Santé : la révolution par l’immunothérapie !

Poursuivant son exploration des thérapies du futur, le Leem (Les entreprises du médicament) vient de publier une intéressante étude sur l’immunothérapie, réalisée par le Comité Biotechnologies du Leem, et qui montre que cette approche de soins est un fantastique vivier d’innovations thérapeutiques, dont l’exploitation commence à peine…


Chaque jour, des substances étrangères, appelées « antigènes » pénètrent dans notre corps. Il peut s’agir d’une bactérie, d’un virus, d’un parasite, d’un champignon, d’un produit chimique…

Le rôle de notre système immunitaire est de protéger notre corps contre toutes ces substances susceptibles de mettre notre santé en danger.

Le système immunitaire se compose d’un ensemble de cellules et de protéines qui agissent pour protéger l’organisme contre des micro-organismes infectieux, potentiellement nocifs. Il joue également un rôle de défense contre les cellules cancéreuses.

Il se décompose en deux sous-systèmes, le système de défense non-spécifique et le système de défense spécifique.

1. Les mécanismes de défense non-spécifiques

- La défense de première ligne de l’organisme commence par la peau. Celle-ci est une barrière impénétrable pour la grande majorité des agents infectieux, dont la plupart ne pourront pénétrer dans l’organisme que par les muqueuses telles que la bouche, le nez, les yeux…
- La deuxième ligne de défense fait intervenir certains globules blancs, les neutrophiles et les macrophages, qui patrouillent sans relâche dans tout l’organisme. S'ils y découvrent des intrus, ils déclenchent une réaction d’alerte et affluent en masse depuis les voies sanguines pour combattre les agents étrangers et les détruire par phagocytose (capture et ingestion).
- Certaines protéines actives, principalement sécrétées par le foie (compléments), attaquant les bactéries, et l’interféron, qui possède des propriétés antivirales, viennent compléter l’arsenal de défense immédiate.
- Ces défenses non-spécifiques rapidement mobilisables, composent l’immunité innée.

2. Les mécanismes de défense spécifiques

- Si les défenses non-spécifiques ne suffisent pas, les mécanismes de défense spécifique entrent en jeu. - L’organisme procède d’abord à une identification précise de l’intrus, ce qui explique la lenteur de ce système de défense : c’est seulement après cette étape de reconnaissance que la production d'anticorps spécifiques à chaque antigène peut démarrer.
- Les anticorps sont des molécules présentes dans le plasma sanguin et dans la lymphe et se développent lors de réactions avec des antigènes. Quand cette réaction a eu lieu et donc qu'il y a eu production d'anticorps, on dit que l'individu a une immunité acquise.

Comment fonctionne le système immunitaire ?

Notre organisme réagit à une agression par une inflammation : les globules blancs partent en reconnaissance afin d’établir qui est l’ennemi et, ainsi, permettre au corps de préparer la réponse la plus adaptée.

- Interviennent donc en premier lieu, les neutrophiles et les macrophages, chargés de nettoyer le terrain. Lorsqu'ils ne suffisent pas à maîtriser l'infection, d'autres globules blancs plus spécialisés entrent en jeu, les lymphocytes T.
- Le système immunitaire dispose en effet, d’un mécanisme d’"archives" : il garde en mémoire tous les intrus qu’il a déjà combattus antérieurement.
- Quand un nouvel agent pathogène arrive, soit l’antigène est déjà connu et les lymphocytes T spécifiques de cette infection sont envoyés pour le détruire, soit l’organisme doit s’adapter et fabriquer les anticorps qui sauront en venir à bout. Il faut un certain temps avant que les nouveaux anticorps soient prêts : la fatigue, l’inflammation et la fièvre sont des signaux nous informant que l’organisme est en train de combattre un intrus.
- Ce sont les lymphocytes T4 qui donnent l’ordre de la fabrication de ces nouveaux anticorps : par le biais de molécules chimiques, les interleukines (cytokines), ils stimulent les lymphocytes B les lymphocytes T8 et NK (Natural Killers).
- Les lymphocytes B vont secréter de grandes quantités d’anticorps en charge de détruire les sécrétions des cellules infectées.
- Les lymphocytes T8 et les lymphocytes T, « NK, Natural Killers», sont chargés de détruire les cellules infectées.

