Les enjeux médico-économiques de l'ostéoporose en France

En France, en 2010, le fardeau économique des fractures de fragilité a été estimé à 4,8 milliards d’euros, dont 2,5 pour les seules fractures du col du fémur ; les deux-tiers des coûts concernaient les soins de la première année suivant la fracture, un gros quart (27%) les soins à long terme (handicap), et 7% le traitement pharmacologique.


Compte tenu des projections démographiques pour 2025, un tiers de la population aura 60 ans ou plus, soit vingt millions de personnes, correspondant aux âges de la génération du baby-boom, le nombre de fractures incidentes passera de 376.000 (femmes et hommes en 2010) à 491 000 (2025), entraînant une augmentation des coûts de 26%.
 
Le Pr Robert Launois, économiste de la santé, Directeur du Réseau d’évaluation en économie de la Santé France, revient sur cette problématique. L’ostéoporose est sans conteste une maladie qui est extrêmement couteuse pour la collectivité ; les chiffrages varient suivant les études en fonction des lignes budgétaires qui sont retenues pour procéder à leurs estimations.
 
Selon un étude de la CNAMTS de 2016 qui s’en tient aux dépenses reconnues et remboursées par l’assurance maladies, le coût de la prise en charge de l’ostéoporose s’élevait en France en 2013 à 1,1 milliard d’euros dont 770 millions étaient dues à des hospitalisations dans des services de médecine chirurgie obstétrique et 340 millions suite à l’accueil dans des soins de suite et de réadaptation.
 
Lorsque le périmètre des postes budgétaires à prendre en compte est élargi pour intégrer les placements en EHPAD et la valorisation monétaire des pertes de qualité de vie qui sont associées aux fractures, le coût de l’ostéoporose en France s’élève alors selon Svedbom à 4,8 milliards d’euros.
 
L’ostéoporose est une maladie sous diagnostiquée et sous traitée ; avant leur hospitalisation pour fracture, seuls 3% des patients s’étaient vus prescrire une ostéodensitométrie osseuse et seulement 12% d’entre eux avaient bénéficié d’un traitement pour ostéoporose. Sous-diagnostiquée, cette pathologie est également sous-traitée : après une hospitalisation pour fracture, 51% des patients ne revoient aucun médecin dans le mois qui suit et seuls 15% des patients font l’objet d’un traitement pour l’ostéoporose avec pour conséquences, la ré-hospitalisation pour rechute de 29% d’entre eux.
 
La cascade fracturaire entraîne non seulement des coûts non négligeables pour notre système de santé, mais elle est surtout dangereuse et douloureuse pour le patient. Face à cette réalité et après la publication de recommandations par la HAS en 2007, la CNAMTS a pris des mesures pour faciliter l’accès à l’ostéodensitométrie osseuse des populations à risque. Mais en dépit de ces efforts, le nombre d’ostéodensitométries prescrites chaque année continue de baisser.
 
La raison en est simple, une prise en charge efficace de l’ostéoporose exige une intégration de la prévention et du soin au sein de filières fractures dédiés et de réseaux de soins coordonnés. Et le jeu en vaut la chandelle ! La CNAMTS sait que c’est la clé d’une prise en charge au final beaucoup plus efficiente de l’ostéoporose, compte-tenu des coûts directs et indirects qu’elle entraîne. Il faut dès maintenant réfléchir à la mise en place d’un plan de santé publique pour la prévention de l’ostéoporose.
 
Les Etats Généraux ont révélés que la prise en charge de l’ostéoporose aujourd’hui en France était… catastrophique. Comme le souligne le Docteur Laurent Grange, médecin rhumatologue au CHU de Grenoble Alpes et Président de l’AFLAR : « entre 2010 et 2014, le nombre de patients traités est passé de 1,1 million à 800.000 en quatre ans soit une diminution de 380.000 patients traités. Ce déficit de prise en charge s’explique, on l’a vu, par un désinvestissement des patients, induit notamment par un déni général de la réalité de cette maladie, associé à la diffusion d’informations erronées sur la dangerosité des traitements. »

​7 propositions prioritaires pour une meilleure prise en charge de l’ostéoporose en France

1. De l’ostéoporose à la fracture : Changer de paradigme – Campagnes de sensibilisation
2. Développer les stratégies de prévention primaire des fractures de fragilité
3. Dévempper les stratégies de prévention secondaire des fractures de fragilité « pour que la 1ère fracture soit la dernière ! »
4. Promouvoir des mesures incitatives pour les médecins généralistes dans la prise en charge de l’ostéoporose.
5. Promouvoir et soutenir un plan de recherche public-privé médico-économiques face aux enjeux du coût de la « cascade fracturaire » et de l’expérimentation de filières de soins pluridisciplinaires innovantes
6. Promouvoir la prévention des chutes et le maintien à domicile des personnes à risque de fracture ostéoporotiques
7. Créer un registre national des fractures de l’ostéoporose (débuter par une expérimentation sur une ou deux régions)

Publié le 20/10/2017 à 09:33 | Lu 8345 fois