Candelaria : un beau film sur l'amour et la sexualité des ainés sous le ciel de Cuba

Le nouveau film de Jhonny Hendrix Hinestroza, Candelaria, sortira dans les salles françaises le 4 avril prochain. L’histoire se déroule dans le Cuba des années 90… Candelaria et Victor Hugo, 150 ans à eux deux, vivent de bric et de broc jusqu’au jour où Candelaria rentre à la maison avec une petite trouvaille qui pourrait bien raviver la passion de leur jeunesse…





« Au cours des années 90, la Colombie traversait une période de turbulences marquée par l’instabilité politique et le trafic de drogue. Avec la femme que j’aimais, on voulait s’installer alors à Cuba et appeler notre futur enfant Candelaria » explique Jhonny Hendrix Hinestroza.
 
Et le réalisateur de poursuivre : « mais malheureusement, cela n’est jamais arrivé, l’enfant n’a pas vu le jour, et je suis resté en Colombie. Il y a quelques années, dans le centre-ville de La Havane, je suis tombé par hasard sur une vieille dame qui s’appelait… Candelaria ! Cette femme aux yeux sombres et à la peau brulée m’a raconté son histoire avec sa voix roque et son ton mélodieux, une histoire très personnelle sur la période spéciale de Cuba après la chute de l’Union soviétique ».
 
"Cette histoire est marquée par un ensemble de coïncidences et est personnellement liée à l’histoire de ma propre jeunesse" conclut Hinestroza.
 
Ce film doux, est un trésor d’émotion et d’humanité qui repose sur l’interprétation de ces deux acteurs dont la routine et la vie sexuelle est bouleversée. Amusant, scandaleux, touchant, Candelaria devrait vous séduire par la délicatesse avec laquelle il traite de la sexualité au troisième âge, par la musique et les couleurs cubaine, et par la joie de vivre qui émane de tout le film.

Candelaria : entretien avec Jhonny Hendrix Hinestroza, le réalisateur

Comment est né le projet de Candelaria ?
C’est une longue histoire ! Candelaria est né au moment où j’ai commencé à tourner mon second film Saudó, et c’est un peu une synthèse de mon histoire personnelle, à l’instar de ces démons qu’on cherche à exorciser d’une façon ou d’une autre à un moment particulier de sa vie…
 
Je savais que je voulais écrire sur la peur de vieillir, parce que depuis cinq ans environ je vois mes parents vieillir. Quand mon père, un homme qui a travaillé et s’est battu toute sa vie, est parti en retraite, j’ai senti que du jour au lendemain il basculait dans un ennui terrible et que les murs de sa propre maison l’emprisonnaient.
 
Depuis, je suis préoccupé par la vieillesse et c’est pour cette raison que j’ai décidé de faire un film qui traitait de cette question.

 
Pourquoi avez-vous décidé que la chronique aurait lieu à Cuba ?
J’ai été invité au festival de La Havane et j’y ai rencontré quelqu’un qui m’a parlé de la « période spéciale» de Cuba, cette époque dont tous les habitants de l’île se souviennent très bien mais dont personne ne veut parler : les années de crise économique qui ont suivi l’éclatement de l’URSS et l’embargo américain. Ce récit m’a rappelé mon enfance sur la côte pacifique colombienne. J’ai donc décidé de réunir mon expérience personnelle et le récit cubain dans une histoire commune.
 
Finalement, les problèmes dans cette région sont assez semblables…
En effet. Pour moi, l’Amérique latine est une seule entité. On parle toujours de Cuba, du socialisme et de sa pauvreté ; on parle depuis peu de la crise au Venezuela, mais il suffit de regarder dans sa rue pour constater que, même si nous refusons de l’accepter, beaucoup de gens vivent dans des conditions aussi misérables en Colombie et que nos anciens meurent parfois dans une pauvreté absolue.
 
Et même si dans ce film c’est l’accent et la musique romantique cubaines que nous entendons, ou les danseurs de boléro que nous voyons, les problématiques abordées sont tout autant colombiennes et plus largement latino-américaines.

 
Cela a dû être terrible de perdre l’acteur principal en plein milieu du tournage…
Terrible ! Et on avait déjà quasiment fini de tourner. Nous avons dû changer d’acteur, recommencer à tourner les scènes… Et surtout, sa mort m’a profondément attristé : elle m’a fait éprouver la fragilité de la vie, celle qui est propre à la vieillesse. Les jeunes gens ne la ressentent pas, mais les anciens savent que leurs jours sont comptés.
 
Jamais je n’aurais imaginé que quelque chose emporte l’un de mes acteurs. Cela a été un véritable choc pour toute l’équipe. J’ai pleuré pendant plus d’une semaine parce que je m’étais attaché presque amoureusement à Jesús. Je l’avais adopté comme un père et nous avions construit une relation magnifique.

 
Et Fidel Castro aussi est décédé pendant le tournage…
Oui, et cela a été très complexe parce que l’île entière a changé brutalement. Nous avons dû changer l’organisation du tournage et cela a affecté tout le travail que nous avions mis en place avec la production. Mais malgré tout, ce tournage a été l’une de mes expériences les plus belles et les plus enrichissantes. Cuba est finalement devenu un personnage à part entière dans le film, davantage sonore que visuel d’ailleurs.

Article publié le 13/02/2018 à 07:40 | Lu 4495 fois