"Si on savait" aux Bouffes Parisiens : méfiez-vous de votre micro-onde !

Et si d’un coup la possibilité nous était donnée de revivre quelques moments de notre vie en sachant quoi faire, ou plutôt ne pas refaire ? C’est un thème plus fréquemment traité au cinéma qu’au théâtre, car difficile à mettre en scène sur des planches, en direct. Et pourtant, Jean-Luc Moreau, utilisant astucieusement les possibilités d’un plateau tournant, y parvient à merveille.


Patrick et son épouse, la cinquantaine tous les deux, vivotent dans leur petit appartement. Il est contrôleur à la SNCF et gagne modestement sa vie ; elle a renoncé à son travail et se débrouille chaque jour pour joindre les deux bouts.
 
Leur fils Sylvain, bientôt trente ans et encore célibataire, a quitté brusquement le domicile familial pour des raisons qu’on saura bientôt.
 
Patrick est bricoleur, ou plutôt tente de l’être, car tout ce qu’il touche finit en morceaux. Aujourd’hui il s’acharne sur le four micro-ondes quand brusquement, une violente étincelle le foudroie ! Il se retrouve alors aux portes du paradis où le gardien des lieux, bon prince, lui propose de revivre certains moments de son existence passée pour lesquels il éprouve des regrets…
 
Eric Fraticelli –alios Pido pour les intimes-, nous déroule un scénario très astucieux qui nous réserve de nombreuses surprises, y compris la pirouette finale qu’on vous laisse découvrir. Par trois fois, l’auteur nous fait revivre le passé, où les évènements se déroulent différemment, parfois en mieux, mais pas toujours.
 
Des retours en arrière qui nous font immanquablement penser à Sacha Guitry, spécialiste du genre, mais il y aussi du Franck Capra, dans cette volonté de croire que l’homme est foncièrement bon.
 
Les cinq acteurs qui occupent la scène sont tous des habitués des planches. On ne présente plus Daniel Russo. On l’avait quitté en pleine forme dans « Alors on s’aime », on le retrouve ici en époux attachant, avec ses forces et ses faiblesses, qui n’a pas encore vécu ses rêves et qui garde l’espoir que la vie vaut mieux que tout.
 
C’est à Valérie Mairesse qu’est confié le rôle de l’épouse, femme fatiguée et touchante, tentant tant bien que mal de redonner du sens à ce couple déjà usé. Après ses débuts au Café de la Gare, on l’a suivie avec un égal plaisir tout au long de sa carrière, au cinéma, à la télévision comme au théâtre.
 
Si jeune soit-il, Erwan Téréné n’est pas un débutant. On se souvient de son spectacle « Mon poing sur ton i », donné à Avignon puis à Paris. Il est ici Sylvain, le fils rejeté dont on espère la prochaine réhabilitation. 
 
Jean-Luc Porraz, impassible maître de l’au-delà et Bénédicte Dessombz, la maîtresse qui sait si bien se métamorphoser au gré du temps, complètent heureusement la distribution.
 
La mise en scène alerte de Jean-Luc Moreau permet à toute l’action de se condenser en peu de temps, l’espace d’un rêve, en définitive. Sans oublier la musique de Sylvain Meyriac, qui rajoute au côté onirique de l’ensemble.
 
Comme sur toutes les scènes parisiennes depuis la rentrée les mesures sanitaires sont rigoureusement respectées, ce qui permet de passer un bon moment de détente et de rire en toute sérénité. Gageons que, une fois chez vous, vous ne regarderez plus votre four micro-ondes de la même façon !

Théâtre des Bouffes Parisiens
4, rue Monsigny
75002 Paris
 
Vendredi 18h30
Samedi 15h et 18h30
Dimanche 15h

Publié le 29/10/2020 à 01:00 | Lu 1699 fois





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