Le chant des regrets éternels de Wang Anyi : Shanghai blues…

L’éditeur Picquier, spécialisé dans les auteurs asiatiques, a publié en 2006, le très beau roman de Wang Anyi intitulé « Le chant des regrets éternels ». Une belle fresque qui nous ramène dans le Shanghai des années 50 et nous fait traverser quarante ans d’histoire. Un livre indispensable pour découvrir la « Paris de l’Extrême-Orient » comme on l’appelait alors, à travers le destin d’une femme Wang Qiyao (Pure Jade) et une belle réflexion sur le temps qui passe…


Ce roman est tout entier traversé par la palpitation d’une ville, la mythique Shanghai, déployée dans le dédale de ses ruelles, le bruissement de ses rumeurs, les nuées de ses pigeons auxquels nul secret n’échappe, et les chambres de ses demoiselles, où l’attente « use la patience de vivre ».

Et perdus quelque part dans le corps de la cité, une femme et son destin, intimement lié au destin de la ville qui, au cours du siècle dernier, vit à la fois son avènement, son repli et sa renaissance. Dans un style poétique souvent aussi léger qu’une « aile de cigale », Wang Anyi dépeint dans ce roman en trois actes la vie d’une femme, Wang Qiyao, au nom évocateur : « Pure Jade ».

Reine de beauté dans le flamboiement d’un Shanghai qui connaît avant 1949 ses dernières années de liberté, partageant une passion cachée avec un notable politique, elle doit se réfugier ensuite dans une des « fissures du monde », se fondre dans l’anonymat, alors que la nuit de la Révolution culturelle s’est abattue sur la cité autrefois lumineuse. Lorsque Shanghai renaît, à l’aube des années 1980, est-il encore temps pour Wang Qiya de rattraper les jours enfuis ?

Le chant des regrets éternels de Wang Anyi : Shanghai blues…
Extrait

« Dès lors, il cessèrent de penser à l’avenir, cet avenir si vague. Comment auraient-ils pu résister à cette érosion du temps qui, goutte à goutte, rendait la réalité plus réelle et le vide encore plus vide ? Sans avenir ils appréciaient davantage le présent, savourant chaque seconde qui passait, vivant une brève journée comme une longue nuit, un court moment comme un grand cycle de vie. Disposer de beaucoup de temps permet d’exprimer ses sentiments dans leur plénitude, mais ce temps est forcément gaspillé sans compter. Limité, le temps présente d’autres avantages : pris par le temps, on rejette le superflu au profit de l’essentiel ; ainsi la rareté s’avère-t-elle plus précieuse que la quantité ».

Le Chant des regrets éternels de WANG Anyi
Editions Picquier
Traduit par Yvonne André et Stéphane Lévêque

680 pages
23,00 euros
ISBN : 87730-806-5

Publié le 11/03/2012 à 18:32 | Lu 4454 fois