La môme vert-de-gris... restaurée ! Un classique à revoir (film)

Voici une bonne nouvelle pour tous les cinéphiles et les amateurs de vieux polars des années 50 en noir et blanc. En effet, La Môme vert-de-gris, le film qui fit d’Eddie Constantine, une figure mythique de l’agent secret dur à cuir (Lemmy Caution), vient d’être restauré. Une excellente occasion de revoir ce long-métrage qui préfigure, d’une certaine manière, le premier James Bond qui sortira une dizaine d’années plus tard.


Pour mémoire, l’histoire est la suivante… Mickey, agent secret du F.B.I., a été assassiné à Casablanca. Dépêché par l'Agence, le redoutable Lemmy Caution mène l'enquête. Il fait bientôt la connaissance de la sœur de Mickey, la chanteuse de cabaret Carlotta de La Rue. Surnommée la « Môme Vert-de-Gris », la belle est la petite amie de Rudy Saltierra, que Caution soupçonne d'être le commanditaire de l'assassinat de Mickey.
 
Deuxième film de Bernard Borderie, ce long-métrage connut un immense succès à sa sortie en 1953. En plus d'offrir à son réalisateur une renommée internationale, le film fit d'Eddie Constantine une figure mythique de l'agent secret dur à cuire, au même titre que James Bond.  
 
Lemmy Caution est un héros de romans policiers inventé par l'auteur anglais Peter Cheyney. Plébiscité par les lecteurs français au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, chaque nouvel épisode édité par Gallimard est alors un véritable événement populaire. C'est dans ce contexte que le jeune cinéaste Bernard Borderie porte à l'écran la première aventure cinématographique de l'agent le plus célèbre de l'époque, qui en inspira certainement bien d'autres.
 
En réalisant La Môme vert-de-gris, Bernard Borderie ne cache pas son intention de rivaliser avec les grands films de gangsters américains qui foisonnent sur les écrans des salles de cinéma. Le film abonde de caractéristiques propres aux polars US : un scénario simple mais efficace (héros sans peur et sans reproche, femme fatale ambiguë, méchant suave et ignoble), une esthétique empruntée aux grands films noirs américains (noirs et blancs tranchés, clairs-obscurs...), tout y est. Même la musique jazzy qui rythme les séquences n'est pas sans rappeler les bandes originales des films outre-Atlantique de l'époque.
 
L'influence américaine est encore plus frappante dans la composition des personnages. Pour incarner son Lemmy Caution, Bernard Borderie est allé chercher Eddie Constantine, un jeune chanteur à l'accent américain fortement prononcé et au passé cinématographique quasiment vierge. Avec sa gueule de gangster qui rappelle celle d'un certain Humphrey Bogart, Constantine fait Caution un agent secret au charisme jovial, imperturbable, blagueur, bagarreur et dragueur.
 
Son rôle connut un tel succès qu'il traça la voie à quarante ans de carrière, ponctuée de nombreuses autres aventures de Lemmy Caution au cinéma et à la télévision, dont deux sont des volets officieux réalisés par Jean-Luc Godard (Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution et Allemagne 90 neuf zéro).
 
De son côté, la fameuse Môme-vert-de-gris (ou Carlotta de La Rue), parfaitement interprétée par Dominique Wilms, ressemble aussi aux héroïnes américaines de l'époque : la mèche tombante comme Veronica Lake, le regard de Braise d'Ava Gardner et même les bouffées de tabac qui rappellent celles de Lauren Bacall.
 
En réalité, en regardant le film de Borderie aujourd'hui, on ne peut que constater qu'il annonce, avec neuf ans d'avance, les films d'une autre saga mondialement connue... Entre le badinage qu'entretient Lemmy Caution avec la secrétaire de son chef, son statut incontesté de légende auprès de ses collègues, son bras de fer viril avec un adversaire à sa mesure, et surtout ce baiser échangé avec Carlotta de La Rue sur le champ de bataille tandis qu'ils attendent un hélicoptère, tout est incontestablement annonciateur de la saga 007.
 
Ainsi, La Môme vert-de-gris a non seulement ouvert la voie à la série James Bond mais il a aussi inauguré un genre cinématographique français qui connaîtra un immense succès au point d'engendrer une « franchise », et surtout un personnage iconique qui poursuivit Eddie Constantine jusqu'à sa mort.
 
La Môme vert-de-gris (1953)
Avec Eddie Constantine, Dominique Wilms, Howard Vernon, Dario Moreno, Jean-Marc Tennberg, Maurice Ronet, Nicolas Vogel, Philippe Hersent
 
En combo DVD/Blu-ray le 11 avril 2018
 
Prix : 19.99 euros TTC

Publié le 12/02/2018 à 01:00 | Lu 1814 fois





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