Plan Alzheimer 2008/2012 : un bilan à mi-étape

En cette 17ème Journée mondiale Alzheimer, le gouvernement fait le point sur le Plan Alzheimer 2008/2012 qui se décline en 44 solutions concrètes étalées sur cinq ans (nous sommes actuellement à mi-parcours), et financées à hauteur de 1.6 milliards d’euros, dont 1.2 milliards pour le volet médico-social. Détails.


21 septembre 2010 : Journée mondiale de la maladie d’Alzheimer

Notre pays connaît une augmentation importante de l’espérance de vie. Cet accroissement de la longévité s’accompagne du développement des maladies liées au vieillissement, comme la maladie d’Alzheimer qui se caractérise par la perte progressive de la mémoire et des fonctions cognitives et s’accompagne de troubles du comportement.

Selon les études épidémiologiques, plus de 800 000 personnes seraient touchées par la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée en France. Parmi ces malades, 450 000 sont suivis médicalement dont 300 000 bénéficient d’une prise en charge au titre de l’affection longue durée.

Au-delà des malades eux-mêmes, les aidants familiaux et l’entourage sont souvent les secondes victimes. Face à cet enjeu de société, il fallait agir à la fois pour les malades mais aussi pour leurs proches. La réponse de l’Etat c’est un plan baptisé « plan Alzheimer » présenté, le 1er février 2008 pour la période 2008-2012. Ce plan traduit un engagement politique fort tant envers les malades que pour leurs proches.

Son objectif : construire un parcours personnalisé pour chaque malade, depuis le diagnostic jusqu’à la prise en charge à domicile et le cas échéant en établissement. Détails.

Les objectifs du plan Alzheimer

Le plan Alzheimer dure 5 ans (2008-2012). Avec ce plan, la personne atteinte de la maladie et son aidant sont placés au coeur de l’action et le système de prise en charge doit s’adapter à eux. Le Plan Alzheimer a trois priorités :

- la recherche : c’est un effort de recherche sans précédent (200 millions d’euros sur 5 ans) pour mettre la France à la pointe de la recherche et trouver ou valider un diagnostic ou un traitement.

- dans le domaine de la santé et de la solidarité (200 millions d’euros pour le soin et 1,2 milliard pour le médico-social) : en attendant de trouver, le plan vise à améliorer la qualité de vie de la personne malade et de ses proches au moment du choc de la découverte de la maladie en favorisant le diagnostic précoce et accompagné ; tout au long de la maladie en renforçant et rendant plus cohérente l’offre de soins et d’accompagnement autour de la personne malade.

- changer le regard sur la maladie en en faisant en enjeu sociétal pour tous.

Où en sommes-nous le 21 septembre 2010, à la moitié du plan ?

Un effort de recherche sans précédent qui porte déjà ses fruits
Il est difficile d’agir pour les malades sans connaître la maladie elle-même. C’est pourquoi le plan prévoit un effort de recherche sans précédent. Cet effort s’appuie sur une fondation de coopération scientifique, la Fondation Plan Alzheimer, qui a pour but d’attirer les meilleurs chercheurs sur les meilleurs projets tout en développant des partenariats avec les acteurs privés.

Créée dès la fin juin 2008, la Fondation Plan Alzheimer (www.fondation-alzheimer.org) se compose :

- d’un comité scientifique mobilisé et volontariste présidé par Joël Ménard, composé des plus éminents scientifiques français et internationaux ;
- d’un conseil d’administration présidé par Philippe Lagayette, regroupant des acteurs des secteurs privés, publics et associatifs ;
- d’une direction générale par Philippe Amouyel et un comité opérationnel composé des douze meilleurs spécialistes du monde scientifique et médical français de l’Alzheimer.

Après une avancée majeure en 2009 avec la découverte de deux nouveaux gènes associés à la maladie, on peut d’ores et déjà dénombrer en 2010 plus de vingt publications internationales majeures auxquelles ont contribué les chercheurs français grâce à la coordination de la Fondation Plan Alzheimer et aux financements du plan.

