Résidences seniors : le concept tarde à s’imposer

Selon une récente étude intitulée « L’immobilier des seniors en France : quelles stratégies pour évangéliser un marché à fort potentiel, mais encore sous-exploité ? », réalisée par le cabinet d’analyse indépendant Precepta, le succès des résidences seniors ne serait pas encore au rendez-vous... Voici les principaux enseignements de cette étude approfondie de 320 pages.





Qu’il s’agisse des généralistes (Bouygues Immobilier, Nexity, Kaufman & Broad, Sogeprom, Akerys, etc.) ou des spécialistes (Quiétude, PV Les Sénioriales, Aegide, Les Villages d’Or, etc.), les promoteurs se positionnent progressivement sur le segment des résidences services pour seniors et tentent ainsi de profiter de ce nouvel « eldorado du troisième âge ».

« Le succès tant attendu de ces résidences est toutefois pour le moment très loin des attentes des professionnels en raison de deux grands facteurs explicatifs » estiment les experts de Precepta…

Pour eux, « ce type de logement reste aujourd’hui très onéreux, à la vente comme à la location. Le niveau global des charges est en effet plombé par les multiples services proposés aux occupants (accueil, restaurant, animation, gardiennage, loisirs divers, etc.). Ces services ne répondent en outre pas forcément aux attentes de l’ensemble des résidents du fait des différences d’âge importantes. Au final, le rapport entre le niveau des charges et la valeur ajoutée perçue demeure souvent rédhibitoire pour les clients potentiels ».

D’autre part, « indépendamment du prix, les personnes âgées préfèrent rester à leur domicile tant qu’elles le peuvent. Plus de 90% des aînés vivent ainsi dans un logement traditionnel. De plus, le maintien à domicile bénéficie de l’appui des pouvoirs publics (support des services à la personne, etc.) et des évolutions technologiques (domotique, téléassistance, etc.) ».

En somme, si une fois en résidence le client est fidèle, il demeure en revanche très difficile à capter.

La concurrence entre les résidences seniors est pour le moment faible, caractéristique d’un secteur encore en phase de structuration et dans lequel les bons modèles économiques restent à inventer. Ce segment ne représente aujourd’hui qu’une part infime (moins de 1%) des options résidentielles des personnes âgées :
- Le logement traditionnel en maison individuelle ou en appartement demeure ainsi de très loin, la forme d’habitat la plus courante des personnes âgées. Les barrières pour sortir du logement traditionnel sont très importantes, principalement de nature psychologique et financière.
- Les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, notamment les maisons de retraite et les unités de soins de longue durée (USLD) comptent environ 600.000 places installées, ce qui représente une très faible part du nombre total de seniors dépendants. Plus de 80% d’entre eux logent toujours au sein de leur domicile.
- Regroupant environ 150.000 places installées, les logements foyers sont généralement gérés par le tissu associatif. Ce type de logement relève d’un habitat collectif accueillant des personnes âgées valides ou du moins assez autonomes pour vivre dans un logement indépendant. Les logements foyers se rapprochent des résidences services, mais présentent l’avantage d’être une solution moins onéreuse pour les résidents.

Les trois grands facteurs clés de succès à maîtriser

Pour évangéliser ce marché en devenir, les promoteurs de résidences services seniors devront repenser leurs stratégies en se concentrant sur plusieurs grandes priorités. L’analyse menée par Precepta met ainsi en lumière trois grands facteurs clés de succès que les promoteurs doivent impérativement maîtriser :
1. Affiner la segmentation de la clientèle en amont : par obligation de garantir un seuil minimal de rentabilité, les professionnels ciblent la population la plus vaste possible (allant de 65 à plus de 90 ans). Mais les attentes de ces clients sont trop hétérogènes. Une segmentation plus fine permettra une meilleure adéquation entre les besoins et les services proposés et in fine une plus grande satisfaction générale ;
2. Proposer une offre de services économiquement viable et un mode de paiement équitable : jouer sur le niveau des services proposés dans les résidences seniors, mais surtout sur leur mode de paiement par les copropriétaires constitue l’un des principaux, sinon le principal levier pour faire baisser le niveau élevé des charges. En outre, certains services peuvent être proposés sans être effectivement utilisés, mais restent (injustement) inclus dans les charges. Fournir une offre de services « à la carte » accessibles au gré des envies des occupants et surtout faire payer en fonction des services effectivement consommés, sera ainsi une obligation pour alléger les charges. ;
3. Renforcer les efforts en marketing et en communication : le secteur est caractérisé par un déficit important en matière de communication tant à l’égard des occupants que des investisseurs ou des prescripteurs, rendant l’offre peu visible. Le développement à plus grande échelle du marché ne pourra pourtant se faire qu’avec plus de clarté sur les produits proposés : type de population au sein de la résidence, gamme de services proposés, mode de tarification, avantages fiscaux, etc.

De nombreuses parts de marché restent à prendre

S’il n’est pas le seul, le prix (à la vente ou à la location) est le principal critère de choix d’une résidence seniors pour une personne âgée ou un investisseur. Le prix demeurera en outre de plus en plus stratégique avec la diminution attendue du pouvoir d‘achat des seniors à moyen terme. La sensibilité au prix tendra ainsi à devenir de plus en plus forte au fil des années.

Le manque de structuration du marché et l’absence de « business models » réellement efficients offrent cependant des opportunités. De nombreuses parts de marché restent ainsi encore à conquérir chez les concurrents directs, mais surtout chez les substituts, en tête desquels le logement traditionnel. La prime aux opérateurs qui proposeront une offre réellement différenciante et compétitive sera de facto substantielle.

Article publié le 03/09/2009 à 01:52 | Lu 15444 fois