Le bénévolat : trois questions à Thibaut de Saint-Pol

Qu’est-ce que le bénévolat ? De quelle manière le numérique réinvente la mobilisation bénévole ? Comment l’engagement bénévole a-t-il évolué ces dernières années ? Trois questions à Thibaut de Saint Pol, directeur de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative.



Quelle définition peut-on donner de l'engagement bénévole ?

Le bénévolat, c'est le fait de s'engager librement sur son temps personnel pour une action au service des autres de manière non rémunérée.
 
C'est le cas de 15 millions de Français qui s'engagent dans des environnements très divers pour des causes qui vont de l'environnement, à la santé, à des aspects plus sociaux.
 
Et c'est important pour nous, à la fois pour ce que ça apporte pour l'ensemble de notre société en termes d'aide aux plus défavorisés, en termes d'aide de manière intergénérationnelle pour les personnes âgées, mais aussi pour les bénéfices que retirent elles-mêmes les personnes qui s'engagent.
 
Les politiques publiques, elles s'intéressent au bénévolat dans le spectre plus large de l'engagement.
 
Engagement des Français qu'on cherche à susciter pour tout l'intérêt qu'il représente, et notamment, l'aide qu'on va apporter aux autres.
 
On cherche à le susciter dès le plus jeune âge, dès l'école, avec des formes diverses d'engagement, et le bénévolat doit être distingué du volontariat, qui est des formes d'engagement dans lesquelles on a une indemnité ou une rémunération.
 
Quand on est bénévole, à l'inverse, c'est un engagement libre qui est non rémunéré.

Comment le numérique réinvente la mobilisation bénévole ?

La difficulté du bénévolat, c'est que si vous, moi, nous voulons nous engager demain, nous ne savons pas forcément où aller où trouver l'association dans notre village, dans notre ville dans laquelle on peut donner un peu de notre temps.
 
Et le numérique, il change ça.
 
On a un certain nombre de plateformes qui vont permettre de mettre en relation les gens qui veulent donner de leur temps bénévolement avec les associations ou les organismes qui ont besoin de bénévoles.
 
Et c'est le cas en particulier de la plateforme publique du bénévolat, jeveuxaider.gouv.fr qui permet justement sur l'ensemble du territoire français de vous donner les missions pour lesquelles des associations, des organismes recherchent des bénévoles de quelques heures à des engagements un peu plus longs.
 
Le numérique, ça représente ainsi une opportunité fantastique pour justement faciliter, encourager le bénévolat.
 
Depuis la création de jeveuxaider.gouv.fr, on a 500 000 Français qui se sont inscrits sur la plateforme et qui réalisent des missions.
 
Tous les jours, 500 personnes s'inscrivent pour proposer de donner un petit peu de leur temps. Ça peut être que quelques heures près de chez eux pour une cause d'intérêt général. On a parfois l'impression que l'on est dans une société individualiste où les gens ne s'engagent pas.
 
Et en fait, en réalité, ce qu'on voit, c'est que les Français s'engagent encore fortement pour des causes d'intérêt public.
 
Ça a été le cas en particulier lors du Covid. La plateforme jeveuxaider.gouv.fr elle a été montée en une semaine pour répondre aux besoins spécifiques qu'on avait pendant la crise sanitaire de distribution de masques, aider les personnes âgées et très rapidement, en quelques jours, on a eu 200.000 personnes qui se sont inscrites sur la plateforme.
 
Et c'est encore le cas aujourd'hui quand on mène des campagnes spécifiques.
 
L'année dernière, par exemple, à destination de l'Ukraine, on a eu en très peu de temps 20 000 Français qui se sont inscrits pour apporter leur aide.
 
Et leur aide sous des formes très diverses. Ça pouvait être distribuer des biens de première nécessité.

Ça pouvait être aider pour donner des cours en français. Il y a une très grande diversité de manières d'être bénévole et d'aider les autres.
 
Encore aujourd'hui, on observe que dans les campagnes qu'on mène au cours de l'année sur des thématiques, l'environnement, à la rentrée sur le mentorat, on a à chaque fois des dizaines de milliers de Français qui s'inscrivent sur notre plateforme jeveuxaider.gouv.fr, et qui vont proposer de s'engager pour une cause spécifique.
 
Et c'est peut-être une des spécificités du bénévolat désormais, c’est que l’on observe des engagements très forts pour certaines causes.
 
Ça peut être un engagement de courte durée, mais dans lequel on va se mobiliser. On va donner quelques heures de son temps pour l'environnement, pour l'accueil des Ukrainiens au moment de la crise. Et cet engagement reste très fort et en particulier, chez les plus jeunes. Évidemment, le numérique n'est pas une solution magique qui répond à tout.
 
On a aujourd'hui beaucoup de bénévoles qui sont des personnes âgées dans les associations et effectivement, on s'est rendu compte qu'au moment du Covid, le bénévolat de ces tranches d'âge diminuait.
 
Et les plateformes numériques répondent moins à ce besoin. En revanche, ce qu'on observe, c'est que le numérique est un outil efficace pour saisir les plus jeunes. Et on a sur notre plateforme, par exemple, la moitié des personnes inscrites qui ont moins de 30 ans, entre 16 et 30 ans, ce qui est considérable.
 
Pour encourager les plus âgés à faire du bénévolat, il y a d'autres outils qui sont utilisés, qui doivent encore être plus sur le terrain, en termes de sollicitations. Et on a un ensemble d'associations qui sont particulièrement efficaces en ce domaine.

Quelles sont les grandes évolutions observées concernant l’engagement bénévole ?

Nos associations jouent un rôle essentiel sur l'ensemble de nos territoires et pour fonctionner, elles ont besoin de bénévoles.
 
On a vu pendant la crise sanitaire et à chaque fois que notre société a été confrontée à des difficultés, c'est le cas aussi pendant les attentats qui ont frappé la France, il y a eu de grands moments de solidarité avec beaucoup de bénévoles.
 
L'enjeu pour nous, c'est de pouvoir maintenir un engagement suffisamment fort pour soutenir nos associations. Or, le portrait-robot, le profil du bénévole, il a changé.
 
Il a changé, notamment au moment du Covid, pour des raisons pratiques, sanitaires où la part des personnes les plus âgées a diminué. Et on a un vrai enjeu aujourd'hui en termes de renouvellement générationnel, du bénévole, mais aussi des instances dirigeantes des associations.
 
Et donc le vrai enjeu aujourd'hui enfin, un des principaux, c'est d'aller chercher d'autres générations et en particulier, les plus jeunes. Et, c'est ce pourquoi les plateformes numériques sont intéressantes.
 
On a également comme enjeu essentiel, c'est d'aller chercher ceux qui vont moins vers l'engagement. On sait que les personnes engagées ont tendance à être plus favorisées socialement, plus diplômées, avec des revenus un peu plus élevés.
 
Or, l'engagement, notamment pour les plus jeunes, représente un vrai enjeu en termes de compétences acquises dans cet environnement et au travers de l'engagement.
 
Et donc, on a des politiques spécifiques pour essayer d'encourager le bénévolat, l'engagement chez les jeunes, en particulier les plus défavorisés, qui vont pouvoir acquérir des compétences dans un cadre non scolaire en dehors de l'école, qui vont leur être utiles pour leur entrée dans la vie professionnelle et dans les autres dimensions de la vie sociale.
 
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Publié le 14/09/2023 à 01:00 | Lu 2779 fois