Ces publications démontrent :

- une couverture des thèmes de recherche majeurs sur la maladie d’Alzheimer, de l’expérimentation animale à la prise en charge des cas avancés, avec des contributions dans les meilleures revues ;
- une augmentation des contributions incluant plusieurs centres français ;
- une augmentation des collaborations internationales dans les travaux français ;
- une persistance et une amplification des points forts français que sont la neuropsychologie et l’épidémiologie ;
- une montée en puissance des nouvelles technologies (génomique, imagerie et biochimie).

Financés à hauteur de 44 millions d’euros par le plan, 92 projets de recherche (fondamentale, clinique, thérapeutique, nouvelles technologies, sciences humaines et sociales) sont en cours. En tout, 67 nouveaux chercheurs ont été recrutés depuis le début du plan. Les instruments de structuration de la recherche se mettent en place : 492 praticiens formés à l’épidémiologie clinique, une banque de donnée mise en place fin 2009 et alimentée déjà par 266 centres et comptant 83 000 patients, des cohortes (population générale, patients (MEMENTO), malades jeunes), un groupe méthodologique d’aide à la recherche (en particulier pour les cohortes et la recherche en sciences humaines sociales), un Centre de traitement automatisé de l’image.

Le diagnostic est accessible partout dans des délais raisonnables

Le plan Alzheimer finalise le maillage du territoire français pour permettre à toute personne qui le souhaite l’accès aisé à un diagnostic plus précoce et mieux accompagné : depuis le début du plan en 2008, 21 consultations mémoire ont été créées, la moitié des centres ont été renforcés. Les deux centres mémoire de ressources et de recherche du Limousin et d’Auvergne ont été créés.

L’offre hospitalière est ainsi de 425 structures hospitalières mi-2010 (dont quelques unes offrent plusieurs points d’accueil). Sur tout le territoire, une consultation mémoire hospitalière ou par un spécialiste libéral est donc disponible à proximité pour chaque Français qui le souhaite. Et le délai d'attente (mesuré en octobre 2009 en consultation hospitalière) se veut « raisonnable » : 51 jours en moyenne, quatre sur cinq donnent un rendez-vous en moins de trois mois.

Une carte permettant de localiser les consultations mémoire hospitalières ainsi que les nouvelles structures créées par le plan est en ligne sur le site du plan www.plan-alzheimer.gouv.fr depuis le 10 septembre. Les recommandations pour l’annonce et l’accompagnement du diagnostic ont été publiées en novembre 2009 ; le dispositif d’accompagnement pour intervenir à domicile dès l’annonce de ce diagnostic sera précisé d’ici la fin de l’année 2010.

Les malades jeunes (de moins de 60 ans) sont confrontés à des problèmes spécifiques de diagnostic tardif, voire d’erreur de diagnostic, de retentissement socio-professionnel ou de prise en charge. Environ 8 000 d’entre eux bénéficient d’un protocole « affection de longue durée » pour une maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée mais tous les patients jeunes ne sont pas identifiés comme tels.

Le centre malades jeunes plan Alzheimer (http://www.centre-alzheimer-jeunes.fr) a été créé en février 2009 : il dispose de correspondants médicaux et médico-sociaux partout en France pouvant répondre aux questions spécifiques posées par ces malades.

Ce centre est devenu la référence régionale, nationale et internationale tant auprès des professionnels
que du public. Les spécialistes adressent de plus en plus les personnes jeunes présentant des troubles évocateurs de la maladie et le nombre de malades vus par le centre augmente (1.804 personnes jeunes présentant des troubles ont été adressées aux centres sur les huit premiers mois de 2010, dont près de la moitié (44%) souffraient effectivement d’une maladie d’Alzheimer ou apparentée). La cohorte de malades jeunes pour la recherche compte 104 personnes incluses.

Les nouvelles structures qui faciliteront le parcours du malade sont en cours d’expérimentation et seront généralisées à partir de 2011 pour changer concrètement la vie de tous les malades et de leurs aidants.

Les dix-sept expérimentations de MAIA -maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer, portes d’entrée unique dans le dispositif de prise en charge Alzheimer, réalisant l’intégration du sanitaire et du médicosocial au plan local et disposant aujourd’hui de 51 coordonnateurs– ont démontré que ce concept novateur constitue effectivement la réponse adaptée pour simplifier le parcours du couple malade/aidant, évaluer et orienter.

