Transmission de patrimoine et démembrement : une stratégie d’optimisation fiscale à creuser

Lorsque l’on veut transmettre un bien, l’État perçoit un impôt appelé « droits de mutation » qui peut rendre l’opération relativement coûteuse. Toutefois, le « démembrement de la propriété » permet de transmettre un bien (immeuble, contrat d’assurance, parts sociales par exemple) avec une fiscalité plus réduite que dans le cas d’une simple donation. Par Maître Jacques Kaplan Docteur en Droit, Avocat au Barreau de Paris chez Avocats Picovschi.





De quoi s’agit-il ?

La propriété du bien que l’on envisage de transmettre est « démembrée » en deux droits distincts :

- « l’usufruit », c'est-à-dire le pouvoir d’utiliser un bien ou d’en récolter les revenus, ce qui peut être en habitant une maison ou en la louant, en percevant des dividendes de parts sociales ; ce droit est viager ou peut, conventionnellement, avoir une durée limitée ;

- la « nue-propriété », c'est-à-dire la propriété du bien sans en avoir l’usage et les revenus.
 
L’auteur de la libéralité se réserve l’usufruit sa vie durant et la propriété originelle appelée « pleine propriété » se reconstitue au bénéfice du gratifié, le nu-propriétaire, au décès de l’usufruitier.
 
A l’origine, cette pratique permettait au conjoint survivant qui avait peu ou pas de droits dans la succession de son conjoint, de bénéficier de la jouissance de certains biens, et elle est toujours très utilisée, malgré la montée en puissance des droits du conjoint survivant, ces dernières décennies.
 
Dans le cas d’un immeuble, l’usufruitier à pratiquement toutes les charges d’un propriétaire, le nu-propriétaire n’étant qu’obligé aux travaux relatifs à la structure du bien.

Maître Jacques Kaplan
Dans le cas de valeurs mobilières ou de contrat d’assurance, l’usufruitier ne doit pas entamer le capital.
 
La valeur de l’usufruit se détermine en fonction de l’âge de l’usufruitier à la date de l’acte le lui accordant.
 
Les avantages

- fiscaux

réduction du montant des droits de mutation au moment de l’acte de transmission, puis qu’ils sont assis sur la valeur de la nue-propriété seulement, en fonction de l’âge de l’usufruitier ;
• lorsque l’usufruit est établi à l’occasion d’une succession, possibilité de payer les droits de succession affectant le bien lors de la réunion de l’usufruit à la nue-propriété ;
• l’ISF étant payé par l’usufruitier et assis sur la valeur du bien démembré en pleine propriété, le nu-propriétaire ne sera pas assujetti à l’ISF du fait de sa nue-propriété ;

- patrimoniaux
• garantit à l’usufruitier l’usage ou les revenus du bien démembré,
• assure au nu-propriétaire la propriété du bien à l’extinction de l’usufruit,
• permet, dans certains cas de donner des droits à une personne sur un bien sans mettre celui-ci en indivision ;
 
Les inconvénients

- si l’usufruitier n’entretient pas ou dilapide le bien, le nu-propriétaire risque de voir ses droits fortement diminués au décès de l’usufruitier :
• des mesures permettent de l’éviter : inventaire, caution…mais elles sont rarement mises en œuvre, car le plus souvent l’acte constituant l’usufruit en dispense son bénéficiaire ;

- si l’usufruitier est beaucoup plus jeune que le nu-propriétaire, celui-ci risque de ne jamais voir la nue-propriété se reconstituer à son profit, ce sont ses héritiers qui en bénéficieront :
• pour remédier à cette situation, on peut demander au Tribunal d’ordonner la conversion de l’usufruit en rente viagère ou en capital, mais cela n’est pas de droit ;

- le nu-propriétaire ne peut vendre le bien, il ne peut que céder sa nue-propriété, ce qui peut n’avoir qu’un intérêt économique limité, en fonction de l’âge de l’usufruitier. En revanche, l’usufruitier peut céder son usufruit, dont la valeur dépend de son âge au jour de la cession.
 
En conclusion, dans certains cas donner un bien en s’en réservant l’usufruit peut être une excellente affaire, dans d’autres cas, cela peut tourner au désastre.
 
Chaque situation est unique, il est donc nécessaire de vous entourer des conseils d’un avocat expérimenté après lui avoir exposé votre situation et l’effet que vous souhaitez obtenir. Il pourra alors vous conseiller utilement lorsque l’on vous proposera un montage et vous aider à le faire aboutir.
 
Toute la technicité de ces montages nécessite les conseils d’un avocat qui connait toutes les subtilités afférentes à cette matière. Son intervention est un gage de la qualité des opérations réalisées ainsi que de la protection de vos intérêts.

Transmission de patrimoine et démembrement : une stratégie d’optimisation fiscale à creuser
Maître Jacques Kaplan
Docteur en Droit, Avocat au Barreau de Paris
Avocats Picovschi
www.avocats-picovschi.com
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Article publié le 21/08/2013 à 04:04 | Lu 3634 fois


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