variait de 15 à 25%. Les subventions d’investissement, outre qu’elles permettent l’économie des frais financiers, permettent de limiter considérablement cet impact, dès lors qu’elles sont amortissables : au lieu de n’impacter que la trésorerie, elles viennent en déduction des charges sur chaque exercice pendant la durée d’amortissement de l’opération. A titre d’exemple, une opération bénéficiant de 40% de financements dits neutres (subventions, autofinancement) aura un impact sur le prix de journée réduit de moitié. Alors que comparativement, les prêts à taux 0 n’ont qu’un impact marginal, limité aux frais financiers.

A ce titre, les subventions de la CNSA ont permis ces dernières années une baisse moyenne de 2,68 euros du prix de journée sur les opérations financées, pour une part moyenne de seulement 14% dans le financement global. Cette part portée à seulement 20% permettrait une réduction de reste à charge de près de 4 euros, soit plus de 6 fois l’efficacité de la réduction des surfaces.

• Relance économique :

Le Plan d’Aide à l’Investissement (PAI) de la CNSA depuis 2006 a généré un « effet levier » de plus de 6 points : chaque euro investi a généré 6,25 € d’investissement, soit depuis 2006 près de 10 milliards d’euros injectés dans l’économie locale, illustrant à ce titre le rôle fondamental joué par les EHPAD dans l’économie du pays, que ce soit en termes d’emplois directs (plus de 300.000) ou d’investissements (et donc d’emplois indirects), équitablement répartis sur le territoire.

Jusqu’en 2010, le PAI a pu être mis en oeuvre grâce aux réserves constituées par la CNSA sur des crédits de fonctionnement des établissements et services consommés moins rapidement que prévu. Ces réserves étant désormais épuisées, il est crucial que l’Etat dote la CNSA de crédits spécifiques, hors crédits de fonctionnement, pour pérenniser sa politique décisive de soutien à l’investissement dans le secteur médico-social.

Inciter les politiques d’investissement des départements

Tous les conseils généraux pratiquent aujourd’hui une politique rigoureuse de gestion des prix de journée en EHPAD, mais tous ne pratiquent pas la politique cohérente d’aide à l’investissement qui devrait l’accompagner.

Dans le cadre de la future réforme de la dépendance, il est plus que probable que les critères de péréquation de l’APA (ou de la future prestation qui lui succèdera) par la CNSA seront revus. C’est l’occasion pour l’Etat d’inciter les départements à développer des politiques de soutien à l’investissement en en faisant un critère de péréquation de l’APA (ou de la future prestation) : les départements menant une politique cohérente en la matière y seraient incités par une meilleure solvabilisation des dépenses d’APA par la CNSA.

Réduire l’impact du foncier

L’impact du foncier sur le prix de revient d’une opération peut être particulièrement significatif (jusqu’à 15 ou 20%), notamment en milieu urbain, et est souvent exclu du périmètre de financement des subventions. Une politique d’incitation pour les communes à consentir des prix très bas pour leur terrain, voire à les mettre gratuitement à la disposition de l’établissement présenterait également un double intérêt : réduire le reste à charge et développer la mixité générationnelle et le maintien des liens sociaux. Ainsi, en échange de la mise à disposition du terrain, l’EHPAD pourrait s’engager à mettre à disposition une partie de ses locaux collectifs à la commune ou aux associations, ou de mutualiser certaines fonctions supports (cuisine, buanderie…).

Purger le budget hébergement

Comme nous l’avons vu plus haut, l’immobilier pèse de 15 à 25% des coûts d’hébergement selon le type d’établissements, alors que les coûts de personnel représentent 55 à 70% des charges. De plus, les coûts d’hébergement étaient à l’origine censés être constitués des seules charges liées au gîte et au couvert, soit l’immobilier et la restauration, comme dans n’importe quel habitat. Or les budgets hébergement des établissements intègrent aujourd’hui des charges diverses, outre l’habitat et la restauration : entretien des locaux et du linge, gestion et administration, animation et vie sociale.

- Habitat et restauration : en ajoutant la restauration à l’habitat, la prestation liée au gîte et au couvert représente 30 à 40% des coûts actuels en établissement, soit à quelques exceptions près moins de 1000 euros par mois. S’il ne devait rester qu’un seul poste sur le budget hébergement, ce serait celui-là. En outre, l’allègement des autres charges permettrait un véritable saut qualitatif en la matière, qui correspond pleinement aux attentes des résidents, actuels et surtout futurs.

- Entretien des locaux et du linge : ce poste, qui pèse pour environ ¼ du budget, est pris en charge par l’APA à domicile lorsque la personne vit en habitat ordinaire ou intermédiaire. Il doit donc être transféré à la section dépendance du budget.

- Gestion et administration : il est tout à fait illégitime que ce coût, estimé à environ 15% des charges, soit supporté en totalité par les résidents, alors que la gestion porte sur l’ensemble des activités. C’est le seul poste que nous proposons de répartir équitablement entre les 3 sections tarifaires.

- Animation et vie sociale : la vocation thérapeutique de l’animation en établissement n’est plus à démontrer. Elle fait en outre l’objet d’attentes de plus en plus fortes des personnes vivant en établissement, et est appelée à se développer sensiblement, dans une optique de prévention et de préservation de l’autonomie. Elle a donc vocation à être transférée à la section tarifaire dépendance.

Conclusion

Les arguments sociodémographiques, stratégiques, normatifs, gérontologiques, déontologiques et économiques ne manquent pas pour tordre le cou à l’idée que réduire les mètres carrés ferait faire des économies à l’EHPAD et donc permettrait de réduire le reste à charge des personnes âgées. On ne peut, de cette manière, réduire à néant toutes les avancées qualitatives qui ont eu lieu ces dernières années dans le cadre des projets de construction, de restructuration ou d’extension des EHPAD, et par là balayer les droits et libertés fondamentales de la personne âgée.

En revanche, on a vu que d’autres leviers politiques et financiers s’avèreraient beaucoup plus efficaces pour que les établissements redeviennent financièrement accessibles au plus grand nombre, tout en améliorant leurs réponses aux besoins et aux attentes futurs des personnes âgées. C’est pour la FNAQPA un enjeu majeur de la réforme annoncée par le Président de la République.

Publié le 26/04/2011 à 09:46 | Lu 4387 fois





Dans la même rubrique
< >