Le point sur la thromboembolie veineuse… Et comment la traiter…

Suite à l'atelier d'information qui s'est tenu le 3 mai 2012 sur le thème « Phlébites et Prévention des AVC : apports des anticoagulants dans la prise en charge » où intervenaient les professeurs Grégoire Le Gal, médecine interne au CHU de Brest et Jean-Yves Le Heuzet, chef du service de cardiologie à l'HEGP, voici un point détaillé sur la thromboembolie veineuse, troisième maladies cardiovasculaires les plus courantes au monde mais pourtant, la cause de décès la plus facile à éviter en milieu hospitalier…





La thromboembolie veineuse (TEV) se classe au troisième rang mondial des maladies cardiovasculaires les plus courantes, après les cardiopathies ischémiques et l'accident vasculaire cérébral (AVC).

C'est également la cause de décès en milieu hospitalier la plus facile à éviter. Plus précisément, la TEV englobe deux pathologies sérieuses :

- La thrombose veineuse profonde (TVP) survient lorsqu'un caillot sanguin (thrombus) localisé dans une veine, en général une veine des membres inférieurs, obstrue partiellement ou totalement la circulation sanguine. Si un morceau ou l'ensemble du thrombus se détache, il peut migrer jusqu'aux poumons et provoquer une embolie pulmonaire. Parmi les symptômes de la thrombose veineuse profonde (TVP), on trouve : douleur, gonflement, rougeur à l'endroit concerné, ainsi qu'une dilatation des veines superficielles. La peau peut également s'avérer chaude au toucher. Toutefois, la TVP peut-être asymptomatique.

- L'embolie pulmonaire (EP) survient lorsqu'un caillot sanguin obstrue un ou plusieurs vaisseau(x) pulmonaire(s). Une fois dans le poumon, le caillot sanguin peut bloquer la circulation, provoquant un décès soudain ou des lésions durables des poumons et d'autres organes vitaux. Environ un tiers (34%) des décès dus à une thromboembolie veineuse (TEV) sont à mettre sur le compte d'une embolie pulmonaire (EP) soudaine et fatale. Les symptômes de l'embolie pulmonaire (EP) incluent : essoufflement aigu, douleurs thoraciques et accélération du rythme cardiaque, voire expectorations sanglantes chez certains patients. En milieu hospitalier, environ un décès sur dix est dû à une embolie pulmonaire.

Qui est exposé au risque d’une thromboembolie veineuse ?

Parmi les populations très exposées au risque de TEV, on trouve les patients subissant une intervention de chirurgie orthopédique lourde pour une arthroplastie de la hanche ou du genou, ainsi que ceux admis à l'hôpital en raison d'un état de santé préoccupant, ceux ayant subi une immobilisation récente.

- Pendant au moins deux mois après l'intervention, le risque d’une thromboembolie veineuse (TEV) symptomatique est plus élevé chez les patients qui viennent de subir une intervention de chirurgie orthopédique lourde que dans l'ensemble de la population.
- Parmi les facteurs de risque liés au patient ou prédisposants, on compte la thrombophilie héréditaire, l’âge, l'obésité, les antécédents d’une thromboembolie veineuse (TEV) et les varices.
- En l'absence d'un traitement préventif, le risque absolu d’une thrombose veineuse profonde (TVP) après une arthroplastie de la hanche ou du genou se situe entre 40 et 60%.

La thromboembolie veineuse (TEV) est difficile à diagnostiquer car près de la moitié des patients ne présentent aucun symptôme spécifique. La prise de mesures préventives en vue d'éviter la formation de caillots veineux constitue donc l'approche la plus économique et la plus efficace dans le cadre de la pratique clinique actuelle.

À quel point la thromboembolie veineuse (TEV) est-elle courante ?

À l'échelle mondiale, la TEV touche une personne sur mille.

- Aux États-Unis, la prévalence annuelle de la thrombose veineuse profonde (TVP) peut atteindre 2 millions de cas chaque année. On estime l'incidence de l'embolie pulmonaire (EP) aiguë à environ 60 à 70 patients sur 100 000.