Les expérimentations permettent de conclure qu’une MAIA fonctionne sur un territoire infra-départemental, qu’un pilotage local est nécessaire pour atteindre un premier niveau d’intégration sur le territoire et permettre aux gestionnaires des cas complexes d’intervenir efficacement ; la généralisation portera sur 35 MAIA supplémentaires en 2011, 100 MAIA supplémentaires en 2012, soit environ 150 MAIA fin 2012 pour une couverture totale du territoire par 400 à 600 MAIA en 2014.

Même frappée par la maladie d’Alzheimer, une personne doit avoir le libre choix de rester chez elle, dans un environnement qu’elle connaît et où elle a des repères. Pour faciliter la prise en charge à domicile, le Plan prévoit 500 équipes mobiles pluridisciplinaires, composées de professionnels formés à la réadaptation, la stimulation et à l’accompagnement des malades et de leur entourage dès le début de la maladie. Ces équipes sont une réalité aujourd’hui. Elles sont actuellement expérimentées avec succès auprès de 40 Services de Soins Infirmiers à Domicile (SSIAD). D’ici la fin de 2010, 127 nouvelles équipes démarreront leur activité.

Parce qu’ils sont contraints de veiller constamment sur les malades, les aidants sont soumis à une pression permanente. Il existe des structures qui leur permettent de « souffler » quelques heures en offrant par ailleurs une prestation thérapeutique aux malades pendant une ou plusieurs demi-journées. Les créations de places d’accueil de jour sont poursuivies par le plan Alzheimer (environ 1000 places ont été créées chaque année).

La décision de structurer davantage l’offre pour améliorer sa qualité a été prise en février 2010, en conditionnant le financement des accueils de jour au respect d’une norme d’activité (6 places minimum pour un accueil adossé à un établissement d’hébergement et 10 places minimum pour un accueil autonome) et à la mise en oeuvre d’une solution pour le transport des malades (ou à défaut une atténuation du tarif pour les familles organisant elles mêmes le transport). Le forfait journalier « transport » des accueils de jour a par ailleurs été revalorisé de 30% en 2010. Un outil de suivi en ligne rempli directement par les accueils de jour va permettre de mesurer les progrès réalisés.

Afin d’élargir l’offre pour répondre aux besoins très divers des malades et des aidants, 11 plateformes d’accompagnement et de répit sont en cours d’expérimentation. Elles réunissent une variété de services tels que l’accueil de jour mais aussi le répit à domicile, la garde de nuit, l’hébergement temporaire, l’accueil familial, les séjours de vacances, les activités culturelles, physiques ou artistiques, les ateliers de réhabilitation ou de stimulation sensorielle.

18 projets de répit innovants (baluchon, art-thérapie, séjours vacances…) ont été sélectionnés : l’accompagnement méthodologique dont ils vont bénéficier permettra de dire comment ces solutions sont modélisables et généralisables. Pour intégrer la généralisation des plateformes, les objectifs du plan pour les accueils de jour (11.000 places d’accueil de jour en cinq ans soit 2.200 places par an) sont transformés à compter de 2011 en 1.200 places d’accueil de jour annuelles et 75 plateformes équivalant à 1.000 places par an.

Aider les proches, c’est également les former afin qu’ils ne soient pas démunis face aux symptômes de la maladie : deux jours de formation par an sont ainsi proposés à chaque aidant familial ; depuis novembre 2009, France-Alzheimer a formé 150 binômes de formateurs et 87 actions de formation ont déjà eu lieu (soit 1.000 aidants déjà formés).

D’ici fin 2010, 283 actions devraient avoir été réalisées, soit environ 2.420 familles aidées. Lors de crises qui nécessitent une hospitalisation, afin d’éviter un passage par de nombreux services hospitaliers qui fragilise ces patients, 120 unités spécialisées vont être créées d’ici 2012 dans les hôpitaux, en service de soins de suite et de réadaptation. Trente-cinq fonctionnent déjà au 17 septembre 2010. Il arrive également que le maintien à domicile ne soit plus possible, ni même souhaitable devant l’aggravation des troubles du comportement, ce qui nécessite une prise en charge en établissement.

