Lombalgie : cinq questions au docteur Patrick Sichère, rhumatologue

Fausses croyances, nouvelles prises en charge, réponses thermales… Que faire lorsqu’on souffre de la région lombaire, donc du bas du dos ? Quelles fausses croyances empêchent l’amélioration des douleurs ? Comment empêcher la chronicité ? Quelle place pour la cure thermale dans l’arsenal thérapeutique ? Réponses avec Patrick Sichère, rhumatologue, médecin consultant du groupe Thermes Adour et président du CLUD (comité de lutte dont la douleur) des hôpitaux de Saint-Denis.





Il existe plusieurs formes de lombalgie. À quels signes cliniques le patient peut-il identifier la sienne ?
Docteur Patrick Sichère : l’important est de préciser les circonstances de survenue de la douleur lombaire.

Une douleur nocturne, qui réveille ou qui s’accompagne d’un dérouillage matinal, de début progressif, notamment chez un sujet jeune ou au contraire chez un sujet âgé de plus de 60 ans, doit faire rechercher une cause.
 
Dans ce contexte, il faut consulter le médecin pour qu’il pose un diagnostic précis, éliminer une maladie inflammatoire de la colonne lombaire ou du bassin, une infection voire une tumeur.
 
Mais le plus souvent, le contexte est clair : celui d’une douleur déclenchée par un faux mouvement, de torsion, ou un effort de soulèvement d’un objet lourd, ou par une activité inhabituelle, jardinage ou bricolage par exemple.
 
Le problème est plutôt mécanique et met en cause des ligaments, des articulations entre les vertèbres, un disque qui risque de faire hernie en arrière et de comprimer des nerfs.
 
Quelles sont les nouveautés pour leur prise en charge ?
Docteur Patrick Sichère : ce qui est nouveau c’est de ne pas se contenter de tout mettre sur le compte d’un pincement discal entre deux vertèbres. Par exemple, se rappeler qu’une souffrance des articulations entre les vertèbres peut se mêler à une atteinte myo-fasciale ou discale ou psychogénique chez un même lombalgique.
 
Donc préconiser une prise en charge multiple et complémentaire, pluridisciplinaire. Dans ce contexte, une radiographie simple du rachis et du bassin se révèle suffisante. Elle encombrera moins l’esprit du patient que l’imagerie par IRM laquelle montrera presque toujours des images faussement pathologiques.
 
Malgré la progression dans la qualité de l’imagerie, la faiblesse de la corrélation entre les lésions objectivées et le syndrome douloureux reste toujours d’actualité.
 
Donc l’interrogatoire et l’examen clinique restent essentiels pour préciser au mieux l’origine de la souffrance. Une fois la période aigüe passée, chercher à prévenir ou à changer les habitudes. Renforcement musculaire, activité physique régulière s’imposent. Le mouvement est un traitement antidouleur !
 
Dernière nouveauté, une étude française, publiée en 2021, démontrant que l’ostéopathie n’apportait pas de bienfait dans la lombalgie chronique.
 
Quelles sont les fausses croyances qui empêchent l’amélioration des douleurs ?
Docteur Patrick Sichère : la première fausse croyance est de penser que le repos va soulager la douleur. En cas de lumbago, il ne doit pas excéder 48 heures. Au-delà de 8 jours d’arrêt des activités, non seulement la situation ne s’améliore pas mais la douleur tend à s’installer durablement. Il n’y a pas de contre-indication à la pratique du sport.

Par exemple, la course à pied n’est pas interdite d’autant que le corps dans son ensemble, et notamment les articulations, participent à l’absorption des chocs lors du déroulement du pas. Souvenons-nous qu’à l’époque où le déplacement se faisait à cheval, on ne parlait pas de mal du siècle à propos des douleurs du dos !
 
Autre fausse croyance : « j’ai de l’arthrose, donc il n’y a rien à faire ! ». Or l’arthrose non traitée peut devenir un véritable handicap au retentissement non seulement physique mais aussi moral. L’arthrose relève de plusieurs facteurs reconnus qui justifient donc des traitements complémentaires.
 
Comment empêcher la chronicité ?
Docteur Patrick Sichère : en luttant contre la sédentarité par l’activité physique régulière, on agit contre l’obésité, facteur d’arthrose. Il faut aussi traiter les troubles du sommeil. Un mauvais sommeil est source de douleurs et de contractures.

Prévenir le stress par la distraction, en se faisant plaisir, en s’aidant éventuellement de l’hypnose, de la relaxation ou en pratiquant la méditation en pleine conscience entre autres prises en charge.
 
L’objectif est de ne plus subir ! Traiter l’arthrose ou la douleur chronique qui est reconnue comme véritable maladie depuis janvier 2022, est désormais possible !
 
A quel stade de la lombalgie la cure thermale est-elle une réponse thérapeutique efficace ?
Docteur Patrick Sichère : dès qu’une douleur tend à s’installer, à persister malgré un traitement bien conduit, la cure thermale est indiquée. Elle permet d’emblée une coupure avec le milieu environnant familial, professionnel, de stress.
 
Ces trois semaines permettent de bénéficier de soins qui soulagent les douleurs (boues, balnéothérapie), d’une prise en charge complémentaire permettant de changer ses habitudes de vie pour continuer à maintenir le bénéfice une fois de retour chez soi.
 
Par exemple l’équipe thérapeutique du groupe Thermes Adour à Dax organise des ateliers d’éducation thérapeutique sur le sommeil, l’activité physique, la prise médicamenteuse, la relaxation. Résultat : réduction de dépendance aux médicaments, activité physique maintenue à 1 an chez 87% de patients douloureux.
 
Par ailleurs la cure thermale est un traitement de l’arthrose. La preuve en a été donnée par l’étude Thermarthrose. Elle est un traitement de la douleur, preuve apportée par l’étude Fiett en cours de publication.

Article publié le 04/03/2022 à 01:00 | Lu 2893 fois