- Au sein de l'UE, l'incidence de la thrombose veineuse profonde (TVP) est estimée à environ 700 000 cas par an. L'incidence de l'embolie pulmonaire (EP), quant à elle, est estimée à environ 400 000 cas par an.

En quoi la thromboembolie veineuse (TEV) est-elle un fardeau sanitaire ?

La TEV tue une personne toutes les 37 secondes, ce qui représente plus de 843 000 décès par an, l'Europe en comptabilisant plus de 540 000 à elle seule. Au sein de l'UE, la TEV est responsable de plus de 2 fois plus de décès que le cancer du sein, le cancer de la prostate, le SIDA et les accidents de la route réunis.

- 10 à 25% des embolies pulmonaires (EP) sont rapidement fatales, en général dans les 2 heures qui suivent l'apparition des symptômes. Une embolie pulmonaire (EP) peut survenir à nouveau et, le cas échéant, elle est généralement fatale.

- Même en l'absence d'une EP, les conséquences de la thrombose veineuse profonde (TVP) seule, telles que le syndrome post-thrombotique ou un risque accru de récidive, peuvent s'avérer coûteuses et difficiles à supporter.

- Les réadmissions en milieu hospitalier pour cause de TVP représentant 19%, le taux de récidive de la TEV reste élevé.

Comment prévenir et traiter la TEV ?

Les anticoagulants constituent le socle du traitement préventif destiné à éviter les caillots sanguins potentiellement mortels, mais les traitements classiques les plus couramment utilisés sont associés à des inconvénients non négligeables.

Le traitement classique de référence destiné à prévenir la TEV associée à la chirurgie orthopédique est constitué d'une classe d'anticoagulants appelés « héparines ». Les héparines doivent être administrées sous forme d'injection, ce qui peut présenter des inconvénients et provoquer une gêne. De plus, certains patients mis sous héparine peuvent subir une réaction rare mais grave connue sous le nom de TIH (thrombocytopénie induite par l'héparine), ce qui peut provoquer ou aggraver une thrombose.

À l'heure actuelle, la référence en matière de traitement de la TEV consiste en une approche complexe basée sur deux médicaments : l'héparine administrée de façon concomitante avec un AVK pendant 10 jours en moyenne puis un relais avec un antagoniste de la vitamine K (AVK) seul, tel que la warfarine.

À l'instar des difficultés associées à l'héparine mentionnées plus haut, la prise en charge des patients sous AVK (la warfarine, par exemple) peut également s'avérer délicate. Les AVK présentent en effet une fenêtre thérapeutique étroite (ce qui signifie que la marge de manoeuvre entre la dose provoquant une anticoagulation efficace, la dose pouvant accentuer les risques d'épisodes hémorragiques et celle qui peut augmenter le taux de caillots sanguins, est étroite).

Il est donc nécessaire d'adapter fréquemment la posologie et de pratiquer une surveillance étroite de la coagulation. De plus, les AVK mettent du temps avant d'agir et présentent de nombreuses interactions médicamenteuses et alimentaires. Les inconvénients des traitements actuels de la TEV peuvent aboutir à une sous-utilisation, ce qui peut s'avérer contraignant pour les patients et continuer à les exposer au risque.

Les nouveaux anticoagulants par voie orale semblent être prometteurs en ce qu'ils ne présentent pas les inconvénients des anticoagulants classiques, ce qui permet de les utiliser pour prévenir ou traiter plus de pathologies thromboemboliques veineuses ou artérielles. Parmi les avantages des nouveaux anticoagulants par voie orale, on trouve des taux de coagulation prévisibles ne nécessitant ni surveillance régulière de la coagulation ni adaptation posologique, un risque atténué d'interactions médicamenteuses et aucune restriction alimentaire.

Article publié le 11/05/2012 à 09:08 | Lu 1738 fois