Comment évolue le système immunitaire au fil du temps ?

Le système immunitaire spécifique n’est pas acquis dès la naissance : il se développe et se complète tout au long de l’existence. Après chaque réaction immunitaire, des cellules-mémoire se créent et assurent une réaction rapide lors de nouveaux contacts avec un intrus déjà connu. Cela explique que le système immunitaire soit plus fort après chaque infection. Le système immunitaire des adultes est donc beaucoup plus développé que celui des enfants, qui n’a pas encore d’«archives ».

Il connaît un fonctionnement optimal pendant la période «adulte » avant de s’affaiblir à nouveau. Les personnes âgées sont plus sensibles aux infections et aux complications qu’elles occasionnent. Elles guérissent également plus lentement. C’est pour cette raison que l’on recommande aux personnes âgées de se faire vacciner contre la grippe.

En quoi consiste l’immunothérapie ?

Le système immunitaire peut se dérégler. Il peut réagir :

1. soit trop fortement en rejetant une greffe de tissu ou d'organe ou en provoquant des états d’hypersensibilité à certains antigènes (allergies),
2. soit trop faiblement, en déployant des défenses trop limitées vis-à-vis d'un microbe en cas de maladie infectieuse,
3. soit de façon inadaptée dans certaines maladies auto-immunes, l’organisme fabriquant alors des anticorps contre ses propres cellules (exemple : sclérose en plaques).

Le but de l'immunothérapie est de stimuler les mécanismes immunitaires c'est-à-dire les réponses immunes quand celles-ci sont insuffisantes, on parle alors d'immunostimulation. Dans certains cas, l'immunothérapie permet de juguler l'immunité, on parle alors d’immunosuppression, quand la réponse immune est excessive ou encore indésirable.

L’immunothérapie a vraiment débuté au cours des années 1960, avec les greffes de moelle osseuse, qui transfèrent des cellules immunitaires (lymphocytes) du donneur au receveur. Les thérapeutiques disponibles se sont accrues, dans le dernier quart du XXe siècle, avec l’isolement de substances produites au cours d’une réaction immunitaire (cytokines) et avec la possibilité de modifier des lymphocytes en dehors de l’organisme.
L’immunothérapie recouvre aujourd’hui une grande famille de solutions thérapeutiques préventives ou curatives faisant appel au système immunitaire des individus.

Quelles sont les différentes stratégies d’immunothérapie ?

On distingue l’immunothérapie passive de l’immunothérapie active.

L’immunothérapie passive, la plus ancienne, a déjà cherché à apporter au malade des anticorps dirigés contre les cellules cancéreuses sur le modèle de la sérothérapie utilisée pour les maladies infectieuses.

- L'utilisation d'anticorps monoclonaux peu spécifiques, obtenus par génie génétique à partir d'une lignée cellulaire unique que l'on appelle le clone, permet aujourd'hui de remplacer efficacement l'injection de sérum qui était obtenu après une immunisation d'un cheval ou d'un lapin contre des lymphocytes T d'origine humaine. Les anticorps monoclonaux sont dirigés contre certains lymphocytes T. qui ont été activés ou contre des cytokines. La technique des anticorps monoclonaux qui permet de produire d’importantes quantités d’anticorps dirigées contre une cellule ou une substance spécifique a permis la mise au point de médicaments efficaces : le trastuzumab pour certains cancers du sein, le rituximab dans les lymphomes, le cétuximab pour les cancers du côlon, l’ipilumab contre le mélanome métastatique.

