Santé et religion : effet placebo ou intervention divine ? Chronique de Nancy Cattan

Sans remplacer la médecine traditionnelle, la prière pourrait, selon plusieurs études, être un complément utile pour améliorer la guérison. Œuvre de Dieu ou pensée positive ?


Les médecins devraient-ils prescrire des activités religieuses ? Aussi insolite puisse-t-elle paraître, la question était pourtant très sérieusement posée, il y a quelques temps, par la célèbre revue scientifique, le « New England Journal of Medecine ». Si cette revue, qui n’est pas coutumière de publications loufoques, pose cette question, c’est bien parce que les faits observés sont pour le moins troublants.

Plus de mille études, enquêtes, recherches scientifiques ont été répertoriées, regroupées et synthétisées… Toutes démontrent un effet positif de la prière sur la santé. Et pas seulement pour de « petits bobos », mais aussi pour des pathologies très sérieuses puisque les patients étudiés se trouvaient en service de réanimation, de cancérologie, d’infectiologie ou encore de cardiologie. La guérison est plus rapide, les complications moins fréquentes et la durée d’hospitalisation moindre chez les croyants que chez les non-croyants. Idem pour la longévité en général.

Miracle ou télépathie ?
Il ne s’agit pas de prendre ces conclusions au pied de la lettre, certaines études souffrant de biais importants : nombre de sujets étudiés insuffisant, analyse statistique médiocre. Mais, malgré ces critiques, certains travaux lancent d’authentiques défis à la rationalité qui prévaut dans nos sociétés.
Celui qui a fait le plus de remous dans le monde médical est celui d’Harris W. publié dans « Archives of Internal Medecine ».

990 patients atteints de maladies graves et admis en soins intensifs ont été divisés en deux groupes dont un seul allait bénéficier pendant 4 semaines de prières quotidiennes de la part de personnes extérieures. Celles-ci ne connaissaient des patients que leur prénom et la prière consistait à demander à Dieu une guérison sans complications. Résultat : le groupe qui avait bénéficié de prières eut moins de complications et utilisa moins de médicaments. Aucune d’explication scientifique n’a à ce jour été fournie à ce « miracle » observé dans des conditions que tout le monde s’accorde pourtant à dire qu’elle étaient méthodologiquement incritiquables.

De la pensée positive aux neuromédiateurs
Pas d’explication claire aux effets de la prière, mais quelques pistes de réflexion. Le fait de prier pour soi-même ou de savoir que l’on prie pour vous pourrait améliorer l’état de santé grâce à l’intervention de substances dont les noms résonnent de façon bien familière : acétylcholine, sérotonine, noradrénaline, ….

Ces neuromédiateurs sont sécrétés par le cerveau sous l’influence d’émotions, de sentiments ou de pensées. Et ils agissent sur l’ensemble des organes du corps, modifiant l’équilibre de l’organisme. Ils fournissent d’ailleurs une des explications au fait que les sujets dépressifs et stressés sont plus exposés au cancer et aux maladies coronariennes. Sur le même thème, une série d’études a démontré que le rire, les idées positives, les psychothérapies de soutien, l’exercice, la relaxation… améliorent les pathologies même les plus graves comme le cancer.

La prière-placebo
Ces bienheureux et inattendus « effets secondaires » de la prière sont vraisemblablement à rapprocher du célèbre effet placebo* dont aucun scientifique sérieux ne peut nier l’importance : croire que la gélule que l’on prend va être bénéfique, surtout si on vous le dit et que vous en êtes convaincu, entraînera un effet bénéfique, même si ladite gélule ne contient rien d’autre que du sucre ! Le simple fait de croire à un possible mieux-être soulage le stress et réduit l’anxiété. Des idées positives se fraient alors un chemin entre les idées noires et permettent d’envisager l’avenir de façon plus souriante.

Aujourd’hui, des chercheurs s’activent un peu partout dans le monde et surtout aux Etats-Unis, où la plupart des études ont été réalisées, pour préciser la nature des molécules qui interviennent dans ce rapport entre le corps et l’esprit. Dans certaines pathologies dites psychosomatiques, l’effet placebo à lui seul arrive à 30% de bons résultats. Il y a donc un espoir thérapeutique non négligeable dans cette voie de recherche.

L’effet placebo n’exclut cependant pas « l’intervention divine » que les croyants mettront en avant mais pour laquelle la science moderne ne pourra apporter de preuves. À l’instar de l’étude citée plus haut d’Harris W. où l’effet placebo ne peut objectivement intervenir. Si elle est corroborée à d’autres travaux de ce genre, il faudra admettre l’existence télépathique d’ondes, d’énergies qui agissent à distance. La physique quantique nous apportera-t-elle la solution dans l’avenir ?

* Préparation ne contenant aucune substance active, que l’on substitue à un médicament pour évaluer la part du facteur psychique dans l’action de celui-ci.

Santé et religion : effet placebo ou intervention divine ? Chronique de Nancy Cattan
par Nancy Cattan, journaliste santé

Publié le 23/10/2009 à 07:38 | Lu 5722 fois