Le logement face à la prise d’âge, chronique de Serge Guérin

L’augmentation du nombre de personnes très âgées nécessite de prévoir de nouvelles constructions. On peut en effet considérer qu’il manque entre 40 et 50 000 places pour accueillir dans les dix ans qui viennent les très âgés. Pour fixer les choses, signalons qu’il faut mobiliser 100.000 euros par place construite... À cela s’ajoute une contribution spécifique annuelle de 7.500 euros de l’Etat par place pour la prise en charge de la médicalisation. Le Plan Solidarité-Grand Age actuel, initié en 2006, s’est donné pour objectif la construction annuelle de 5.000 places en maisons de retraite médicalisées. Cet effort devant se poursuivre sur cinq ans.


Ce Plan mérite d’être salué, mais apparaît insuffisant au regard des enjeux et reste trop peu volontariste en termes de politique de prévention, de prise en compte de l‘importance du lien social, de l’estime de soi, de l’engagement dans la société...

Si, certaines personnes ne pourront faire autrement que de rejoindre ce type d’établissement et seront alors fort soulagées, ainsi que leur famille, d’y être accueillies... Parfois, aussi, des seniors bien portant désirent choisir des établissements collectifs pour pallier leur solitude ou pour être rassuré pas la présence d’un encadrement efficace.

Les logements-foyers ou les résidences services s’inscrivent dans cette logique et répondent aux attentes et besoins d’une large partie des seniors âgés. Ces structures peuvent, comme les autres lieux d’accueil, chercher à s’adapter aux attentes et aux modes de vie toujours plus diversifiés de leurs clients. .../...
Le logement face à la prise d’âge, chronique de Serge Guérin

Par ailleurs, dans certaines situations, et contrairement à ce que l’on croit, le maintien à domicile peut devenir plus onéreux et beaucoup plus compliqué que la prise en charge par des institutions. Il n’y a donc pas de solution miracle, mais la nécessité de proposer une offre globale et complémentaire qui permette à la personne âgée d’effectuer un réel parcours résidentiel, au sens où il est utilisé dans le logement social : pour marquer la possibilité d’évoluer au cours de sa vie.

Certaines personnes commencent en effet dans le logement social pour évoluer, par la suite, dans le logement « normal » avant parfois de devenir propriétaire ; d’autres ont d’abord loué avant de racheter leur logement à la société d’Hlm. Cette notion de parcours montre la possibilité d’une évolution dont la personne âgée peut rester maître.

Cela dit, cette perspective implique le développement et la diversification des services à la personne, l’adaptation des transports, l’ajustement des habitations pour prendre en compte l’évolution de la fragilité ou encore l’augmentation du nombre de places de services de soins infirmiers à domicile. Ils nécessitent des investissements importants. Par exemple, depuis 2006, 6.000 places supplémentaires de services de soins infirmiers à domicile ont été créées. Ces investissements nécessitent une perspective de long terme, car pour les faire vivre, il faut des moyens et de personnel en continu.

Parfois, pour faciliter la présence à domicile, il serait seulement nécessaire, au-delà des services de soins et d’accompagnement, de permettre aux locataires d’être aidés en termes de jardinage ou de bricolage. Mais à des prix qui ne soient pas ceux du marché, car cela exclut, de fait, ces personnes. Autre exemple : des femmes seules souhaitent intégrer une maison de retraite simplement pas peur d’être seules la nuit. Un service de présence nocturne, où le veilleur de nuit passerait une ou deux fois dans la nuit pourrait suffire à rassurer ces locataires et leur permettre de rester à son domicile. Plus longtemps.

Serge Guérin
Professeur à l’ESG
Vient de publier Vive les vieux !, Editions Michalon

Publié le 07/04/2008 à 10:00 | Lu 5387 fois