Face à de telles situations, il faut continuer à adapter les établissements pour une meilleure prise en charge des malades : d’ici 2012, pour les malades présentant des troubles du comportement modérés 25.000 places dans des pôles d’activité et de soins adaptés (PASA de 12 à 14 places) vont être labellisées ainsi que 5.000 places en unités d’hébergement renforcées (UHR de 12 à 17 places) pour les malades présentant des troubles plus sévères.

Les premiers pôles de prise en charge des troubles du comportement en établissements (PASA et UHR) vont être labellisés dans chaque région : l’objectif annuel pour 2010 et pour les deux années suivantes est de 600 PASA et plus de 100 UHR. Déjà 532 dossiers de PASA et 301 dossiers d’UHR ont été soumis aux agences régionales de santé. 58 projets de PASA ont été validés et vont ouvrir prochainement.

La mise en oeuvre concrète de ces solutions suppose la participation de professionnels formés. La formation d’assistants de soins en gérontologie (ASG, nouvelle fonction créée par le plan), a démarré en septembre 2010. 51 nouvelles places en écoles de psychomotriciens et d’ergothérapeutes ont été ouvertes à la rentrée 2010 et s’ajoutent aux 189 nouvelles places créées en 2009 et 69 ouvertes en 2008.

Grâce aux travaux de la Haute Autorité de Santé (HAS), on dispose maintenant d’un premier indicateur « qualité » de la prise en charge : la prescription de neuroleptiques. Ces médicaments délétères pour les malades reflètent une mauvaise prise en charge des troubles du comportement et constituent une mauvaise réponse à un vrai problème. En 2009, 15,7% des malades (contre 16,1 en 2008 et 16,9 en 2007) sont sédatés par ce type de traitements ; l’objectif est de baisser à 5%, par l’amélioration de la qualité de la prise en charge et de la qualité de vie des malades.

La lutte contre la maladie d’Alzheimer est devenue un enjeu de société

La maladie d’Alzheimer est encore stigmatisante en France. Le plan Alzheimer vise ainsi à mieux informer le grand public, à promouvoir une approche éthique, et à inscrire cette politique dans un contexte européen. La synthèse des enquêtes réalisées par l’INPES auprès de la population générale, des malades et de leurs aidants familiaux et des aidants professionnels du domicile seront publiées et diffusées auprès de la presse professionnelle aujourd’hui.

Au niveau local, après les assises régionales tenues en 2009, les agences régionales de santé créées en 2010 ont chacune nommé un référent Alzheimer, relai indispensable pour la mise en oeuvre concrète des solutions sur le terrain. Un dispositif de numéro de téléphone unique est mis en oeuvre du 15 septembre au 1er octobre 2010 grâce à la coopération de France-Alzheimer et Prémalliance. Il devrait permettre une prise en charge des appels entre 14h et 22h. Ce dispositif fera l’objet d’une évaluation qui permettra ensuite de faire avancer la solution 35 du plan.

Concernant la démarche éthique, pour des raisons opérationnelles, la gestion de l’EREMA, l’espace de réflexion éthique sur la maladie d’Alzheimer, précédemment assurée depuis février 2009 par le Centre hospitalier universitaire de Reims va être confiée à l’équipe sous la responsabilité de l’Espace éthique de l’assistance publique–Hôpitaux de Paris qui était la deuxième candidate ayant répondu à l’appel d’offres de septembre 2008.

Un nouveau colloque sera organisé en 2011.

Au niveau européen, à la suite de la conférence organisée par la France dans le cadre de la Présidence française de l’Union européenne en octobre 2008, la lutte contre la maladie d’Alzheimer est devenue un enjeu européen. L’Union européenne a adopté en juillet 2009 une initiative qui fixe quatre priorités : le diagnostic précoce, l’épidémiologie, l’éthique et l’échange de bonnes pratiques. Une action conjointe pilotée par la France est en cours avec 17 autres Etats-membres volontaires sur ces priorités.

Concrètement en matière de recherche, la lutte contre les maladies neuro-dégénératives et en particulier la maladie d’Alzheimer est devenue un sujet pilote pour la programmation conjointe européenne de recherche : sous la présidence de la France, 25 pays allient désormais leurs forces pour vaincre ce fléau qu’est malheureusement encore la maladie d’Alzheimer.

Publié le 21/09/2010 à 12:12 | Lu 2884 fois