Les cas de démence d’ici 2030 : le point avec l’Inserm

Les cas de démence vont considérablement augmenter d’ici 2030 compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie. Dans cet esprit, une équipe Inserm a développé un modèle statistique permettant d’estimer l’importance de ce phénomène et l’impact de la prévention de certains facteurs de risque.


Les chiffres parlent d’eux-mêmes : +75% de cas de démence dans la population générale entre 2010 et 2030 et +200% chez les plus de 90 ans, la maladie d’Alzheimer représentant environ 60-70% de ces cas…
 
Issues des travaux d’une équipe d’épidémiologistes de l’Inserm, ces estimations font un peu « froid dans le dos »... Mais elles sont nécessaires pour anticiper les besoins et gérer cette évolution sociétale.
 
Par ailleurs, elles n’ont finalement rien de surprenant compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie prévu pour les vingt prochaines années. Selon l’Insee, celle-ci atteindra 87,6 ans pour les femmes et 81,5 ans pour les hommes en 2030, soit respectivement + 2,8 ans et + 3,5 ans par rapport à aujourd’hui.
 
« Nos estimations du nombre de cas de démence à l’horizon 2030 sont élevées, mais plus précises que celles obtenues jusque-là car nous avons pris en compte une donnée supplémentaire : les personnes non démentes ont une espérance de vie plus longue que les déments. En allongeant l’espérance de vie des premiers, nous observons un réservoir potentiel plus important pour l’apparition de démences plus tardives, notamment après 90 ans », explique Hélène Jacqmin-Gadda, coauteur des travaux.
 
« Cependant ces chiffres sont fondés sur l’hypothèse que le taux d’incidence annuel sera constant au cours des années à venir. Or, quelques travaux récents suggèrent une baisse de cette incidence. Ces données sont encore fragiles, mais plausibles dans le sens où le niveau d’éducation des Français augmente, or c’est un paramètre plutôt protecteur. De plus, les facteurs de risque vasculaires, comme l’hypertension ou encore le diabète qui accroissent le risque de démence, sont de mieux en mieux pris en charge », précise-t-elle.
 
Plus concrètement, et pour calculer le nombre de nouveaux cas de démence par an, les chercheurs ont utilisé les données de la cohorte Paquid mise en place en 1988 et incluant environ 4 000 sujets âgés de 65 ans et plus, vivant à domicile au début de l’étude.
 
Les chercheurs ont en outre évalué l’impact de mesures préventives. Ils estiment par exemple qu’une intervention efficace pour contrôler l’hypertension en population générale réduirait de 2,7% le nombre de cas de démences en 2030 chez les personnes âgées de 65 à 85 ans. « Un bénéfice relativement modeste compte tenu du fait qu’un bon contrôle de l’hypertension augmente l’espérance de vie et donc le risque associé à l’âge de développer une démence », clarifie la chercheuse.
 
Autre exemple : l’utilisation d’un médicament (pas disponible à ce jour) ciblant les sujets porteurs de l’allèle ε4 du gène de l’apolipoprotéine E qui accroit le risque de démence. Un tel médicament permettrait de réduire de 15 à 25% l’incidence des démences. « Cette stratégie n’augmenterait pas l’espérance de vie, mais ciblerait directement les mécanismes de la démence, d’où l’obtention d’une baisse importante de l’incidence des démences ».

Publié le 08/07/2013 à 06:00 | Lu 959 fois