Petit Dictionnaire Absurde & Impertinent de la médecine et de la santé

Les éditions Féret viennent de publier Petit Dictionnaire Absurde & Impertinent de la médecine et de la santé de Marc Lagrange, chirurgien et épicurien qui signe ici un ouvrage plein d’humour. En 144 page et 9.90 euros, l’auteur aborde de nombreux aspects historiques et culturels de la santé avec un humour parfois cinglant, souvent impertinent, mais finalement… pas si absurde que cela.


On ne va pas se voiler la face, en vieillissant, la santé se dégrade et les visites chez le médecin se multiplient. Afin de faire face à cet état de fait, essayons de le faire avec humour… D’autant que le rire est excellent pour la santé !
 
À travers les définitions de 150 mots (voir extraits ci-dessous), l’auteur Marc Lagrange, un chirurgien autant passionné par les maux que les mots, vous fait découvrir le monde de la médecine et de la santé avec une impertinence salutaire. De l’Académie aux zygomatiques en passant bien sûr par chirurgien, rien ne manque.
 
Avec ce Petit Dictionnaire… l’auteur revient à ses chères études et à son univers professionnel en portant un regard aiguisé, non sans malice, sur ce monde qu’il connaît bien. Pratiques obscures, maladies bizarres, gouffre de l’assurance maladie, professionnels et institutions, le scalpel du spécialiste n’épargne personne. Et il sait de quoi il parle !
 
Un livre à mettre d’urgence entre toutes les mains, des biens portants comme des malades. Dommage qu’il ne puisse pas être remboursé par la Sécurité sociale. Cet ouvrage est illustré par Ricor,  un dessinateur français qui a fait ses preuves au sein des journaux nationaux comme L’Express, Le Figaro Magazine, Paris Match, etc. Ce livre est disponible dans les bonnes librairies francophones. 

Extraits du livre

CHIRURGIEN
n. m.
Zorro de la médecine, qui se cache toujours derrière son masque.
 
Encycl.
Autrefois, le chirurgien s’appelait barbier, reconnaissable au XVIe siècle à son bonnet carré dont le référent se nommait Ambroise Paré, père des chirurgiens-barbiers. Roi de l’amputation, il bénéficiait pour son activité coupable de l’alcool, anesthésiant d’opérette, et de quatre solides gaillards, aides anesthésistes de fortune, généralement trouvés sur le champ de bataille.
 
Sous Napoléon, on remarque une grande avancée chirurgicale. Lors des raccourcissements, le blessé devait serrer très fortement et avec une grande conviction antalgique une pipe en terre. La chute, suivie de la fracture fatale, de la bouffarde coincée entre les dents de l’opéré en début d’intervention signalait la mort de l’intéressé. D’où l’expression « casser sa pipe ». Quant au billard, synonyme moderne de la table d’opération, le mot trouve son origine avec la chirurgie foraine. En effet, il n’existait aucun autre lieu horizontal fonctionnel et convenant, à domicile, pour opérer le jeune paysan d’une appendicite au château ou césariser la bonne des chics demeures bourgeoises.

La chirurgie, métier de passion au contexte médico-légal devenu pesant, dissuade de plus en plus les jeunes internes. Il nécessite la formation technique la plus longue (32 ans en moyenne avant de gagner son autonomie), pour l’exercice professionnel le plus court (33 ans).
 
Cit.
La grande différence entre un chirurgien et Dieu, c’est que Dieu, lui, ne se prend pas pour un chirurgien.
 
 
GÉNÉRALISTE
n. m. ou f.
Espèce médicale en voie de disparition.

Encycl.
Le généraliste, c’est l’éternel médecin de famille, officiant en ville ou à la campagne, par principe débordé. Il attire et concentre par son titre respectable de « docteur » toutes les doléances de son prochain, de ses voisins au sens large et de la meilleure amie de sa femme en particulier.

Plaque tournante du système de soins, le généraliste assure aussi un maximum sur le plan humain. Son ministère requiert une patience au-delà de ce que la faculté lui a enseigné, car la vie n’est pas qu’un long fleuve tranquille. Il est la véritable assistante sociale de son quartier ou de son village, rôle qu’il partage avec le maire. Parfois, le cumul des fonctions lui fait porter une double casquette, édile municipal et « docteur », ce qui l’oblige à rester vigilant, disponible et aimable vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Vous avez dit maso ?

Quand il touche aux limites de son incompétence, il envoie son patient muni d’une lettre de moins en moins personnalisée, mais de plus en plus lisible, chez son cher confrère, le spécialiste. Botte en touche quand il en a ras-le-bol des hypocondriaques.

La réforme (laquelle ?) précise qu’un médecin généraliste s’appelle désormais un spécialiste en... médecine générale. Merci les énarques. Tous les généralistes sont donc des spécialistes. Dieu reconnaîtra les siens, si tant est qu’il ait bien pris tous ses médicaments.
 
Cit.
Avant, on reconnaissait le généraliste parce qu’il possédait la plus belle maison du village. Aujourd’hui, on le reconnaît surtout parce qu’il a quitté le village.
 
GREFFE
n. f.
Truc bien pratique pour continuer à vivre à peu près normalement. La greffe est l’apport sur le receveur d’un matériel vivant (autoplastie) appartenant au malade lui- même, ou à son voisin (allogreffe) afin de réparer un organe défaillant anatomique (greffe de visage) ou fonctionnel (greffe de cœur).

La liste d’attente est longue –plusieurs mois– pour certaines greffes, foie et cœur en particulier. Certaines peuvent bénéficier d’un donneur vivant, ami ou familial, qui cède un organe (rein) ou sa moitié (foie). Donner son cœur de son vivant reste une expérience à tenter. Mais on ne le fait qu’une fois.

Cit.
L’humanité aura fait d’immenses progrès le jour où l’on aura mis au point la greffe de cerveau.
 
RHINOPHIMA
n. p.
Appendice nasal surdimensionné, hésitant entre le topinambour et la truffe du Périgord, pour la forme, la betterave et le chapeau de cardinal pour la couleur. Il s’agit de la forme clinique maximale de la rosacée, avec un nez parcouru de varicosités roses ou violacées, sur un fond rougeâtre. Il résulte, le plus souvent, mais pas toujours, d’un amour exagéré des boissons alcoolisées. Beaucoup plus rare, en revanche, chez le buveur exclusif de jus d’orange.
 
VOCABULAIRE MÉDICAL
gr. n. m.
Charabia professionnel abscons, élitiste. A priori, le vulgum pecus ne comprend pas les fines nuances de ce parler, ciment de ces praticiens, bien souvent aussi latinistes.

Encycl.
Heureusement, certains mots, à défaut de signification profonde pour les hommes de l’Art, masquent leur propre ignorance des maladies, de leur physiopathologie. À les entendre gloser, on peut lire ou entendre, au fil des communications écrites ou orales, des mots comme idiopathique, cryptogénétique, etc. Il s’agit d’une forme de logorrhée permettant le secret partagé entre fils d’Hippocrate, rappelant le fameux galimatias des médecins de Molière.

On ne fait pas dix ans d’études que pour parler couramment le docteur, agacer les uns (malades, administration hospitalière), ravir les autres (chers confrères) et étonner les troisièmes (parents, amants, maîtresses, élèves). L’auteur s’efforce, dans cet ouvrage d’utiliser un langage clair, une sémantique facile, afin que les propos ne soient ni capillotractés, ni gonadoclastes.

Publié le 01/06/2016 à 14:01 | Lu 3447 fois