- À défaut d’obtenir des anticorps spécifiques contre des cellules cancéreuses, on utilise plutôt aujourd’hui des médiateurs immunitaires, moins spécifiques mais qui se montrent efficaces, comme les interférons.

L’immunothérapie active revient à stimuler les propres défenses d’un individu pour l’aider à lutter contre une maladie.

- La vaccination est le procédé d'immunostimulation active spécifique le plus connu. Cette méthode utilisée à titre préventif stimule la fabrication des lymphocytes mémoires autorisant une réponse efficace au moment de l'agression par l’agent identifié.

- Tout aussi active mais moins spécifique, est la désensibilisation des patients allergiques : le traitement consiste à injecter à un patient de très petites quantités d'allergènes (substances susceptibles de provoquer une allergie) afin de susciter chez lui une sensibilisation à l'origine de la fabrication d'anticorps neutralisants.

Quelles sont les pathologies que l’immunothérapie permet de traiter ?

De nombreuses aires thérapeutiques sont concernées : cancer, maladies infectieuses, maladies inflammatoires, maladies de la peau, maladies des os, maladies du système nerveux central, allergies…

Les immunothérapies auront un impact significatif sur quatre aires majeures : les cancers, les maladies infectieuses, les maladies auto-immunes et les transplantations.

L’immunothérapie apparaît donc comme une voie de recherche prometteuse, car elle aborde avec de nouvelles approches des maladies fréquentes et répandues : cancer, maladies chroniques (polyarthrite rhumatoïde, maladie de Crohn, diabète,…). Elle permet de répondre à des besoins de santé publique non couverts car elle apporte des solutions innovantes, agissant en synergie avec d’autres approches.

Comment s’administrent les traitements issus de l’immunothérapie ?

Classiquement les vaccins sont administrés par voie sous-cutanée ou intramusculaire mais d’autres voies sont à l’étude, notamment les voies des muqueuses. Les anticorps ou les cellules sont administrés au moyen d’une injection. Des recherches sur une administration orale sont également en cours.

Quels sont les effets secondaires de l’immunothérapie ?

Les effets secondaires ne sont pas liés à la famille utilisée de médicaments issus de l’immunothérapie mais spécifiques de chacun des produits. Ainsi, l’interféron peut provoquer des troubles oculaires, une sécheresse de la peau, de la fièvre, des courbatures, des troubles du caractère. L’interleukine quant à elle provoque souvent des troubles digestifs ou cutanés. Les désensibilisations peuvent causer les réactions allergiques aigues.

L’immunothérapie est-elle efficace ?

- Les médicaments à base d'interféron bêta ralentissent avec efficacité l'évolution de la sclérose en plaques.
- L’ipilumab prolonge significativement la vie des patients atteints de mélanome métastatique.
- L'immunothérapie contre le venin d'insecte est à ce jour le type le plus efficace d'immunothérapie avec un taux d'efficacité d'environ 98%. Environ 80-85% des gens recevant un traitement d'immunothérapie pour les pollens observeront une amélioration de leur condition. L'immunothérapie a aussi une certaine efficacité reconnue pour le traitement des allergies aux acariens, moisissures, animaux. Toutefois, ce type de traitement ne garantit pas la résolution complète des manifestations allergiques, mais peut avoir des impacts positifs sur la qualité de vie chez la plupart des patients recevant ce type de traitement.

Quels sont les enjeux scientifiques et médicaux liés à l’immunothérapie ?

L’idée d’utiliser le système immunitaire a mobilisé de nombreux chercheurs dans les années 1990. Mais des développements difficiles et non aboutis avaient conduit à un découragement généralisé. Les développements des dernières années ont généré l’élan dont les chercheurs avaient besoin pour mettre au point des traitements plus puissants et les combiner à la fois avec les médicaments traditionnels et d’autres immunothérapies.

23 immunothérapies du cancer sont actuellement en développement.

Publié le 15/02/2012 à 08:01 | Lu 3318 fois