ADMR : le PLFSS 2022 comporte des avancées significatives mais appelle des ajustements

L’ADMR* regrette qu’une loi Grand-âge ambitieuse ne soit plus à l’ordre du jour de ce quinquennat alors qu’elle en avait été annoncée comme le « marqueur social ». En effet, le défi à relever en matière de grand-âge et d’autonomie est énorme, alors que le nombre de personnes de plus de 85 ans aura triplé en entre 2017 et 2020, pour atteindre 4,8 millions de personnes.


Le rapport Libault publié en 2019 évaluait ainsi à 9,2 milliards d’euros les budgets supplémentaires à réunir chaque année à partir de 2030 pour faire face au vieillissement de la population française. Mais au-delà des budgets, c’est bien d’une vision et d’un projet et de société dont nous avions urgemment besoin.
 
Seule une loi pouvait apporter des réponses à la hauteur de ces enjeux. Pas plus que les précédents, ce PLFSS 2022 ne pourra donc faire oublier l’absence d’une loi Grand-âge.
 
Force est néanmoins de constater que ce PLFSS apporte des réponses concrètes à des problématiques urgentes qui pesaient lourdement sur le secteur du domicile depuis des années.
 
• En garantissant aux structures de l’aide à domicile un tarif socle national de 22 euros, l’Etat contribue à la « solvabilisation » des structures dont la rémunération était encore trop souvent inférieure à ce tarif, parfois inférieure à 20 euros. Ce faisant, il concourt également à la construction d’une équité territoriale que le secteur appelait de ses vœux.
• En annonçant une bonification « qualité » d’environ 3 euros, essentielle, il permet de prendre en considération les conditions et contextes spécifiques induisant des surcoûts (intervention le week-end, cas complexes, zones particulièrement isolées…).
• Lorsqu’on prend en compte l’entrée en vigueur au 1er octobre l’avenant 43 à la convention collective de la branche du domicile, qui permet une revalorisation significative des salaires des personnels du secteur associatif du domicile, on peut affirmer que jamais ces dernières années le secteur n’avait bénéficié d’une telle prise en considération par l’Etat.
 
Il conviendra néanmoins de s’assurer qu’une indexation permettra une revalorisation régulière du tarif socle, et qu’au-delà de ce tarif socle, dont l’Etat assume clairement la charge, les financements de l’avenant 43 et des 3 euros de bonification seront sécurisés de façon pérenne.
 
Bien entendu, ce PLFSS n’est pas parfait. Il introduit notamment trois incertitudes majeures :
• La volonté de rapprocher les structures de l’aide et du soin, pour constituer les « services autonomie » apparait légitime.
 
Mais, si ce rapprochement, qui ne passe pas nécessairement par une fusion, répond à une attente compréhensible de simplification pour les bénéficiaires, sa mise en œuvre ne peut être décrétée et devra faire l’objet d’un accompagnement conséquent. On peut à cet égard s’étonner et même regretter qu’un virage d’une telle ampleur et d’une telle complexité (structuration juridique, gouvernance…) soit annoncé dans le cadre de l’exercice avant tout financier que constitue un PLFSS.
 
Dès lors, l’enveloppe de 10 millions d’euros dédiée à la coordination des services d’aide et de soin apparait bien modeste.
 
• Le PLFSS évoque également la notion d’EHPAD « ressource » qui permettrait à ces structures d’intervenir à domicile. Nous rejoignons la Ministre déléguée à l’autonomie, Brigitte Bourguignon, qui affirmait le 5 octobre lors des Assises du domicile, que cette possibilité ne se justifiait que pour des personnes devenues trop dépendantes pour être accompagnées à domicile mais qui n’auraient pas trouvé de place dans un EHPAD.
 
En effet, les acteurs du domicile accompagnent aujourd’hui plus de 1,5 million de personnes en perte d’autonomie sur l’ensemble du territoire, et c’est bien à eux, services d’aide et services de soins, demain « services autonomie », de continuer à assurer cette mission. Il conviendra donc que ce PLFSS clarifie le périmètre d’intervention des EHPAD « ressource ».
 
• Alors que le retard de la France en matière de prévention de la perte d’autonomie est régulièrement épinglé, la suppression du crédit d’impôt concernant la souscription d’une téléassistance indépendamment de prestations d’aide et de soin apparait anachronique. 
 
En effet, en traitant notamment chaque année 300.000 chutes de personnes de plus de 65 ans, et ne faisant appel aux services de secours que dans 2% des cas, les services de téléassistance permettent à nombre de nos concitoyens de continuer à vivre en sécurité à domicile, tout en préservant les budgets de la collectivité.
 
Enfin, ce PLFSS passe à côté d’un sujet essentiel : celui de l’aide aux aidants, et plus spécifiquement du répit longue durée. Le sujet n’est pas évoqué alors que se termine en fin d’année l’expérimentation du « relayage » dont les premiers résultats sont très positifs et qui pourrait soulager des centaines de milliers de nos concitoyens engagés aux côtés de leurs proches.
 
En conclusion, si ce PLFSS 2022 ne peut compenser l’absence d’une loi Grand-âge ambitieuse, il représente de réelles avancées pour le secteur du domicile. Une phase de consultation en amont lui a certainement manqué, et il conviendra de compléter et de préciser ce texte. L’ADMR travaille sur un certain nombre d’amendements qu’elle déposera dans les prochains jours…

*Créée en 1945, l’ADMR est le 1er réseau national associatif de service à la personne et un acteur majeur de l’économie sociale et solidaire.

Publié le 13/10/2021 à 10:27 | Lu 3429 fois





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