Apnée du sommeil : le rôle du chirurgien-dentiste

A l’occasion de son Congrès annuel qui s’est tenu la semaine dernière à Paris, l’Association Dentaire Française (ADF) a fait le point sur l’apnée du sommeil et les différentes solutions proposées par le chirurgien-dentiste. D’après un entretien avec le Dr. Robert Garcia, Vice-Président de la Société Française de Médecine Dentaire du Sommeil et Doyen des Facultés de Chirurgie Dentaire de France.





Apnée du sommeil : le rôle du chirurgien-dentiste
Le Syndrome d’Apnée Obstructive du Sommeil concerne 2 à 5% de la population ; et davantage les hommes que les femmes (jusqu’à la ménopause).
 
Les facteurs  prédisposants sont : l’obésité, l’âge ou encore certaines caractéristiques faciales (petite mandibule, visage très allongé…).
 
Plus concrètement, cette maladie se définit par la fermeture des voies aériennes supérieures pendant plus de 10 secondes au niveau de l’oro-pharynx. Cette fermeture peut être totale (apnée) ou partielle (hypopnée). Elle se traduit cliniquement par l’arrêt de la ventilation et donc, de la respiration qui génère une hypoxie (diminution du taux d’oxygène dans le sang) dont les conséquences peuvent se révéler très graves.
 
La durée et la fréquence des apnées caractérisent le Syndrome d’Apnées Hypopnées Obstructives du Sommeil (SAHOS). Le nombre d’évènements par heure de sommeil (Indice d’Apnées-Hypopnées, IAH) en détermine la gravité.
 
Conséquences du SAHOS

Les conséquences du SAHOS sur la santé sont multiples : hypertension artérielle, attaque cardiaque et cérébrale, atteinte coronaire. Le syndrome d’apnée du sommeil est la cause la plus fréquente de somnolence diurne d’origine organique. Il surexpose les personnes qui en sont victimes aux accidents domestiques, professionnels et de la route. Toutes ces conséquences font que le SAHOS est considéré comme un enjeu de santé publique. La médecine bucco-dentaire a donc toute sa place dans la chaîne de prise en charge de cette pathologie  au côté des  pneumologues, ORL, neurologues,… du  diagnostic à la thérapeutique.
 
Le rôle du chirurgien-dentiste

Certains facteurs anatomiques et physiologiques oro-faciaux favorisent le développement du SAHOS, plaçant le chirurgien-dentiste au cœur de la prévention, du dépistage et du traitement de cette pathologie. Les chirurgiens-dentistes ont en effet un double rôle à jouer : dépister et prendre en charge.
 
Dès le plus jeune âge, un enfant hyperactif, avec un comportement asocial et respirateur buccal, doit alerter sur la possible présence d’un SAHOS. La cause majeure du SAHOS de l’enfant est la présence d’amygdales et/ou de végétations qui obstruent le passage de l’air. Leur ablation est souvent requise pour résoudre le problème.

Pour les adultes, la symptomatologie est différente et les signes d’appel plus variés : fatigue au réveil, céphalées matinales, somnolence diurne, ronflements, urines abondantes, troubles cognitifs, baisse de la libido ou encore un état dépressif.
 
Outre le dépistage de cette maladie qui se fait grâce à l’observation et l’interrogatoire du patient, la participation thérapeutique du chirurgien-dentiste s’effectue dès que le médecin du sommeil prescrit une orthèse. Le chirurgien-dentiste prend les empreintes nécessaires à sa réalisation, place l’orthèse, la règle et en assure le suivi.

Pour les cas relevant de la chirurgie orthognathique, un protocole associant l’orthodontie et la chirurgie est indispensable.
 
Le diagnostic

Le ronflement : le signal révélateur

Le ronflement émet un bruit pouvant atteindre jusqu’à 100 décibels, l’équivalent d’un marteau piqueur !
Il est le résultat d'une vibration des tissus mous respiratoires (dits naso-pharyngés : voile du palais, base de la langue et parois pharyngées). Le ronflement peut se terminer par une phase apnéïque : un silence brutal succédant au bruit intense du ronflement.

Le partenaire de nuit a un rôle capital. Sa description des phases de ronflement peut permettre d’identifier le SAHOS caractérisé par des phases « d’apnées témoins » où les pauses respiratoires sont suivies de micros éveils avec parfois des épisodes de suffocation.
 
Suite aux différents signaux d’alerte à la fois du chirurgien-dentiste et du conjoint… le diagnostic d’apnée du sommeil est établi à partir d’un examen polysomnographique réalisé dans un centre du sommeil où le patient doit passer la nuit. Ce diagnostic consiste à enregistrer, au cours du sommeil, plusieurs variables physiologiques (rythme respiratoire et cardiaque, électroencéphalogramme, électromyogramme des muscles des bras ou des jambes...) afin de déterminer certains troubles liés au sommeil. Le principal élément à retenir est l’importance de l’indice d’apnées-hypopnées (IAH) qui permet de définir la gravité du syndrome :

- de 0 à 5, on estime que le patient est dans la normalité ;
- entre 5 et 15 évènements par heure, on est en présence d’un SAHOS léger ;
- de 15 à 30, le  SAHOS est modéré ;
- au-delà de 30, le SAHOS est sévère.
 
La prise en charge thérapeutique

Le port d’un masque

Le patient porte un masque relié à une machine qui envoie de l’air sous pression continue dans les voies aériennes supérieures. Ce flux permet de maintenir ouvert l’oro-pharynx pendant la phase d’inspiration. Il s’agit donc d’un maintien artificiel du passage de l’air. La contrainte liée au port du masque fait que l’observance et la compliance s’effrite très vite au cours du temps.
 
L’orthèse

Dans le cas d’un SAHOS modéré (IAH inférieur à 30), le médecin du sommeil peut prescrire le port d’une orthèse d’avancée mandibulaire. Le principe est simple : en forçant mécaniquement la mâchoire inférieure vers l’avant, on mobilise la base de la langue vers l’avant, ce qui permet l’ouverture de l’oro-pharynx. L’orthèse d’avancée mandibulaire, si elle est mieux tolérée que le masque, n’en est pas moins inconfortable. Elle peut générer des troubles connexes (douleurs articulaires et/ou musculaires, perte d’occlusion).
 
En cas de SAHOS sévère, les deux méthodes masque et orthèse peuvent être associées.

Article publié le 06/12/2013 à 12:33 | Lu 2016 fois