Apnée du sommeil et hausse significative des risques cardiaques

Le syndrome d’apnées du sommeil touche 4 à 7% de la population adulte en France et 15% après 70 ans. Il engendre une fatigue chronique et peut provoquer des troubles cardiovasculaires graves. La Fédération Française de Cardiologie fait le point sur cette pathologie largement sous-diagnostiquée : 80 % des personnes qui en souffrent ne sont ni diagnostiquées, ni traitées…


Le syndrome d’apnées du sommeil se manifeste par des arrêts répétés et incontrôlés de la respiration pendant le sommeil, provoquant des éveils et des micro-réveils intermittents. Ces interruptions de la respiration sont la conséquence de la fermeture répétée, pendant plus de 10 secondes du conduit aérien du pharynx, et cela plus de cinq fois par heure de sommeil.
 
Ces occlusions sont le fait d’un relâchement des muscles de la gorge et de la langue durant le sommeil, bloquant ainsi le passage de l’air et empêchant la respiration. A chaque épisode, le taux d’oxygène dans le sang chute (hypoxémie) enregistré par les centres respiratoires avec création d’un éveil ou micro-éveil permettant la réouverture des voies aériennes supérieures.
 
La succession des épisodes d’hypoxémie liés aux apnées du sommeil au cours des nuits va provoquer une détérioration de la qualité de sommeil et l’installation progressive de complications cardio-vasculaires :
- Une hypertension artérielle. Elle est dite « masquée » car peut se manifester uniquement la nuit au début de la maladie. Les pics tensionnels répétés nocturnes par activation du système nerveux sympathique, provoquent à la longue des modifications structurelles des vaisseaux, une activation de systèmes endocriniens impliqués dans l’hypertension et participer à la genèse d’une hypertension permanente qui peut devenir réfractaire aux traitements médicamenteux si le syndrome d’apnée n’est pas traité. Il existe une corrélation entre l’HTA et la sévérité de l’IAH.
 
Près de 40 % des personnes hypertendues ont aussi un syndrome d’apnées du sommeil. Ce taux passe à 83% chez les patients ayant une hypertension résistante (c’est à dire une hypertension non contrôlée par trois médicaments antihypertenseurs).
 
- La succession de périodes de sommeil et de micro-réveils « d’urgence » provoquent une alternance dans les rythmes cardiaques, due à l’activation du système nerveux vagal et du système nerveux sympathique : bradycardie (ralentissement des battements du cœur durant les moments de sommeil profond) et tachycardie (accélération durant les périodes d’apnée et de micro-réveil).
 
Les apnées répétées et quotidiennes vont induire une surpression thoracique ayant des conséquences sur les cavités du cœur qui vont se dilater, avec à terme la survenue d’une insuffisance cardiaque. D’autres troubles du rythme pourront alors compliquer le SAS avec principalement la fibrillation atriale, à haut risque d’accident vasculaire cérébral embolique.
 
- De plus, l’hypoxémie favorise le resserrement des artères (vasoconstriction). Chez les patients dont les artères coronaires sont déjà malades, ces épisodes de vasoconstriction peuvent provoquer une rupture de plaques d’athérome, favoriser la formation d’un caillot et provoquer un infarctus du myocarde avec aboutissement possible à une insuffisance cardiaque elle-même favorisée par les phénomènes d’hyperpression intrathoraciques créés par les apnées.
 
La prévalence du syndrome d’apnées du sommeil est 1,5 fois plus fréquente chez les personnes souffrant d’une insuffisance cardiaque ou d’une maladie coronaire. Un patient souffrant du syndrome d’apnées du sommeil a cinq fois plus de risque de développer une maladie coronarienne.
 
Les femmes encore plus fragiles à certaines périodes de la vie
Bien que le SAS soit plus fréquent chez les hommes, la prévalence du syndrome d’apnées du sommeil augmente sensiblement chez les femmes avec l’âge. 5,9 % d’entre-elles présentent à partir de 40 ans un syndrome d’apnées du sommeil associé à une somnolence diurne excessive.
 
Lorsque les femmes souffrent d’un SAS modéré à sévère, elles présentent 30 % de risque en plus
de développer une maladie cardio-vasculaire. Par ailleurs, comme pour beaucoup de maladies cardio-vasculaires, les femmes sont particulièrement exposées à deux périodes hormonales clés : la grossesse et la ménopause.
 
Ces périodes de la vie d’une femme doivent constituer des moments de dépistage et de surveillance
cardio-vasculaire.
 
« Le rôle du cardiologue est primordial dans le dépistage du syndrome d’apnées du sommeil, qui est une véritable situation à haut risque cardio-vasculaire. Nous devons penser systématiquement à cette pathologie si un patient souffre d’hypertension résistante, de fibrillation atriale ou d’insuffisance cardiaque et ne pas écarter les risques chez les femmes qui sont enceintes ou ménopausées », affirme le Professeur Claire Mounier-Vehier, cardiologue au CHU de Lille et Présidente de la Fédération Française de Cardiologie.

Publié le 16/01/2019 à 07:39 | Lu 3829 fois