La Finale : Thierry Lhermitte en grand-père qui perd un peu la boule... (film)

Le dernier film de Robin Sykes, La Finale, sort sur les écrans français le 21 mars prochain avec dans les rôles principaux, Thierry Lhermitte et Rayane Bensetti. L’histoire ? Celle de la famille Verdi, aux petits soins de Roland, le grand-père, qui perd un peu la boule ces derniers temps. Tous s’en occupent comme il faut sauf le petit-fils qui n’a qu’une idée en tête, celle de monter à Paris. Interview croisé entre le réalisateur et Thierry Lhermitte.





Comment est née l’idée de La Finale ?
Robien Sykes : je cherchais une histoire qui sorte un peu des comédies romantiques habituelles ou des simples comédies potaches, pour moi qui n’avais jamais écrit ce genre de cinéma, s’aventurer sur ce terrain était trop risqué. Je voulais surtout un thème qui n’avait pas encore été trop abordé dans la comédie. Un truc un peu « osé ». C’était le cas pour ce personnage qui perd gentiment la boule avec l’âge, ce « papy zinzin » comme j’aime à l’appeler. Je suis donc parti de ce postulat.
 
Qu’est-ce qui vous intéressait dans ce projet ?
Thierry Lhermitte : J’aimais la manière, assez légère, dont Robin Sykes parlait des gens qui perdent la tête car la plupart du temps on traite ce sujet avec gravité. Et puis le rôle qu’il me proposait était extra à incarner. Le fait que Roland soit embarqué dans ce voyage par son petit-fils est une situation à la fois réaliste et cocasse : il apparaît comme un boulet ; c’est une grenade dégoupillée qui, à tout moment, peut faire rater le plan de Jean-Baptiste.
 
Est-ce une histoire personnelle ?
Robien Sykes : La Finale n’est pas un récit autobiographique. Mais en essayant de faire du cinéma pour les gens que j’aime, j’ai forcément mis beaucoup d’eux dans mes personnages. Du coup, je dois reconnaître qu’ils y trouvent tous grâce à mes yeux. Quand Roland a des relents de racisme colonialiste, il m’est difficile de le détester car ses réflexions je les ai déjà entendues dans mon entourage familial : elles sont déplacées et totalement inadmissibles aujourd’hui mais elles ne sont en rien sincères. C’est culturel et générationnel. Bien plus bête que méchant.
 
Idem pour le papa de JB : dans cette histoire, il a le mauvais rôle mais je ne peux que l’aimer car c’est un père inquiet qui se retrouve face à une situation difficile à gérer. Même l’insolence ou l’arrogance adolescente de JB envers son grand-père au début du film me semblent plus attachantes que choquantes.

Avez-vous donc immédiatement accepté la proposition de Robin Sykes ?
Thierry Lhermitte : j’ai d’abord fait lire le scénario à un ami dont les parents perdent la mémoire car j’avais besoin de savoir si la situation et les réactions de Rolland leur paraissaient crédibles. Quand ils m’ont confirmé que tout cela était parfaitement vrai, je n’ai plus hésité.
 
Vous êtes-vous également inspiré de célèbres films de duo ?
Robien Sykes : inspiré non, mais avec Antoine Raimbault, mon co-scénariste, nous en avons clairement repris les codes. Des films comme La chèvre ou Les spécialistes mettent en scène des personnages que tout oppose et qui se retrouvent contraints et forcés de partager une aventure. La maladie de Roland, c’est un peu cette paire de menottes qui lie le flic au voyou. Elle oblige nos deux personnages qui se connaissent mal et appartiennent à des générations différentes à avancer main dans la main. Pour JB., ce grand-père est un vrai boulet mais sa dépendance l’oblige à ne pas le laisser tomber. Un peu comme Rain man le film de Barry Levinson. Et c’est évidemment au travers des péripéties provoquées par ces « chaines » qu’ils apprendront à se découvrir et à s’apprécier.
 
En quoi aviez-vous à coeur de défendre le personnage de Roland ?
Thierry Lhermitte : c’est un personnage bien écrit car il est à la fois bourré de contradictions et plein de tendresse. Le fait qu’il ait un peu mauvais caractère le rend d’autant plus riche. Pour le jouer, il fallait travailler sérieusement sans trop se prendre au sérieux. En amont du tournage, j’ai donc lu et relu quotidiennement mon texte pendant plusieurs semaines et je m’amusais à adopter le côté « sans filtre » de Roland en lançant par exemple un « ta gueule » à quelqu’un en plein milieu d’une conversation ; ça me faisait marrer.
 
L’idée de faire revoir, comme en direct, la finale de la Coupe du Monde à un homme qui perd la tête est une très jolie idée. Quand vous est-elle apparue ?
Robien Sykes : très vite. Le film s’est quasiment construit à partir de cette idée car j’avais envie de réunir, dans ce qu’on appelle une comédie transgénérationnelle, deux personnages issus de la France d’hier et celle d’aujourd’hui pour montrer leur compatibilité. Lors de cette Coupe du Monde, il y a eu une entente nationale autour du Black-Blanc-Beur. Le message que je voulais faire passer était donc de dire qu’on pouvait revenir à cette conciliation.

Quels étaient les pièges à éviter ?
Thierry Lhermitte : le risque était que cela sonne faux, qu’on voit un acteur jouer un malade. Il fallait donc être dans la vérité ; que Roland fasse semblant de comprendre ce qu’on lui dit sans trop le montrer. Mais ces choses-là ne s’intellectualisent pas : quand on est vraiment dans la situation, on n’a pas besoin de faire semblant.
 
Comment s’est passée la rencontre avec Thierry Lhermitte ?
Robien Sykes : Il a fallu que je gagne sa confiance car c’est un acteur exigent. Il ne me connaissait pas mais il a tout de suite compris que je lui demanderai beaucoup. C’est forcément délicat pour un acteur de sa génération d’incarner un homme qui perd la tête avec l’âge, il faut un certain courage. Je pense qu’il a compris que ce n’était pas là le thème principal du film mais bien le prétexte à son histoire.
 
Après, nous avons construit le personnage ensemble. Je lui ai parlé de mon père, de mon grand-père et pas mal de ma mère ! Mais aussi de Thierry Roland, le plus célèbre des « beaufs » de France, à qui le personnage doit beaucoup. Une personnalité aimée autant qu’haïe des français et dont les sorties racistes ou misogynes sont restées légendaires. Il y avait ensuite évidemment un chemin à faire entre lui et les esquisses de personnalités que je lui montrais. Je l’ai vu s’approprier le personnage dès les essais costumes en fait. Il avait enfilé ses mocassins comme des savates…

Article publié le 20/03/2018 à 01:00 | Lu 2706 fois