Mars bleu : pour en savoir plus sur le cancer colorectal (partie 3)

Le 29 mars est LA Journée nationale de lutte contre le cancer colorectal. A cette occasion, la fondation A.R.CA.D (Aide et Recherche en CAncérologie Digestive) va organiser jusqu’à la fin du mois de mai dans onze grandes villes, des rencontres et des échanges entre patients, accompagnants et soignants dans le cadre de ses 4e Forums-Patients. Partie 3 : prise en charge et traitements du cancer colorectal.





Prise en charge du cancer colorectal : du diagnostic au traitement…

Le diagnostic de cancer colorectal repose sur la coloscopie totale. Cet examen réalisé par le gastroentérologue permet à la fois de visualiser la tumeur mais aussi de réaliser des prélèvements de tissus atteints (ou biopsies), pour procéder à un examen anatomopathologique (examen histologique au microscope), et même l’exérèse (ou ablation) de polypes.

Réalisé en général sous anesthésie légère, cet examen se fait à l’aide d’un endoscope, appareil constitué de fibres optiques souples. Il possède en général une source lumineuse, voire une mini-caméra connectée à un écran vidéo et des instruments permettant de réaliser des prélèvements ou une ablation.

D’autres techniques de diagnostic, évitant l’introduction d’un instrument dans l’intestin, sont encore en cours d’évaluation, comme l’utilisation du scanner ou la radiographie avec produit de contraste. La coloscopie virtuelle par scanner permet de visualiser un cancer ou un polype, mais ne permet pas de prélèvement. Elle nécessite souvent la préparation de l’intestin. En revanche, elle évite les exceptionnelles complications de la coloscopie et l’anesthésie générale. La radiographie avec produit de contraste est un examen moins performant que la coloscopie virtuelle car il ne permet pas de dépister les petites anomalies. Cela dit, il peut être utile en cas d’occlusion, combiné le plus souvent avec un scanner.

Le diagnostic de certitude est établi par un examen anatomopathologique de la tumeur prélevée lors de la coloscopie. Un bilan d’extension radiologique (radiographie-échographie et/ou scanner) est alors réalisé afin d’évaluer le stade de la maladie (présence ou non de métastases).

Traitements

- La chirurgie reste le traitement de référence des cancers colorectaux. Son but est double : ôter la tumeur (exérèse) et préciser le stade d’évolution du cancer. On va pour cela enlever la partie de l’intestin concernée avant d’en rétablir la continuité, soit par chirurgie classique, soit si possible par coelioscopie. Après avoir distendu la paroi abdominale avec du gaz carbonique, le chirurgien intervient à l’aide d’une caméra et d’instruments longs, introduits par des petits orifices pratiqués sur l’abdomen. Lorsque la chirurgie par coelioscopie est envisageable, elle permet d’améliorer sensiblement la qualité de vie des patients (moins de douleurs post-opératoires, petite cicatrice, temps d’hospitalisation réduit…).

- La chimiothérapie est utilisée en préparation ou en complément de la chirurgie et parfois seule dans les stades les plus avancés de la maladie. Ce traitement médicamenteux consiste à détruire les cellules tumorales soit en agissant directement sur la cellule, soit en la privant des éléments qui lui sont essentiels pour se multiplier.
Lorsque la chimiothérapie est administrée pour prévenir une rechute, le traitement est dit adjuvant. Il concerne des cancers curables et opérés.

Pour les cancers en stades avancés (stades IV) présentant déjà des métastases, la chimiothérapie a parfois pour objectif de faire régresser la tumeur afin de permettre dans un second temps l’intervention chirurgicale. Dans certaines situations plus avancées, le traitement ne permettra pas à l’intervention de se dérouler, mais il pourra permettre de stopper la progression du cancer. On parle alors d’une chimiothérapie palliative Différentes chimiothérapies sont utilisées dans le traitement du cancer colorectal et sont administrées, selon les cas, par voie intraveineuse en perfusion ou par voie orale sous forme de comprimés :

- Les médicaments dits « antimétabolites » privent les cellules malignes des moyens de se diviser (inhibition de la fabrication des protéines et de la réplication de l’ADN), provoquant ainsi leur mort. Les cellules malignes sont d’autant plus sensibles à cet effet que contrairement aux cellules normales, elles sont constamment en état de multiplication. Les plus utilisés sont le 5-fluorouracile, la capécitabine et dans une moindre mesure, l’uracile-tegafur et le raltitrexed. Leur effet est potentialisé par la vitamine B9, ou acide folinique (à ne pas prendre en dehors du traitement).

- L’oxaliplatine. Ce dérivé du platine agit sur l’ADN de la cellule cancéreuse en créant des ponts inter ou intra-brins qui empêchent sa réplication et le casse, entraînant la perte de la cellule maligne.

- L’irinotecan. Ce traitement inhibe la topo-isomérase 1, une enzyme indispensable à l’ADN de la cellule cancéreuse pour réparer les cassures produites par l’enroulement du brin d’ADN lors de sa réplication, provoquant là-aussi la mort de la cellule maligne.

- De nouveaux types de médicaments très prometteurs sont actuellement utilisés, appelés « thérapies ciblées ». Comme leur nom l’indique, contrairement aux chimiothérapies traditionnelles, ces thérapies n’agissent que sur les cellules cancéreuses et sont donc mieux tolérées par l’organisme (moins d’effets secondaires).

- Les anticorps monoclonaux sont spécifiquement dirigés contre des récepteurs (membranaires ou circulants) ou des facteurs de croissance afin d’empêcher ainsi la transmission des signaux de prolifération (multiplication) au niveau des cellules cancéreuses. Tous ont administrés par voie intraveineuse, le plus souvent associés à une chimiothérapie.

Trois anticorps sont actuellement utilisés pour traiter le cancer colorectal :

- Le bevacizumab. En empêchant la vascularisation nécessaire à la croissance des tumeurs, il a montré son efficacité en traitement de première et de seconde intention du cancer colorectal métastasique.

- Le cetuximab. Cet anticorps dirigé contre le récepteur d’un facteur de croissance des cellules cancéreuses s’avère inefficace si la tumeur possède une mutation du gène Kras, situation retrouvée dans un tiers des cas. Il est disponible pour traiter les cancers métastatiques du cancer colorectal en cas d’échec d’un premier traitement.

- Le panitumumab. Dirigé contre le même facteur de croissance que le cetuximab, il a lui aussi fait la preuve de son efficacité en l’absence de mutation du gène Kras chez des patients dont la tumeur aurait échappé à la chimiothérapie.

D’autres molécules sont en cours de développement. Il s’agit principalement d’inhibiteurs des enzymes intervenant sur des voies de signalisation intracellulaire.

- La radiothérapie (émission de rayons sur la tumeur) est également utilisée dans le traitement de certains cancers colorectaux, notamment lorsqu’ils touchent le rectum, le plus souvent en association avec la chirurgie et la chimiothérapie. Son objectif ? Irradier précisément la tumeur en détruisant les cellules cancéreuses tout en préservant au maximum les cellules des tissus sains afin de diminuer le risque d’échec de la chirurgie.
(récidive locale de la tumeur). Plusieurs études ont montré qu’elle permettait de réduire de 30 à 50% le risque de récidives dans le petit bassin, améliorant ainsi la survie de manière significative.

Choix du traitement : les Réunions de Concertation Pluridisciplinaires ou RCP

La stratégie thérapeutique à adopter dépend, bien entendu, des caractéristiques du cancer (localisation, type, stade), mais elle prend aussi en compte les données personnelles du patient (âge, antécédents médicaux et chirurgicaux, état de santé global) ainsi que son avis et ses préférences.

Elle s’appuie également sur des recommandations de bonne pratique. Ces outils d’aide à la décision, destinés à guider les professionnels de santé, sont élaborés à partir de l’avis d’experts et des données des essais cliniques.

Enfin, la prise en charge relevant de plusieurs spécialités médicales, la situation de chaque patient est discutée au cours d’une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP). Y participent au moins trois médecins de spécialités différentes : spécialiste de l’organe touché par le cancer, chirurgien, oncologue médical, oncologue radiothérapeute, pathologiste…

La consultation d’annonce

La proposition de traitement établie en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire est discutée avec le patient lors d’une consultation spécifique, appelée consultation d’annonce. Lors de cet entretien, le médecin chargé du patient lui explique les caractéristiques de sa maladie, les traitements proposés, les bénéfices attendus et les effets secondaires possibles. Il peut également être conduit à lui proposer d’intégrer un essai clinique.

Cette consultation est importante. Il peut être utile qu’un de ses proches accompagne le patient. Ce dernier doit prendre le temps de poser toutes les questions qu’il se pose et s’assurer qu’il a bien tout compris. Une fois l’accord donné sur la proposition de traitement, celle-ci se concrétise dans un document appelé Programme Personnalisé de Soins (PPS). Il comporte les dates des différents traitements, leur durée, ainsi que les coordonnées des différents membres de l’équipe soignante. Il peut évoluer au fur et à mesure de la prise en charge en fonction de l’état de santé du patient.

À l’issue de cet entretien, une consultation avec un autre membre de l’équipe soignante, le plus souvent un(e) infirmier(e), est proposée au patient et à ses proches. Ce rendez-vous permet de revenir sur les informations données par le médecin, de se les faire expliquer à nouveau, de poser d’autres questions. Il est également possible de rencontrer un(e) psychologue, un(e) diététicien(ne), une assistante sociale.

Article publié le 21/03/2012 à 10:00 | Lu 1671 fois